L’oubli du Nord-Ouest tunisien : Tabarka et Aïn Draham en quête de renouveau (Edito)
Dans ma quête pour découvrir les trésors cachés de la Tunisie, je me suis récemment aventurée dans le nord-ouest du pays, une région encore trop méconnue, et j’y ai trouvé un tableau contrasté de beauté naturelle et de déchéance. L’accès à cette région est déjà un défi en soi, avec l’absence d’autoroute sur une partie du trajet. Il faut près de trois heures pour parcourir moins de 200 kilomètres depuis Tunis, et l’aéroport de Tabarka-Aïn Draham, fermé depuis des années, n’offre aucune perspective de réouverture, tant pour les vols internes qu’internationaux.
Aïn Draham, souvent perçu comme un pittoresque village de montagne au cœur de forêts sous-exploitées, révèle une réalité préoccupante. Les sentiers de randonnée sont rares, et la pollution plastique a envahi les forêts et les routes, ternissant le charme de ce havre de paix, autrefois prisé par les amoureux de la nature. Les vendeurs ambulants défigurent un paysage qui aurait dû rester intact, offrant un dépaysement authentique.
Cependant, un aspect positif émerge : la montée du nombre d’hébergements, des hôtels de charme aux maisons d’hôtes, laissant entrevoir un potentiel certain pour le développement d’un tourisme alternatif. Ce type de tourisme pourrait enrichir l’offre balnéaire traditionnelle, attirant les visiteurs tout au long de l’année. Pourtant, il est alarmant de constater que les autorités semblent ignorer ce potentiel.
Pourtant, Aïn Draham possède un atout indéniable : c’est l’une des rares régions de Tunisie où la neige tombe en hiver. Ce phénomène unique ouvre des perspectives pour le développement d’un tourisme de sports d’hiver, qui pourrait revitaliser l’économie locale et diversifier l’offre touristique. Avec un peu de volonté politique, la région pourrait devenir une destination prisée des amateurs de ski.
Tabarka, quant à elle, présente un tableau encore plus sombre. Cette ville, où l’abandon semble être devenu la norme, est marquée par la saleté et le délabrement. En dehors de deux hôtels de luxe excentrés, il ne reste que peu de choses à admirer. La corniche, qui longe les célèbres « Aiguilles de Tabarka », est rongée par l’érosion et envahie par des vendeurs de souvenirs qui peinent à attirer les rares touristes de passage. Les résidences destinées à la location saisonnière, avec leurs façades écaillées, trahissent un manque d’entretien criant. La marina, autrefois animée, est désormais un lieu déserté, et les options de restauration se limitent à de basiques fast-foods, laissant peu de place à une expérience culinaire authentique.
L’accès au seul monument historique de la ville, le « Fort Gênois », est également problématique. Pour y accéder, il faut une autorisation du commissariat régional au tourisme, et la route menant au fort est parsemée de cratères qui défient la circulation.
En somme, le nord-ouest tunisien, riche de ses atouts culturels et naturels, mérite bien mieux que l’indifférence actuelle. Les habitants de cette région, tout comme son patrimoine, ont besoin d’être valorisés, et il existe un potentiel indéniable pour un développement économique, social et touristique durable. Il est temps d’agir pour que Tabarka et Aïn Draham retrouvent leur splendeur et deviennent des destinations incontournables sur la carte touristique tunisienne.
Wissal Ayadi