Tunisie, les gestes symboliques du pouvoir |
Publié le Lundi 25 Mai 2009 à 11:30 |
![]() A en croire le journal Assabah dans son édition d’hier (dimanche), le pouvoir multiplie les gestes de bonne volonté à l’endroit de l’opposition progressiste, dite radicale. Entre le non-lieu dans l’affaire du procès intenté par cinq usines d’huile en bouteille contre al-Mawkef , journal du Parti démocratique progressiste (PDP), la décision de mettre le complexe culturel et sportif d’El Menzah VI à la disposition du Forum démocratique pour le travail et les libertés (FDTL) pour la tenue de son prochain congrès à la fin de ce mois, la promesse faite par le ministre des Technologies de la communication pour régler les perturbations de la connexion Internet du parti Ettajdid, la volonté affichée de régulariser la situation des prisonniers du bassin minier de Gafsa et de clore définitivement ce dossier …autant de signes qui attestent de la volonté du pouvoir de mettre fin aux tensions qui ont toujours marqué ses rapports avec l’opposition dite radicale, et avec certaines organisations de la société civile. Abstraction faite de la portée d’une telle démarche, de son caractère tacticien et temporel, ou plutôt stratégique et durable, ces mesures ne peuvent être que les bienvenues au regard de la rupture qui n’a que trop duré et qui a plongé le paysage politique et le débat public dans un cercle vicieux où les uns et les autres se tournent le dos, se jettent les accusations, entretenant des rapports vindicatifs, et pour le moins contreproductifs. Des pas de ce type, s’ils venaient à se confirmer, contribueraient à débloquer un processus démocratique et pluraliste, qui est resté longtemps l’otage des traditions politiques ancrées en Tunisie, privilégiant le monolithisme au pluralisme, la parole à sens unique au débat contradictoire, le consensus inconditionnel à la différence, facteur d’enrichissement. On dit toujours, qu’il y a un début à tout. Le fait que les prochaines échéances électorales servent de déclic pour amorcer une redynamisation de la vie politique, ne doit pas être interprété comme des calculs politiciens, voués à s’évaporer, sitôt le scrutin fini. Un tel raisonnement ne fera que maintenir le statu quo, et entretenir les suspicions de part et d’autre. L’édifice démocratique se construit pierre par pierre. L’histoire nous apprend que le cheminement des pays vers la démocratie n’était jamais une sinécure. La démocratie est toujours le fruit d’une bataille pour la défense de principes et valeurs, d’une persévérance tenace, et d’un volontarisme collectif. Si la Tunisie accuse un retard politique des plus anachroniques, ce n’est pas uniquement la faute au pouvoir, ni encore celle de l’opposition dans ses variantes, ou des organisations de la société civile. Il s’agit plutôt d’une faute commune qui a donné lieu à une crispation générale, qui a fait que chacun se complaise dans son rôle. Entre la fermeté du pouvoir face « aux écarts », les critiques de l’opposition radicale et sa démarche revendicative inlassable, l’opposition parlementaire a choisi d’emblée son camp, sans pour autant contribuer en quoi que ce soit à faire avancer les choses. Tout cela pour insister sur l’impératif que ces signes de bonne volonté soient utilisés à bon escient. Au pouvoir de continuer à desserrer l’étau autour de l’opposition de manière à lui permettre de faire parvenir sa voix à la masse populaire. Aux partis d’opposition de passer de la logique de critique à la logique de proposition, de jouer leur véritable rôle de contrepoids et de concevoir un projet de société clair et viable, au service des intérêts suprêmes de la nation. A l’élite de sortir de sa passivité, de descendre de son piédestal et de contribuer à réanimer le débat public, en jouant son rôle d’éclaireur de l’opinion. Le Tunisien est en droit d’attendre à ce que les prochaines élections soient précédées par un vrai débat d’idées, avec des opinions qui s’échangent, des projets qui se confrontent lors de campagnes électorales menées dans la transparence, selon des règles égalitaires pour tous les candidats. Le cas échéant, il saura choisir en connaissance de cause. H.J. |
Commentaires
Ecrit par Mohamed 29-05-2009 14:52
Ces pseuod-députés ne peuvent rien apporter à la vie parlementaire. Ils se font payer pour colorer la chambre mais leur couleur est fade.
Où est la vraie opposition, celle qui peut défendre la séparation des pouvoir, la liberté d\'expression, les droits de l\'homme,et l\'alternance...
C\'est en posant les vrais problèmes, et en créant un débat réel et vrai au sein du parlement et en mettant le pays sur la voie démocratique qu\'on épargner au pays les soubresauts ...
Ecrit par faycal 29-05-2009 12:10
Le pouvoir ne doit pas être monoploisé...
Ecrit par Naïf 27-05-2009 22:21
Et de façon incompréhensible, aucun pays au monde ne semble mener cette réflexion, comme si ce système était l'apogée de ce que l'on peut faire de mieux ! Comme si dorénavant il ne fallait plus se poser de question ! N'ayons pas de complexe ! Avec tout les retours d'expérience depuis 200 ans, je pense que l'on doit pouvoir faire sans difficulté mieux que les hommes du soi-disant siècle des Lumières. Or tous les semblants de réflexion sur la démocratie sont fait depuis dans ce cadre. D'ailleurs il est révélateur de constater que l'on parle de "réfléchir sur la démocratie" et non sur "la gouvernance", comme si on partait déjà du principe que dans la démocratie se trouve la solution...
Ecrit par Normal 27-05-2009 17:34
Ecrit par Naïf 27-05-2009 15:26
Le véritable danger est d’avoir fini par associé le système démocratique à une valeur universelle comme le Bien et le Mal, à tel point que juste oser dire que l’on pourrait réfléchir à autre chose est devenu un crime ! N’oublions pas qu’il y seulement un siècle ou 2 nous n’avions jamais parlé de démocratie et que je ne pense pas que l’on puisse affirmer que les peuples qui ont vécus avant ces 200 ans étaient tous des sauvages et des barbares. Alors la démocratie n’est certainement pas synonyme d’une valeur universelle du Bien. Ce n’est qu’un système de gouvernance et il serait peut-être temps de le remettre en cause afin de pouvoir le faire évoluer sans idées préconçues. Oui, un peu d’autoritarisme permet parfois de faire avancer des dossiers critiques pour le pays. L’excès de démocratie est un leur : pour preuve la situation actuelle de la Californie qui a poussé la logique démocratique jusqu’à son terme : la démocratie directe. Mais aujourd’hui cet état est au bord du gouffre car le peuple ne veut ni hausse d’impôt ni baisse des aides sociales et le processus budgétaire est donc à l’arrêt, figé par les incompétences d’un peuple qui ne pourra jamais se gouverner lui-même par un processus purement quantitatif : le vote !
Alors oui, il y a vraiment de quoi réfléchir pour faire mieux et démocratie n’est pas nécessairement synonyme de respect de l’autre, bien au contraire. Si les conducteurs tunisiens font n’importe quoi, c’est parce qu’ils n’ont plus du tout peur de la police, ce qui est totalement logique dans une vrai démocratie…