Tabac, phobies, dépression: L’hypnose un remède de plus en plus tendance

26-03-2021

L’hypnose thérapeutique a le pouvoir de libérer de l’addiction au tabac, du stress, de l’anxiété, de la dépression et de la timidité maladive…Elle peut soigner aussi les phobies, soulager les troubles du sommeil, renforcer la confiance en soi et débloquer certains obstacles psychologiques qui entravent  l’épanouissement personnel…Pourtant en Tunisie, cette médecine douce ayant tant de bienfaits, ne semble pas trop convaincre. Parce que mal connue, l’hypnose souffre encore de préjugés et d’incompréhension.

Pour en savoir plus, et afin de démystifier les idées reçues sur cette discipline, Gnetnews est allé à la rencontre du Docteur Leila Bouhamed Karray,  hypnothérapeute diplômée de la Faculté de médecine de Tunis, et spécialiste en acupuncture.

En expliquant cette discipline de la médecine douce, Dr. Bouhamed Karray a souligné que l’hypnose ressemble plutôt à un état de « rêverie » qui nous arrive de manière naturelle au quotidien. La plupart de nous atteint cet état  au moment du réveil ou quelque temps avant le sommeil, ou lorsqu’on passe par un moment d’immersion grâce aux images qui défilent sur l’écran de la télé, téléphone…

 « Dans ces moments, nous nous « perdons » dans nos pensées et ignorons ce qui se passe autour de nous », explique-t-elle. La seule différence c’est que durant l’hypnose médicale, le thérapeute guide son patient vers cet état à la fois concentré et relaxé, dans lequel le subconscient, qui est le moteur principal de nos actes devient très présent et actif, et l’activité consciente du cerveau se met en retrait ».

« Plusieurs patients ont ainsi peur de perdre le contrôle sur leurs pensées et de dévoiler leurs secrets inconsciemment durant cet état de « veille », d’où la réticence de cette méthode thérapeutique perçue avec beaucoup de scepticisme dans le monde entier », indique la thérapeute.

Docteur Bouhamed Karray nous a précisé également que cette fausse idée reçue est la plus fréquente. C’est pour cela que « les patients doivent savoir que, malgré l’état de relaxation profonde, appelé « état de conscience modifié », qu’ils atteindront durant l’hypnose, ils seront conscients en permanence de leurs interactions avec le thérapeute ».

En revanche, le patient sera particulièrement ouvert aux suggestions de l’hypnotiseur, car le subconscient est beaucoup plus réceptif et ouvert aux idées proposées. Ainsi, le thérapeute pourra induire directement et efficacement de nouveaux schémas de pensées, qui vont influencer les ressentis et les actions des individus, afin de les aider à se débarrasser des comportements nocifs, et les remplacer par un raisonnement plus positif.

 «Une fois le patient dans un état de transe hypnotique, le médecin fait ses suggestions que ce soit pour traiter un sevrage tabagique, l’estime de soi, l’anxiété, les phobies,etc ….Cette méthode est appelée aussi « l’hypnose Ericksonienne » basée sur les suggestions », nous dévoile-t-elle. 

Quant au nombre de séances pour atteindre les objectifs souhaités, Dr. Leila Bouhamed Karray nous a indiqué qu’une seule séance ne suffit pas dans la plupart des cas.

« Le conscient prend souvent le dessus sur le patient, à cause des idées mal fondées qui rejaillissent, ou encore à cause des souvenirs qui refont surface pour le replonger dans le cercle vicieux des pensées négatives, et l’empêcher de surmonter les obstacles. L’hypnose dans ce cas va  « dépoussiérer » à  maintes reprises le subconscient dans le but de changer sa vision biaisée sur la vie, ce qui prendra plusieurs séances… Cette pratique consiste à débarrasser le patient du lourd poids de ses pensées négatives, résultant d’un traumatisme ou d’un vécu mal perçu… Elle vise également à vaincre les difficultés dues aux anticipations négatives ou dévalorisantes, à l’origine du discours intérieur négatif et inhibiteur. »

 Les séances d’hypnothérapie durent entre 45 minutes et 90 minutes. Elles doivent être espacées dans le temps par 15 jours, afin que le patient puisse intégrer lui-même le nouveau schéma de pensées positives volontairement, nous informe le médecin.

Nous avons interrogé Docteur Leila Bouhamed Karray sur les profils de patients les plus fréquents qui viennent consulter. Elle nous a dévoilés que la majorité viennent pour un sevrage tabagique. D’autres consultent avant de prononcer un discours en public, ou en période d’examen pour atténuer le stress. Les personnes dépressives viennent aussi pour soulager un état de tristesse et changer leur vision mélancolique de la vie. 

« En revanche, l’hypnose est déconseillée dans les cas des personnes atteintes de troubles psychiatriques, comme la schizophrénie ou la bipolarité… Ces patients ont plus besoin d’un traitement à base de médicament, l’hypnose est inutile dans leurs situations. »

La thérapeute nous a confirmé aussi que l’intérêt pour l’hypnose en Tunisie a augmenté notamment avec l’apparition de la pandémie du Covid-19. « L’affluence des patients a augmenté avec le stress permanent qu’on subit tous les jours,  engendrant également la consommation frénétique du tabac…Cette ambiance anxiogène a mis la population dans un état de pression qui fait ressurgir les traumatismes refoulés. C’est pour cela, que de plus en plus de personnes cherchent d’autres alternatives que les médicaments, pour soulager leur mal-être… ».

Cependant, il n’y a pas que les médecins qui pratiquent l’hypnose. Cette discipline est aussi exercée par les maitres praticiens spécialisés dans la Programmation-Neuro-Linguistique (PNL), qui utilisent d’autres  méthodes et outils de développement personnel, ayant la même intention.

A cet effet, nous avons contacté Chiraz Ben Ayed, maitre praticien PNL et hypnothérapeute, diplômée de l’Ecole de formation professionnelle en hypnose du Québec en Tunisie (EFPHQ-Tunisie).

Selon elle, les coaches utilisent ce qu’on appelle la Programmation-Neuro-Linguistique (PNL) qui se base sur des outils spécifiques ayant pour objectif de cerner le problème à traiter avec l’interlocuteur. Ces outils « d’induction » se présentent sous la forme de questions pointues à poser, ayant pour objectif de repérer les obstacles psychologiques dont souffre le patient, dans le but de les éliminer.

« Grace à cette méthode, celui qui consulte sera capable d’entrer en contact avec la partie sombre de lui-même responsable de l’obstacle, pour qu’il puisse la confronter et la traiter volontairement. Avec l’hypnose, c’est-à-dire l’état de « conscience modifié », l’hypnothérapeute accédera aux apprentissages qui ont créé ce blocage, pour l’améliorer ».

Chiraz Ben Ayed a aussi rappelé que l’hypnose du spectacle est différente que celle pratiquée en cabinet.

« Il faut donc être vigilant pour ne pas tomber sur « des charlatans » qui proposent des pratiques médicales frauduleuses et des remèdes illusoires…Cette coach de vie, recommande de bien s’informer sur les diplômes du thérapeute et de vérifier méticuleusement avant de franchir le pas.

Il faut savoir aussi qu’il n’existe pas des personnes hypnotisables et d’autres non hypnotisables, commente-t-elle. « Tout dépend de l’état d’esprit et de la permissivité du client, qui va se laisser aider ou bloquer la thérapie. Il faut donc être prêt psychologiquement, et surtout choisir de son propre gré cette méthode de guérison », recommande Chiraz Ben Ayed.

Emna Bhira