Tunisie/ Législatives : « Le tribunal administratif travaillera dans un climat électoral difficile » (UMA)

27-10-2022

L’Union des Magistrats administratifs (UMA) a organisé une conférence, ce jeudi 29 octobre à Tunis, sur le contentieux électoral lié aux élections législatives, devant le Tribunal administratif.

La présidente de l’UMA, Refka Mbarek, a déclaré à Gnetnews qu’il s’agit d’une sorte de formation pour les magistrats puisque le tribunal administratif dispose désormais de toutes les compétences pour gérer les litiges, alors qu’ils étaient auparavant partagés avec le tribunal judiciaire.

Le juge Adel Ben Hamouda a déclaré, pour sa part, que le contentieux électoral est cyclique puisqu’il n’intervient que lors des échéances électorales ; le rôle du Tribunal administratif est éminemment important puisqu’il dispose d’une analyse différente de celle du tribunal judiciaire sur les litiges. « Le travail du tribunal administratif sera réalisé dans un climat électoral difficile. Il y a eu beaucoup de changements dans la loi électorale et nous avons très peu de temps devant nous pour les étudier », a-t-il affirmé.

Une position partagée par Mme Mbarki. « Notre principal problème ce sont les délais qui sont très courts. Nous n’avons pas le temps de prendre des mesures d’instruction afin d’instruire pleinement les dossiers. C’est le cas par exemple pour les parrainages », a-t-elle noté.

Cette conférence a eu également pour but de pointer les lacunes du décret-loi 55 qui régit la nouvelle loi électorale.

Dans ce sens la présidente de l’UMA, a indiqué que « le décret-loi est passé outre les questions de forme, ce qui fera que les recours soient rejetés pour vice de forme« .

Insuffisances du décret-loi 55

Sur le décret-loi 55, les participants à cette conférence ont indiqué que ce texte comptait beaucoup de défaillances. Le professeur en droit constitutionnel à l’Université de Sfax, Moataz Gargouri, a indiqué dans un premier temps que le décret-loi 55 fait planer le risque d’une loi qui est loin de son fondement original et que cela aura un impact sur la qualité de la loi.

Il a rappelé dans ce sens que ce texte a été imposé sans concertation et qu’il ne faisait pas référence à la dernière constitution adoptée en juillet dernier. « Il y a ici un véritable retour en arrière dans les acquis de la loi électorale », a-t-il souligné.

Gargouri a notamment fait référence aux conditions de candidatures. « Le fait qu’il y ait un traitement différencié entre les Tunisiens naturalisés, les Tunisiens de filiation et les binationaux. Cela peut être presque considéré comme anti-constitutionnel », a-t-il fait savoir.

En ce qui concerne les parrainages, là aussi, le professeur en droit constitutionnel a indiqué des lacunes. « Cela ne favorise pas les femmes, les jeunes et fait augmenter le risque de corruption ». Dans ce sens, Gargouri a aussi soulevé la question du financement qui s’avère être très strict. En effet,  il explique à cet égard que l’absence de financement public peut engendrer un grand nombre de litiges liés à la corruption. De plus, l’impossibilité d’avoir recours à des financements partisans favorise les candidatures de personnes riches et qui ne représentent pas forcément les circonscriptions dans lesquelles ils se présentent. « L’absence de financement public et partisans place également la politique en dehors de ce scrutin alors qu’elle est l’essence même d’un Etat démocratique », a-t-il relevé.

Pour ce qui est du découpage électoral, Moataz Gargouri a fat part du mauvais équilibre de la nouvelle carte. Il prend pour exemple la circonscription de Sfax sud qui compte 130.000 habitants et qui fait l’objet d’une seule représentation alors que celle du Mourouj, composée de 119.000 habitants est divisée quant à elle en deux.

« L’ancien n’était certes pas parfait, mais plus équilibré que celui là ».

Enfin, concernant les délits électoraux, Gargouri a critiqué la dureté des sanctions, qui pour certaines infractions, les candidats peuvent encourir la prison et l’inéligibilité à vie.

En somme, l’Union des magistrats administratifs considère que ce texte est instable et que cela aura un impact sur la clarté des règles électorales et donc sur le traitements des litiges. « Nous nous sommes clairement éloignés des standards internationaux », a conclu Adel Ben Hamouda.

Wissal Ayadi

1 Auteurs du commentaire
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PATRICK DUPONT

Il paraît que tout ça à été rédigé par le meilleur professeur de droit constitutionnel que la tunisie ait compté depuis la reine Didon
Y aurait il erreur sur la personne ?