La pêche abusive menace les espèces de Ghar el-Meleh |
Publié le Mardi 11 Mai 2010 à 10:02 |
Saules, mulets, daurades, anguilles, autant de poissons peuplent la lagune de Ghar el-Meleh. A cause de la pêche abusive, et prises à l’état d’alevins, ces espèces sont décimées, leur production ne cesse de baisser. L’offre et les prix de poissons s’en ressentent. Il est midi en ce jeudi 06 mai, au port de pêche de Ghar el-Meleh. Sous un ciel gris, un calme morose enveloppe les lieux. Côte-à-côte, de nombreuses embarcations de fortune sont à quai, secouées par une légère brise. Certaines sont vides, d’autres occupées par des pêcheurs silencieux, en train de démêler leurs filets ou d’avaler un sandwich. En face, une grande salle couverte bouillonnait telle une fourmilière, c’est la buvette du port. De nulle part surgissait subitement un homme casqué, d’un geste de la main, il nous faisait signe : "pas de photos, l’administration l’interdit". Il est de l’APIP, Agence des ports et des installations de pêche ; un organisme public chargé de la gestion et de l’exploitation de ce port de pêche. Il nous autorisait, toutefois, avec le sourire de visiter le port, à notre guise. Un peu plus loin de l’APIP, un autre bâtiment en bleu et blanc se dresse. C’est celui de la représentation locale de l’OMMP, office de la Marine marchande et des Ports. Celui qui fait figure du service des mines de la mer, comme l’a bien expliqué un responsable sur les lieux qui a accepté de répondre à nos questions sous le sceau de l’anonymat. "Notre mission consiste à effectuer l’immatriculation des navires, le transfert de propriété, le permis de navigation à l’issue de la visite technique annuelle ou occasionnelle, etc." Vieux de plus de trois décennies, le port de Ghar al-Meleh est entré en exploitation vers le milieu des années 1970, nous confie cet originaire de la région. Il constitue le poumon de cette bourgade côtière du Nord de la Tunisie. Ghar el-Meleh, ancien Porto Farina, tire en effet ses ressources à raison de 60 % des produits de la mer, et 40 des produits agricoles. La terre ferme est tellement rarissime, qu’on cultive quasiment dans l’eau…les parcelles de pommes de terre, produit emblématique de la région, situées sur la plage, sont légion. A en croire les natifs de la région, à Ghar el-Meleh, on est tous pêcheurs ou appartenant à une famille de pêcheurs. Le métier se transmet de génération en génération, de père en fils. Au total, le port de Ghar el-Meleh compte 320 unités de pêche, entre Lamparo et autres embarcations, et quelque 1500 pêcheurs. Il concentre à lui seul l’essentiel de l’activité économique du village. Sur le chemin sinueux qui mène au port, la route est plutôt déserte. Par endroits, des vendeurs proposaient leurs petites piles de fruits et légumes aux rares voitures qui roulaient sagement dans les deux sens, évitant à peine de se frôler. A l’entrée du port, il n’y a pas âme qui vive. Seule la nature luxuriante a droit de cité, dégageant un silence assourdissant et une beauté indicible. Sur le port, l’ambiance s’anime quelque peu, mais reste à l’apaisement. Visiblement méditatifs et soucieux, les pêcheurs, de tout âge, n’ont pas étrangement l’air de cultiver une certaine cohésion, même s’ils sont réputés pour être soudés, une fois prenant le large. La production du port dont une partie est destinée à l’export est essentiellement acheminée vers Bizerte et Tunis, sans compter l’approvisionnement du marché de gros local. Le port de pêche de Ghar el-Meleh totalise 180 sorties par an. Il aurait pu en compter plus, n’eût été le mauvais temps, handicap majeur pour les sorties en mer, souligne notre interlocuteur en déplorant les abus dont est victime la riche lagune de l’ex Porto Farina. La production a significativement baissé au cours de ces dernières années à cause de la pêche anarchique, voire abusive. "La lagune de Ghar el-Meleh est très riche en espèces marines. Outre l’anguille noire, cette espèce migratrice qui se déplace entre novembre et mi-janvier, il y a l’anguille verte, une espèce résidente. Pour pêcher l’anguille, les pêcheurs utilisent des madragues fixées à longueur d’année au bord du lac. Or, ce procédé de pêche est très préjudiciable à la faune, et contribue scandaleusement à la diminution des espèces marines qui vivent dans le lac." Et de poursuivre : "Avec cette technique de madrague, les pêcheurs attrapent dans leurs filets notamment entre la mi-février et mars des alevins de daurades, de seiches, de loups et d’autres espèces. C’est ce qui a provoqué une baisse notable de ces espèces nobles au cours de ces dernières années". Notre interlocuteur ne comprend pas que le commissariat régional ferme l’œil sur ces abus. Et les pêcheurs ? Pour lui, ce sont eux les principaux fautifs. "90% d’entre eux sont paresseux, ils ne veulent pas travailler, et préfèrent installer ces madragues en permanence, que de sortir en mer pendant les périodes les plus propices à la pêche". Il évoque "de véritables massacres. Avec des espèces décimées, étant pêchées d’à peine un centimètre ; il en faut une centaine pour constituer un kilo". Les espèces qui emplissent le milieu marin de Ghar el-Meleh sont nombreuses et variées. Excepté celles citées ci-dessus, on trouve saules, mulets, rougets, marbrés, daurades, aiguilles…des produits qui ont vu leur offre diminuer sur les étals des poissonniers, ce qui se répercute sur la production nationale de poissons qui a reculé de 9 % en 2009 par rapport à 2008, et explique flambée des prix. La pêche abusive en est certainement l’une des causes…il faut sévir. Les pêcheurs de Ghar el-Meleh, eux, s’en défendent, et légitiment "leur stratégie de pêche" par le caractère aléatoire du métier. D’aucuns ne manquent pas, néanmoins, de changer de sujet en s’accrochant encore à cette promesse d’un village résidentiel sur le port. "Même si l’idée a été abandonnée dès les années 1990, voire enterrée", nous assure-t-on. Entretemps, que d’eau a coulé sous les ponts. La région, et son milieu lagunaire ont connu un phénomène naturel qui a perturbé la sortie de poissons. Il s’agit de l’ensablement du côté Est et de l’arrachement du côté Ouest, le chenal, voire le circuit naturel de la lagune a été déplacé. Là aussi, il faut un remède…et tout le monde appelle de ses vœux pour qu’il soit mis en œuvre. En attendant, le port de Ghar el- Meleh fonctionne sans répit douze mois l’an, les pêcheurs également. Le seul empêchement qui peut les maintenir à quai, a trait aux bouleversements climatiques réels ou soupçonnés…Tous attendent avec impatience l’été, où l’activité atteint son apogée, et où les uns et les autres auront forcément la pêche. H.J.
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Commentaires
Ecrit par zemnimpech 12-06-2016 18:28
Comme le cas de Ghar el Melh,le fléau de la pêche abusive frappe Kélibia de plein fouet, en effet, le coin qui demeure, en tout temps, le paradis des pêcheurs est aujourd'hui loin de l'être et il est urgent de prendre les choses en main et de trouver une solution radicale au problème qui risque de s'aggraver, et afin de pallier aux heurts entre les pêcheurs hostiles à la pêche anarchiques et ceux qui la pratiquent, en particulier les tendeurs de filets qui jours et nuits sillonnent , sans trêve aucune, ne laissant pas un coin... Ces pêcheurs venus de nulle parts occupent nos côtes avec un armada de filets qu'ils jettent cà-et-là, partout ou ils en trouvent l'occasion. Voyez comment ils procèdent, ils guettent les petits pêcheurs à l'hameçon et une fois quittés, ils occupent leurs place et deviennent presque immobiles et qu'ils ne relèvent que pour retirer les poissons et remettent juste après, de cette façon, ils encerclent les lieux les plus rocheux de pente de poissons, ce qui engendre la désertification... Cette opération a eu un effet dévastateur sur les poissons des côtes et ceux saisonniers qu'on ne voit plus ces derniers temps... Face à ce fléau, les petits pêcheurs demeurent impuissants que ce soit du point de vu revenus, que du risque qu'ils courent en contact de ces envahisseurs. Dernièrement, deux accidents ont eu lieu, l'un entre une embarcation de filets et un certain Hassen qui a coulé sur place(enquête en cours) et l'autre avec Sami Jabloun qui a regagné le port non sans dégâts (enquête en cours)... Je pense qu'il est temps de traiter le sujet avec clairvoyance, si les autorités sécuritaires veulent éviter des problèmes imminents.....
Ecrit par babailzio 13-05-2010 21:30
Non a la pèche " Bil KARJKARA"
Ecrit par khammous 13-05-2010 01:20
Ceux qui p^chent des poissons °° bébés°° ainsi que ceux qui égorgent des veaux d'à peine quelques mois sont des criminels ; et ceux qui sont censés les contrôiler sont complices par ommission.
Mrs les ministres concernés vous serez bien avisés de faire le ménage sur ce plan.
Ecrit par haykel 12-05-2010 23:18
quand on sait que nous avons mille trois cent km de cote et qu' on a plus de poissons alors la c'est tres grave
je pense que même les poissons partent pour l'europe du moins les poissons n'ont pas besoin de bruler ou d'un visa
Ecrit par momo 12-05-2010 15:46