Tunisie : Un conflit latent à la veille de l’annonce du remaniement

Publié le Mardi 05 Septembre 2017 à 16:13
Youssef Chahed sur le point d'annoncer sa nouvelle équipe. Tout semble prêt pour que le remaniement soit dévoilé dans les prochaines heures. La question aurait été au centre des rencontres au haut sommet de l’Etat intervenues ce mardi à Carthage. D’abord entre les deux têtes de l’exécutif, et ensuite entre le président de la république et le président de l’Assemblée, qui a confirmé la tenue d’une session parlementaire extraordinaire en ce mois de septembre. Celle-ci interrompra les vacances parlementaires pour entre autres buts voter la confiance au gouvernement remanié.

Le remaniement ministériel sera officiellement annoncé demain, mercredi 06 septembre (dixit Sami Tahri, un des caciques de l’UGTT). L’influente organisation syndicale a vendu la mèche ?! Pas tant que ça, les informations selon lesquelles le remaniement sera rendu public au milieu de la semaine, sont aussi concordantes que persistantes.

La centrale syndicale cherche néanmoins à avoir voix chapitre et à prendre l’ascendant sur une classe politique qui ne se soucierait, à ses yeux, que de ses intérêts partisans étriqués. "Les entités politiques entravent tout ce qui est de nature à faire avancer le pays", a déploré ce mardi Bouali Mbarki sur Shems, accusant Nidaa et Ennahdha de "ligoter" Youssef Chahed. Cette semaine est celle de la dernière chance, pour que le remaniement soit annoncé. A défaut, le pays entrera dans un tunnel, dont il lui sera difficile de sortir, prévient-il.

Comme, elle a sauvé le pays en 2013, l’UGTT le sauvera cette fois-ci, si la controverse continue sous quelque forme que ce soit, a-t-il encore lancé, promettant le soutien syndical à Youssef Chahed, pourvu qu’il fasse montre d’audace, entendez par-là, qu’il s’affranchisse de la mainmise des deux principales forces politiques en place.

A quelques heures de l’annonce attendue du nouveau cabinet Chahed, un conflit fait rage, en mode latent, et qui n’aura pas, selon toute vraisemblance, à prendre fin, une fois la parenthèse du remaniement fermée. Les rapports seront tout aussi tendus, au lendemain de la prise de responsabilité de la nouvelle équipe. 

Indépendamment du fait que Nidaa et Ennahdha, deux formations de droite prônant l’économie de marché et la libre-entreprise, soient peu ou très représentées, le gouvernement en devenir aura forcément une orientation libérale, ne serait-ce que par le contrat qui le lie, d’emblée, aux institutions financières internationales, en prime au fonds monétaire international (FMI). Cela sous-tend que sa principale tâche sera de passer à la vitesse supérieure en matière de réformes de structure envisagées, portant sur le financement de l’économie, les caisses sociales, l’administration et les entreprises publiques, ce sur quoi la centrale syndicale veut peser de tout son poids, déterminée qu’elle est à infléchir la politique du gouvernement.

L’UGTT est déjà montée au créneau par la voix de son Secrétaire Général, et de ses lieutenants, pour fustiger les appels récurrents à la privatisation des entreprises publiques. Le syndicat oppose une fin de non-recevoir à tout désengagement de l’Etat de ces entités qu’il considère comme étant des temples du militantisme ouvrier et des fleurons de l’économie nationale. Les partis politiques auront aussi à prendre position sur ces sujets décisifs, a fortiori à l’approche d’une échéance électorale, où ils auront à s'atteler à reconquérir un électorat, de plus en plus détourné de la politique. 

Le nouveau gouvernement n’aura ni temps d’acclimatation, ni période de grâce. Il aura à être au front tout de suite, à s’emparer des épineux dossiers économiques, et à proposer des politiques qui n’auront la chance d’être conduites et mises en exécution, que si elles obtiennent l’aval des acteurs politiques et socio-économiques internes et des bailleurs de fonds étrangers. Son pari est de faire converger les regards vers un même horizon, et une même direction…De là où le sauvetage du pays pourrait être amorcé.

Gnet