Tunisie : la liberté des braves, mais tout reste à faire

Publié le Dimanche 16 Janvier 2011 à 20:59
Tous les Tunisiens sont fiers d'appartenir à ce peuple et à cette nation.La Tunisie est libre. Son libérateur est, sans conteste, Mohamed Bouazizi, dont le nom sera à jamais gravé dans le marbre, comme le symbole de notre affranchissement collectif. Mohamed Bouazizi s’est consumé par les flammes pour dénoncer l’injustice, ravivant chez ses compères les braises de la révolte. Dans son sillage, des dizaines de Tunisiens sont tombés sous les balles, incarnant un soulèvement salutaire ; celui qui nous offre aujourd’hui la liberté, pour laquelle de nombreuses figures de proue tunisiennes se sont ardemment battues.

Décembre 17 décembre  2010 - 14 janvier 2011, moins d’un mois et tout bascule à une vitesse inouïe. Le régime tombe, Ben Ali part, et le peuple, le héros de liberté, est en liesse. Il aurait suffi que les Tunisiens se réveillent, et secouent la chape de plomb qui les étouffait 23 ans durant, pour qu’il soit mis fin d’une manière spectaculaire à la tyrannie.

Le mérite revient au courage et à la volonté du peuple tunisien qui s’est soulevé, spontanément, comme un seul homme pour dire assez au silence, assez à l’indifférence, assez à l’injustice, assez à la corruption, assez à l’oppression, assez à la misère ; assez à la dictature en somme. Le peuple a mené son combat pour la dignité, et a triomphalement gagné. Le monde entier, regarde émerveillé et admiratif, cette révolte bénie. Celle qui s’est écrite par le sang de nos vaillants martyrs, à qui nous devons notre salut.

Mais, voilà qu’une insécurité rampante est en train de nous gâcher notre victoire, pour nous plonger dans l’angoisse et la peur. C’est le cadeau d’adieu que nous a laissé le régime : feu, terreur, pillage, saccage, et chaos. Un complot diabolique qui impose lucidité et circonspection.

Le pays est en train de vivre au lendemain de cette libération historique une crise sécuritaire doublée d’une crise politique. Comment s’en sortir ? Il faut une unité sans faille. Le peuple l’a montré allègrement, et s’est serré les coudes pour faire face à ces forces maléfiques qui cherchent à semer la terreur et la destruction. Reste aux forces vives de la nation de lui emboîter le pas, de s’unir, et de faire transcender l’intérêt de la nation sur les intérêts étriqués et partisans.

A l’heure qu’il est, l’ambiance qui prévaut sème le doute et la confusion dans les esprits. Depuis le vendredi 14 janvier, il y a une précipitation des événements, sur fond d’ambiguïtés constitutionnelles, avec des voix qui fusent de partout pour revendiquer une participation à la démocratisation du pays, ce qui est tout à fait légitime. De nombreux partis qui ont milité pendant ces dernières décennies dans l’ombre attendaient avec impatience ce moment pour contribuer à la gestion des affaires du pays, et concrétiser leurs idéaux et projets politiques. La Tunisie qui a fonctionné pendant plus de 50 ans avec un système despotique et monolithique se découvre une belle diversité politique et idéologique avec des formations progressiste, socialiste, communiste, islamiste, nationaliste,  etc. Une richesse qui est tout à notre honneur,  mais, peut-on passer en quelques jours, nonobstant la magie des événements, d’une dictature à une démocratie.
L’instauration de la démocratie et du pluralisme est le fruit d’un processus de longue haleine, d’une remise en cause profonde du système en place, miné par les travers et les dysfonctionnements. L’héritage du 7 novembre est lourd et biaisé. Il est intrinsèquement basé sur l’opportunisme, l’arrivisme, le népotisme, le clientélisme et l’hypocrisie. Tout est à revoir, et à repenser, de l’arsenal juridique aux institutions.

Cela sous-tend une remise à plat du système, à travers la moralisation de la vie politique, l’instauration d’institutions fortes et transparentes, de mécanismes indépendants d’arbitrage, d’une justice indépendante, d’une presse libre, etc.

Chacun d’entre nous, a fortiori ceux qui font partie du système ou des forces vives de la nation, doit s’interroger sur le rôle qui était le sien pendant toutes les années passées. N’est-on pas tous responsables, excepté quelques honorables gens, de lâcheté collective. Ne s’est-on pas plié, sans la moindre résistance, aux ordres, n’a-t-on pas privilégié notre petite personne et notre pain quotidien au détriment de l’intérêt général. Oui, nous sommes tous responsables et complices de ces années de plomb, où les fondements d’un Etat libre et juste ont été sapés.

A ce moment historique, certains tentent de confisquer la victoire de cette révolte populaire et cherchent par tous les moyens à en récolter les fruits. Ceux-là mêmes qui fustigeaient hier ce mouvement, qui se sont interposés, des années durant, entre la masse silencieuse et sa volonté d’émancipation. Il s’agit de ces thuriféraires et de ces opportunistes qui ont su toujours profiter du système, et suivre la direction du vent. Que l’on y prenne garde, car, ce sont eux qui ont permis au système de perdurer et d’éclore, en sacrifiant l’intérêt suprême de la nation et du peuple sur l’autel de leur égoïsme exacerbé.

Le peuple tunisien l’a compris, et n’est plus dupe, feu Mohamed Bouazizi et d’autres martyrs l’ont réveillé d’une torpeur qui n’a fait que trop durer. Il n’en a cure des démocrates autoproclamés. Il ne va plus se laisser prendre par les sentiments. Il veut prendre son destin en main et revendique une réelle implication dans la vie politique, à travers une vraie démocratie. L’urgence est donc maintenant de former un gouvernement d’unité nationale qui aura la charge de sécuriser le pays, et de tranquilliser et rasséréner la population. La deuxième priorité est d’assainir le climat général et d’asseoir les fondements d’une vraie transition en vue d’élections libres, démocratiques et indépendantes. Ceci nécessite plusieurs mois et non soixante jours, le temps que les partis d’opposition préparent leurs projets, qu’ils soient connus du public, qu’ils soient prêts à prendre les commandes pour construire l’avenir de la Tunisie et que le peuple puisse choisir ses dirigeants en toute âme et conscience. Non à l’exclusion, et à la marginalisation, mais non aussi à la cacophonie et à l’anarchie qui risquent d’ouvrir la boîte de Pandore. C’est seulement ainsi que l’on aura honoré la mémoire de nos martyrs et de Mohamed Bouazizi.

H.J.
 

 

Commentaires 

 
#8 Libre? Pas encore
Ecrit par Mad Man     17-01-2011 12:35
Bien joué Ben Ali. Il échappe avec 1,5 tonnes d'Or. Le reste du RCD jouent la comédie! Un gouvernement de transition. Ils gardent les ministères clès: l'intérieur et l'étrangère. Cependant le peuple et l'armée jouent à cache à cache avec les bandits. Bientôt, les autres membres du clan RDC s'envolent comme des diplomates. Quand la nouvelle république s'éveille, le pays est dévalisé! Faites circuler.....vite....vite
 
 
#7 television tunisienne
Ecrit par BIBICH     17-01-2011 12:31
Juste une petite remarque concernant la Télévision tunisienne:
- Pourquoi tant de persistance pour semer la peur et la zizanie sur le peuple tunisiens? Pourquoi cette television qui dit avoir changé nous parle que des milices, des coups de feu et du déordre? Pourquoi on organise pas d'émission afin de discuter et trouver des solutions politique sur l'avenir de notre pays ??
 
 
#6 Attention
Ecrit par Abou Jlail     17-01-2011 12:23
Absolument d'accord avec M. Allagui. Le gouvernement français a regardé cette dictature, sans lever le petit doigt pendant 23 ans et n'a cherché que ses intérêts. La proposition de Mme Alliot Marie d'envoyer ses flics pour soutenir notre police, exprime clairement la vision de la France. Mais je vais plus loin.. Tous les gouvernants des pays voisins (pas le peuple), ne souhaitent que l’échec de cette révolte. Ces dictateurs qui nous entourent, vont chercher par tous les moyens (politiques, humains, et financiers) à faire barrage à ce soulèvement du peuple.
La responsabilité du peuple tunisien devant l’histoire est très difficile et un échec de cette révolte, sonnera les glas de la démocratie et la liberté du peuple arabe pour un siècle. Minés à l’intérieur par les anciens privilégiés du pouvoir, et des attaques de l’extérieur, le peuple tunisien doit être sur ses gardes.. On doit tous être vigilants et solidaires. L’avenir du peuple arabe entier dépend de notre réussite.
 
 
#5 La France est trop bonne !!
Ecrit par Baris     17-01-2011 08:05
Elies Elagui crache dans la soupe !! pourquoi tant de haine de la France ?
 
 
#4 RE: Tunisie : la liberté des braves, mais tout reste à faire
Ecrit par Tunisien     16-01-2011 22:29
J'ai peut être mal compris mais si vous sous entendez par "un gouvernement d’unité nationale " un gouvernement imposé au peuple tunisien je ss tout à fait contre!!
Je pense que le peuple est prêt pour la démocratie et que les partis n'ont qu'a s'y préparer!! Par contre, les partis qui souhaitent s'allier pour faciliter le choix des citoyens la OUI, mais ce uniquement pour une courte période afin de laisser du tps à tt les politiciens de s'organiser!!
Par ailleurs, message à tt les journalistes cette fois ci le peuple vous a offert la liberté ne vous laissez plus voler ce droit, il est de votre devoir de nous dire la vérité (tt en vérifiant vos sources)!!!
Vive la TUNISE LIBRE
 
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