Tunisie : Des soldes marqués par les méventes ; les commerçants catastrophés, les consommateurs désargentés !

28-02-2022

Un mois après le démarrage des soldes d’hiver 2022 en Tunisie, le bilan est « catastrophique », selon la chambre syndicale nationale du commerce du prêt à- porter et des tissus, relevant de l’UTICA, . En effet, les résultats réalisés sont 50% moins importants que la saison écoulée. Les objectifs escomptés n’ont pas été atteints.

A Tunis, plusieurs commerçants que Gnetnews a interrogés à ce sujet, se disent « insatisfaits » du résultat des soldes, « pourtant déjà peu satisfaisant en 2021, en raison de la 5ème vague du covid-19 et du couvre-feu ». D’autres vendeurs ont souligné que les soldes n’ont pas généré de chiffre d’affaires supplémentaire par rapport à un mois normal. Ils déclarent aussi que la cherté de la vie en Tunisie, pèse sur les dépenses de consommation, notamment sur celles de l’habillement.

En effet, les soldes n’ont, désormais, plus de sens pour les Tunisiens. En faisant le tour des magasins dans un centre commercial de la banlieue Nord de Tunis, nous avons constaté que sauf quelques acheteurs se sont rendus à la caisse. Et cela, malgré les efforts déployés par les commerçants et les enseignes qui ont fait des remises importantes, ayant atteint les 70%.

A midi, d’habitude heure d’affluence, notamment des femmes « accros » shopping, le Mall était quasi vide. Les quelques personnes qui s’y trouvaient, tournaient en rond, et snobaient les prix pourtant au rabais.

Ce sont les tensions liées au pouvoir d’achat en berne, qui ont drastiquement impacté les soldes d’hiver.

Pour cette femme que nous avons rencontrée chez une enseigne étrangère très sollicitée par les Tunisiens, la période consacrée aux soldes tombent mal.

« Après un mois de les dépenses consacrées aux fêtes de fin d’année en janvier, il y a le budget dédié aux vacances scolaires mi- trimestrielles de février pour les enfants, les dépenses quotidiennes, etc. En cette période, la plupart des citoyens font face à des fins de mois difficiles avec la flambée des prix, ce qui rend le shopping même en période des soldes,  parmi les derniers de nos soucis… », explique-t-elle.

Nous avons aussi échangé avec une autre jeune femme en train de chercher une paire de chaussures à sa pointure…Cette dernière nous a confié qu’elle a attendu la troisième démarque pour pouvoir profiter des bonnes affaires. « Ce n’est pas évident de laisser de l’argent de côté pour l’habillement, sans oublier que les prix sont assez chers par rapport aux salaires moyens des Tunisiens, déplore-t-elle.

Du côté des commerçants, la réticence des acheteurs a des retombées très négatives sur leurs trésoreries.

D’après le gérant de ce magasin, les promotions représentent un moment important pour écouler les stocks.

« Si les stocks nous restent sur les bras, nous serons incapables de reconstituer  notre trésorerie, pour racheter de nouveaux produits, financer de nouvelles collections, et rembourser nos dettes  et impayés auprès des fournisseurs et des banques, cumulées depuis le début de la pandémie. Si on rate les soldes, c’est tout un secteur de textile et de prêt-à-porter qui va s’écrouler », nous informe-t-il.

Ce constat a été confirmé aussi par le président de la chambre syndicale nationale des tissus et du prêt à porter, Mohsen Ben Sassi, qui a rappelé qu’il existe des commerçants qui risquent la prison à cause des chèques sans provision, donnés aux fournisseurs comme garantie de paiement durant la pandémie. D’autres ont changé d’activité à cause de la crise économique, et se sont reconvertis professionnellement, à cause de la baisse  sans précédent des ventes… 

D’autres causes sous-jacentes, se cachent derrière l’échec des soldes cette année, nous indique une autre gérante de magasin de luxe.

«  Le commerce des vêtements d’occasion, de seconde main et la vente en ligne de toute sorte de produits, sont en train de gagner du terrain. Ces deux nouveaux modes de consommation, sont apparus avec la crise économique aiguë que nous subissons, et menacent le secteur formel. Le commerce parallèle, la fripe, les dépôts de vente, ainsi que les pages de e-commerce sur les réseaux sociaux, menacent le secteur du prêt-à-porter. Ces derniers gagnent désormais largement plus, vu qu’ils ont moins de charges et ne payent pas ni les impôts, ni le loyer, ni le personnel », rappelle-t-elle.

Emna Bhira