Une Grève générale de la santé publique le 15 juillet « pour prévenir le départ des médecins à l’étranger »

08-07-2020

Le syndicat national des médecins, médecins dentistes et pharmaciens hospitalo-universitaires a présenté ce mercredi 08 Juillet, lors d’une conférence de presse au siège de l’UGTT, les raisons ayant poussé le secteur de la santé publique à observer une grève générale sectorielle totale le 15 juillet 2020.

Surendettement des hôpitaux, crise de gouvernance et de capital humain

Le syndicat a d’abord souligné la détérioration des conditions de travail à l’hôpital public, pourtant le droit à la santé est stipulé dans l’article 38 de la constitution. « L’Etat garantit la gratuité des soins pour les personnes sans soutien et à faible revenu. Il garantit le droit à une couverture sociale, tel que prévu par la loi. »

Pourtant, l’hôpital public vit une crise grave depuis plusieurs années, l’empêchant de répondre aux exigences constitutionnelles. La crise est financière, de gouvernance et de capital humain.

« Rappelons que près de 80% de la population tunisienne fréquente l’hôpital public alors que la CNAM ne lui réserve que 20% du budget des soins. Le remboursement  se fait selon des forfaits qui n’ont pas été révisés depuis 1996. L’hôpital reçoit les 8 à 10% des citoyens qui n’ont aucune couverture sociale et les 24% des patients avec les cartes « Tarifs réduits et gratuité des soins ». La contribution des ménages pour les dépenses de santé atteint près de 40%. 

Un quotidien difficile pour les médecins et les patients

Les conditions de travail deviennent intolérables et rendent le quotidien des Hospitalo-universitaires et de tous les professionnels de la santé très difficiles avec le manque des équipements et du matériel le plus élémentaire, a souligné le syndicat. Ainsi que, la relation avec les malades est fréquemment tendue avec les incompréhensions qui suscitent souvent de la violence. « La loi sur les droits du malade et la responsabilité médicale qui pourrait améliorer cette relation est toujours dans les casiers de l’ARP ».

S’y ajoute, la détérioration de la plateforme technique, le manque de matériel de pointe et la libéralisation des achats des équipements lourds qui menacent les centres hospitalo-universitaires dans leur rôle de référence pour la formation et la recherche.

« La réforme de la santé dont on parle depuis des années tarde à venir malgré les promesses, le dialogue sociétal, les assises de la santé, les rapports, les engagements… En effet, la crise du Covid-19 qui a montré une autre fois la centralité de l’hôpital public dans les périodes difficiles ».

Prévenir le départ des médecins vers l’Europe et le continent américain

Dr. Ahlem Belhadj, secrétaire générale du syndicat a d’autre part expliqué que cette grève vise à prévenir le départ des médecins à l’étranger.

« Depuis quelques années nous notons un grand départ des jeunes fraichement diplômes vers l’Europe et le continent américain, outre le départ des séniors en coopération dans les pays du golfe et en Europe.

L’hôpital public est notamment pour certaines spécialités (radiologie, anesthésie, réanimation..) et dans les régions d’intérieur, est déserté par les médecins et n’arrive plus ni à les recruter ni à les retenir. Les jeunes ne veulent plus intégrer le secteur public pour plusieurs raisons notamment les conditions de travail et l’importance du hiatus avec le secteur privé avec une médecine à deux vitesses…

Projet de privatisation de l’enseignement des études médicales

Le projet d’amendement de la loi 19-2008 portant sur l’enseignement supérieur et introduisant un nouveau type de faculté privée notamment des facultés de médecine et de pharmacie porte atteinte à un acquis national qui est la qualité de la médecine tunisienne et ouvre la voie à un risque grave de voir le système de santé se détériorer.

La secrétaire générale du syndicat a également rappelé que les urgences des hôpitaux seront ouvertes durant le 15 juillet, le jour de la grève générale des médecins publics, afin de ne pas entraver les services de santé dédiés au public.

Gnetnews