Tunisie : Marzouki appelle Kaïs Saïed à cesser de nuire à la constitution et à en être le garant

29-01-2021

L’ancien président, Moncef Marzouki, considère que « la Tunisie est aujourd’hui dans une situation inextricable sans précédent, elle est la victime d’un conflit qui va en s’aggravant, entre le parlement qui représente la légitimité électorale et constitutionnelle, tout en étant dépourvu de toute légitimité éthique et politique aux yeux de la population, et une alliance objective entre les populistes et le clan extrémiste des despotiques, qui n’a d’autre but que d’abroger la constitution de la révolution, et de revenir au pouvoir autocratique, c’est-à-dire celui de la famille, des proches et des appareils. Tout cela dans un cadre catastrophique, face à un pays sinistré par la pandémie du Coronavirus, la corruption et la pauvreté, sans le moindre horizon ».

Dans un entretien avec al-Quds el-Arabi, Moncef Marzouki a ajouté que « ce qui est demandé, aujourd’hui, du président de la république est de cesser son incitation contre la constitution, et de jouer son rôle, en en étant le garant, le président de tous, et non en tant que dirigeant d’un groupe contre l’autre. Il devra laisser le gouvernement travailler ».

« Le gouvernement dont la nomination a été validée dernièrement par l’Assemblée devra œuvrer à améliorer la situation des Tunisiens. Le parlement doit retrouver le respect du peuple, et accélérer l’adoption d’une nouvelle loi électorale à même de résoudre le plus grand problème empêchant l’instauration d’un régime démocratique stable », a-t-il prôné.

Sinon « le triumvirat au pouvoir ne serait pas digne de la responsabilité »… »Est-il admissible que l’équipage du bateau se dispute autour des prérogatives et des honneurs, et le bateau est en train de couler ? », s’est-il interrogé.

Moncef Marzouki qui avait annoncé son retrait de la vie politique après les élections de 2019, tout en affirmant la poursuite de son engagement en faveur des affaires du peuple et de la nation, déplore que « les personnalités qui bénéficient d’une importante expérience politique, et ont joué un rôle important dans la révolution, ont jeté l’éponge. Ils se sont retirés de ce paysage écœurant, qui est celui de l’actuelle scène politique ».

L’ex-président appelle les forces de la révolution « à réorganiser les rangs pour préserver la Tunisie d’un putsch contre la démocratie de la part de l’alliance despotique – populiste, ou de l’envenimation continue face à l’alliance d’Ennahdha et d’une partie de l’ancien régime. Et dans les deux cas, le résultat est la démolition de la Tunisie. Il n’y a d’autre mission importante aujourd’hui, que de sauver la Tunisie, des sauveteurs », a-t-il souligné.

Ce militant de longue date, et opposant farouche à l’ancien régime n’exclut pas un retour à la vie politique et la formation d’un nouveau front « pour contrer l’alliance des populistes et du clan fasciste de l’ancien régime, qui pourrait plonger le pays dans le chaos et le faire revenir à la case de départ ».

Marzouki résume la crise de la Tunisie par « le blocage de l’économie, la multiplicité et la succession des gouvernements, la mentalité revendicative qui sévit dans la société, le recul de la valeur travail, et la propagation de la corruption » (…).

Bien que le printemps arabe n’ait pas parvenu à assurer la stabilité dans la majorité des pays arabes, l’ancien président considère que « la révolution n’est pas un bouton, et qu’il suffit qu’on appuie dessus, pour que les peuples passent des ténèbres à la lumière, mais c’est un tournant qui change le cours de l’histoire. Il y a eu un tournant dans les esprits et les cœurs, celui de la nécessité de mettre un terme à l’accaparation du pouvoir, de la richesse et de l’estime par une minorité brutale et corrompue ».

« La première bataille a eu lieu, et sera suivie par d’autres batailles, jusqu’à ce que la guerre se termine, comme elle s’est achevée dans d’autres endroits de la terre, avec des réformes radicales dans le régime de distribution des richesses, du pouvoir et de l’estime », a-t-il présagé.

Gnetnews