CONECT/Réforme des chèques sans provision: Allégement des sanctions et nouveaux défis pour les entreprises

28-08-2024

Le syndicat patronal CONECT Tunisie a organisé ce mercredi 28 août une conférence de presse pour détailler les nouvelles dispositions de la révision de l’article 411 du Code de commerce, relatifs à l’émission des chèques sans provision. Ce projet de loi, désormais adopté, vise à alléger les sanctions pénales et financières associées à l’émission de chèques sans provision, tout en introduisant des réformes significatives dans le système de paiement par chèque.

Allégement des sanctions et dépénalisation partielle

Le nouveau texte de loi prévoit une réduction des peines de prison pour les chèques sans provision, passant de cinq à deux ans, avec une pénalité réduite à 20 % du montant du chèque, contre 40 % auparavant. Il dépénalise totalement les chèques d’une valeur inférieure à 5 000 dinars, tandis que les chèques supérieurs à cette somme restent pénalisables, bien que les peines soient allégées. De plus, le cumul des peines est aboli, ce qui signifie que l’émission de plusieurs chèques sans provision ne conduira plus à une multiplication des peines.

Une révolution numérique : La création d’une plateforme pour les transactions par chèque

L’une des innovations majeures introduites par cette réforme est la mise en place d’une plateforme numérique, pilotée par la Banque Centrale, qui permettra de vérifier instantanément la disponibilité des fonds via un QR code. Cette mesure vise à prévenir l’émission de chèques sans provision en donnant aux bénéficiaires la possibilité de s’assurer de la solvabilité de l’émetteur avant l’encaissement.

Criminalisation des chèques de garantie

La révision de la loi inclut également la criminalisation de l’usage des chèques de garantie, une pratique courante dans certaines entreprises, notamment les PME. Les contrevenants risquent désormais une peine de deux ans de prison. Cette mesure, bien qu’elle ait pour objectif de redonner au chèque sa fonction initiale de moyen de paiement, soulève des inquiétudes chez les professionnels qui utilisent ce procédé pour faciliter l’accès au crédit à certains ménages.

Médiation avant procédures pénales

Le projet de loi introduit un mécanisme de médiation, permettant de résoudre les litiges avant de recourir à des procédures judiciaires. Les poursuites ne pourront plus être déclenchées automatiquement, elles devront être initiées par le bénéficiaire du chèque. En outre, les banques émettrices seront désormais tenues responsables aux côtés de leurs clients en cas de défaut de provision.

Impact sur les affaires judiciaires en cours

D’après les chiffres fournis par le ministère de la Justice, environ 12 000 affaires de chèques sans provision sont actuellement en cours d’examen devant les tribunaux, avec 580 personnes incarcérées. La nouvelle loi, qui sera appliquée de manière rétroactive, permettra aux détenus qui honorent leurs engagements financiers de bénéficier d’une suspension de peine, facilitant ainsi leur libération. Ils devront pour cela régler 10% de la somme due et d’étaler, le cas échéant, le reste de leurs créances sur le une période de trois ans maxiumum.

Réactions et débats

Lors de la conférence, plusieurs intervenants ont exprimé leurs réserves sur certaines dispositions de la nouvelle loi. Hosn El Oujoud Ben Mustapha, vice-présidente de la CONECT Tunisie, a soulevé des inquiétudes concernant l’impact potentiel de l’interdiction des chèques de garantie sur les petites et moyennes entreprises. Pour sa part, Mohamed Ennkhili, président du comité juridique du Conseil Bancaire et Financier, a salué la réforme qui redonne au chèque son véritable rôle, tout en avertissant que certaines pratiques devront être réajustées.

Cette réforme, bien qu’incomplète selon certains observateurs, marque un tournant significatif dans le cadre législatif entourant l’émission de chèques en Tunisie, avec l’ambition de moderniser le système et de réduire la pression pénale sur les émetteurs de chèques sans provision.

Gnetnews