Tunisie/AFTURD : 16 jours d'activisme contre les violences faites aux femmes

Publié le Vendredi 23 Novembre 2018 à 14:31
La loi 58 de l’année 2017 criminalise la violence faite aux femmes. Plusieurs associations travaillent d’arrache pieds pour sensibiliser et prévenir contre des agressions dont les retombées sociales et économiques sont très graves. L’AFTURD prépare un programme de 16 journées d’actions contre la violence. Si l’association fait de son mieux, elle regrette le manque de moyens et de réactivité des autorités.

L’Association des Femmes Tunisiennes pour la Recherche sur le Développement (AFTURD) lance, du 25 novembre au 10 décembre 2018, la campagne des 16 jours d’activisme contre les violences faites aux femmes et aux enfants. Cette campagne aura lieu en partenariat avec huit associations relais à Siliana, Jendouba, le Kef et deux quartiers populaires de la capitale, à savoir El Kabbaria et Ettadhamon. Pourquoi ? : « C’est dans ces zones que nous constatons que différents types de violences se produisent. Cela ne veut pas dire que d’autres villes ou quartier sont touchés, mais nous pensons que c’est là où il faut rapidement intervenir », précise la présidente de l’AFTURD, Salwa Kennou Sebbei.

Durant cette campagne, plusieurs activités et workshops sont au programme pour vulgariser, le plus possible, la loi 58 de l’année 2017 qui vise à éliminer la violence faite aux femmes : « Un décret-loi, c’est bien, mais ce n’est pas assez. Il y a un véritable blocage au niveau des mentalités des agresseurs mais aussi des victimes. Plusieurs femmes viennent nous voir, mais quand il faut passer à une autre étape, elles refusent d’aller jusqu’au bout », explique Salwa Kennou.

Les raisons ? Pour la présidente de l’AFTURD, elles sont multiples, mais c’est généralement la peur des représailles ou du scandale qui prive les femmes de leurs droits : « Il est impossible d’obliger la victime à poursuivre son combat contre la violence. Nous tentons de les sensibiliser pour qu’elles portent plainte même quand il s’agit de petites violences. Nous ne baissons pas les bras, mais il y a énormément de travail à faire à ce niveau-là ».

Salwa Kennou souligne ensuite qu’une grande partie des victimes est représentées par les mineures qui sont « exploitées » en tant qu’aides ménagères : « Pourtant, la loi est claire. Il est strictement interdit d’employer des mineurs. Nous regrettons le manque de rigueur sur ce dossier brûlant, surtout que l’écrasante majorité souffre d’agressions sexuelles dont les répercussions socio-économiques sont terriblement lourdes à supporter, tant pour les victimes que pour l’Etat ».

La président de l’AFTURD a ensuite rappelé une statistiques « inquiétante ». En effet, Salwa Kennou affirme qu’environ 55% des cas de violences faites aux femmes ont eu lieu dans un espace public : « Il y a une banalisation dangereuse de ce fléau et en face, il n’y a pas assez de fermeté. De plus plus de 95% des plaintes reçues concernent des victimes qui ont atteint des cas extrêmes et du coup, elles sont plus difficiles à encadrer », a-t-elle regretté.

L’AFTURD héberge et encadre plusieurs femmes victimes. Durant leurs séjours qui peuvent durer entre une semaine et un an, l’objectif est certes de les éloigner du danger mais surtout de les rendre les plus possible autonomes : « Les femmes dépendants sont les plus vulnérables. Nous essayons de leur faire apprendre des métiers pour qu’elles deviennent financièrement autonomes afin de réduire les risques d’agressions.

Parmi les activités, une journée de sensibilisation aura lieu à l’école primaire El Kabbaria 2. Cet événement sera organisé par la GAM (Génération Anti Marginalisation). Son président, Ahmed Sassi se félicite du parcours de cette jeune association et voit très loin : « Nous pensons qu’il faut beaucoup discuter avec les enfants et leurs parents. C’est un travail dont les résultats se verront sur le long terme ».

D’autres associations seront mobilisées durant ces 16 jours :
Sharekna à Ettadhamon.
El Wifak Bargou à Siliana.
Hrayer El Kef, au Kef.
L’ADEJE (Association de Développement et d’Encadrement des Jeunes et de l’Enfance) à Jendouba.
L’AFT (Association Femmes de Tabarka).
S.S