La Tunisie perdra quatre points de croissance à cause de la pandémie du Coronavirus (Ben Hammouda)

16-04-2020

En cas de levée du confinement à la date du 1er mai 2020, l’économie tunisienne va enregistrer un recul de -4% de croissance, et le chômage connaîtra une forte augmentation, a affirmé l’ancien ministre de l’Economie et des Finances, Hakim Ben Hammouda. Quelques 150 000 chômeurs supplémentaires vont apparaitre à part les 650 000 sans emplois qui existent déjà. Avec ces facteurs liés au contexte pandémique, la Tunisie aura besoin de 12 milliards de dinars pour relancer son économie, en dépit des ressources mobilisés déjà par l’Etat… ».

Intervenu lors du débat « café politique : comment doit-on se préparer pour l’après Covid-19 », organisé par Friedrich-Ebert-Stiftung Tunisie, l’économiste a estimé que  « les séquelles du confinement sur l’économie tunisienne, sera le double de l’impact de la révolution 2011. Ça sera la pire conjoncture économique vécue par la Tunisie depuis l’Indépendance. Les inégalités sociales se creuseront de plus en plus, et le nombre des personnes appauvries et dans le besoin  va s’amplifier en 2020 », ajoute-t-il.

Ce contexte sanitaire pose le défi de la mise en place d’alternatives politiques exceptionnelles pour réactiver l’économie après le déconfinement.

L’ancien ministre a, par ailleurs, évoqué l’importance de la renégociation des dettes de la Tunisie envers le FMI. Il a recommandé un reprofilage des dettes ou encore la demande de son annulation auprès des bailleurs de fonds.

Absence de visibilité

Abderrahman Ellagha, expert en économie et professeur à l’université de Tunis, a appelé le gouvernement, l’UTICA, et l’UGTT à rassurer le secteur privé en ce qui concerne les salaires des mois de mai et juin, à travers des discours synchronisés pour limiter l’incertitude chez les salariés.

« C’est une responsabilité partagée et le peuple doit en être conscient», explique-t-il.

Selon lui,  le gouvernement doit porter à un message politique clair et expliquer aux employés si d’autres ressources seront mobilisées pour leur garantir leurs revenus dans les mois prochains. « L’Etat est appelé aussi à calibrer les interventions et les aides, selon le degré de gravité de la situation », recommande-t-il.

 L’expert a indiqué aussi  qu’une chose est certaine, c’est que la situation économique va s’aggraver, car cette crise existait bien avant la pandémie du Covid-19. Le problème c’est qu’actuellement les chercheurs n’ont pas les outils nécessaires pour cerner les répercussions globales, en revanche « nous avons des outils  de mesure de choc marginaux, qui déterminent l’impact par secteur uniquement ».

Par ailleurs, Pr. Allagha a parlé d’une absence de visibilité par rapport  à l’avenir économique du pays.

Selon lui, le perpétuel changement de la situation ne permet pas de cerner les répercussions exactes du confinement sanitaire.

« Ce qui est certain c’est que le prix des matières premières et des produits alimentaires de base va augmenter. Il est prévu aussi que l’inflation se répercutera sur le prix des actions en bourse et la conjoncture va s’approfondir ».

Le problème c’est qu’on ne sait pas quand est ce que cette crise sanitaire va prendre fin pour calculer les dégâts exactes engendrés. Il faut donc se concentrer sur la gestion de la crise, mettre en place une confiance entre l’Etat et les citoyens pour réussir la stratégie nationale de lutte contre le coronavirus, et puis il faut surtout insister sur l’unité nationale pour sauver le pays en post-pandémie.

Par ailleurs, « l’effondrement de l’économie du pays n’est pas dans l’intérêt de l’Europe, car ceci implique un retour ambiant de l’immigration clandestine qui atteindra son apogée, si la crise économique s’accentue en Afrique en général », a conclu Abderrahman Allagha, président de l’association des économistes tunisiens (ASECTU).

Emna Bhira