Le Syndicat National des Journalistes Tunisiens appelle à abroger ou réviser d’urgence le décret 54

23-01-2025

Le Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT) renouvelle son appel à l’abrogation ou à la révision urgente du décret n°54 relatif à la lutte contre les crimes liés aux systèmes d’information et de communication, dénonçant ses impacts négatifs sur les libertés individuelles et la profession journalistique.

Cette prise de position intervient après qu’un groupe de 60 députés à l’Assemblée des représentants du peuple a déposé, le mercredi 22 janvier, une nouvelle requête auprès du président du Parlement, Ibrahim Bouderbala, pour accélérer l’examen du projet de révision du décret 54. Cette démarche fait suite à un dépôt initial datant du 20 février 2024, ainsi qu’à une pétition signée par 57 députés en mai de la même année.

Dans son communiqué, le SNJT salue l’engagement des députés, notamment les présidents de blocs parlementaires, les chefs de commissions et les membres du bureau de l’Assemblée, pour leur persévérance à défendre leur droit légitime de légiférer en conformité avec la Constitution et dans le respect des droits et libertés. Le Syndicat appelle également le président du Parlement à faire preuve de sagesse et de rationalité dans le traitement de ce projet, qui reste bloqué au sein du bureau parlementaire depuis près d’un an, causant d’importants préjudices à des centaines de personnes poursuivies en vertu de ce décret.

Les griefs du SNJT contre le décret 54

Le SNJT réitère son opposition au décret 54 pour plusieurs raisons fondamentales :

Incompatibilité avec la Constitution :
Le décret viole l’article 55 de la Constitution, qui interdit toute censure préalable, en autorisant des pratiques telles que l’écoute téléphonique aléatoire des citoyens. De plus, les sanctions prévues manquent de proportionnalité et contredisent le principe selon lequel toute restriction des libertés doit être justifiée par la nécessité et ne pas porter atteinte à l’essence même de ces libertés.

Sanctions disproportionnées :
Le décret prévoit des peines de prison pouvant aller jusqu’à dix ans pour des infractions liées à la publication, une mesure jugée excessive pour des délits relevant principalement de la liberté d’expression et de la communication.

Atteinte à la liberté de la presse :
Le décret empiète sur le champ d’application du décret 115, qui régit le secteur de la presse, en permettant à l’exécutif d’éluder les textes de loi spécifiques à la profession. Cette intrusion favorise une criminalisation abusive des journalistes, notamment à travers une confusion volontaire entre les crimes liés aux systèmes d’information et les publications jugées « fausses ».

Menace pour les droits fondamentaux :
En instaurant un cadre législatif répressif, le décret compromet les libertés d’expression et de publication, exposant les citoyens à des poursuites judiciaires arbitraires. Cette situation va à l’encontre des fondements d’un État démocratique et civil tels que stipulés dans la Constitution.

Le SNJT souligne que cette dérive législative s’inscrit dans une volonté plus large de restreindre les droits et libertés en Tunisie, faisant peser un climat de peur sur les citoyens et les professionnels des médias.

Face à ces préoccupations, le Syndicat appelle une nouvelle fois à l’abrogation immédiate du décret 54 ou à sa révision en profondeur, pour garantir le respect des droits constitutionnels et des engagements internationaux de la Tunisie en matière de libertés.

Gnetnews