Enquête exclusive : Ereintées par la crise, les salles de cinéma incapables d’assurer la reprise

09-06-2020

Le confinement  total exigé par la pandémie du Covid-19, a un lourd impact sur le secteur cinématographique, avec la fermeture des salles de cinéma, et la suspension de tous les spectacles, depuis le 15 mars dernier.

D’après les exploitants des salles de cinéma, qui se sont réunis samedi dernier pour parler de cette crise, ils ont tous enregistré un chiffre d’affaire nul, et aucune recette. En effet, tous les espaces culturels sont frappés de plein fouet financièrement…

 « Même Pathé, le cinéma multiplex, qui vient de débarquer en Tunisie, estime que la réouverture des salles avec 50% des spectateurs coutera cher à l’enseigne, notamment,  avec les nouvelles conditions de distanciation sociale. Les revenus d’une journée avec tant de personnes à l’entrée, ne couvriront même pas les charges fixes d’électricité, hygiène, projection, et techniciens…En revanche, les petites salles auront plus d’avantages durant la réouverture, car la projection n’est pas si pesante côté budget.

En effet, le secteur cinématographique figure parmi les derniers secteurs qui vont reprendre leurs activités normalement. Malgré cela, les propriétaires des salles confirment qu’ils n’ont pas encore reçu le cahier des charges du protocole sanitaire spécifique. Pourtant la réouverture est programmée pour le 14 juin prochain.

Les aides de l’Etat tardent

A cet égard, le ministère des affaires culturelles a mis un fonds de relance de la culture (FRC), à la disposition de tous les sinistrés du secteur culturel. Pour les exploitants, ils auront droit à des aides financières (éligibilité sur dossier), qui couvriront une partie des charges fixes, comme la location des salles, les salaires des employés, les couvertures sociales…

Néanmoins, les actifs dans le secteur déplorent le retard de ces aides, et confirment qu’ils n’ont pas reçu de réponse jusqu’à maintenant, sachant que leurs demandes ont été déposées sur le site dédié depuis le 12 avril, dernier délai de dépôt.

Ce retard a été également confirmé dans un communiqué publié hier sur la page officielle de l’UTICA, lors d’une réunion de la fédération nationale des services, qui a par ailleurs appelé à activer ces mesures le plus tôt possible, pour sauver le secteur des services,  qui emploie 38% de la main d’œuvre en Tunisie,  le secteur culturel en fait partie.

D’autre part, les propriétaires de cinéma ont rappelé qu’il n’y aura pas de nouvelles sorties de films puisque les tournages étaient tous suspendus, que ce soit en Tunisie ou à l’étranger. S’y ajoute la faible affluence des spectateurs qu’il y aura, durant les mois de juillet, aout et septembre, de la saison estivale.

Les préparatifs pour les JCC démarrent bientôt

 Dans le cadre des préparatifs de la 56ème session des journées cinématographiques de Carthage 2020 (JCC), le comité directeur a annoncé qu’un forum se tiendra à partir du mardi 16 juin. L’objectif étant d’effectuer une consultation générale auprès des professionnels du cinéma, et cela, lors de quatre ateliers de travail axés sur : « l’Industrie, marché et diffusion de films » (16 juin et 30 juin), « Rayonnement du festival (du 17 juin et 01 juillet), « Archives, promotion du patrimoine et réception critique (19 juin et vendredi 03 juillet), et « le devenir des JCC »,  dont la date sera communiquée ultérieurement.

A cet égard, le directeur du forum, critique de cinéma et professeur, Kamel Ben Ouanès, nous a expliqué qu’avec l’annulation des compétitions internationales des JCC,  il était propice de profiter de ce temps d’arrêt pour examiner les problèmes confrontés par les professionnels, et revaloriser la mémoire du Festival.

Le festival des JCC détient un patrimoine d’héritage, d’archives et document, cumulés depuis 1966, ajoute-t-il. Malheureusement cette mémoire est dispersée et disséminée. Il n’existe même pas une structure pour collecter des milliers de films arabo-africains primés, dont les copies sont introuvables.

D’autres œuvres ne sont pas converties sur des supports numériques exploitables. C’est une occasion de rassembler les retours des critiques écrits à travers le monde », a précisé Pr. Ouanès.

L’avenir d’une institution se construit bien évidemment à travers son histoire », souligne-t-il.

C’est d’ailleurs le titre du quatrième atelier, « Le devenir des JCC », dont Nidhal Chemingui, la chargée de communication du festival nous a révélé, qu’il sera une sorte d’aboutissement des trois autres ateliers précédents.

« Des décisions seront prises pour garder ou bien changer l’ADN des JCC. Les consultations avec les professionnels du cinéma, pourront même aboutir à une proposition de projet de loi pour réformer cette industrie. Rien ne sera décidé qu’après les trois ateliers précédents… », a-t-elle conclu.

Emna Bhira