Tunisie/ Mariages : Les futurs couples partagés entre festivités en grande pompe, et cérémonie à l’étroit

23-06-2023

Avec la crise économique et les séquelles persistantes de la pandémie, les Tunisiens se trouvent confrontés à un dilemme quant aux célébrations de mariage. D’un côté, certains continuent d’organiser des festivités en grande pompe, symboles de joie et de convivialité. De l’autre, la situation économique précaire poussent de plus en plus de couples à se contenter de cérémonies plus modestes et intimes.

Dans cet article, nous allons explorer les deux facettes de cette réalité tunisienne et recueillir des témoignages pour comprendre comment les Tunisiens se positionnent face à ces choix.

Les célébrations en grande pompe : entre pressions familiales et m’as-tu-vu

Pour de nombreux Tunisiens, les célébrations en grande pompe sont synonymes de retrouvailles, de partage et de moments de joie collective, mais aussi une manière de se montrer. Malgré la crise économique et les difficultés financières auxquelles ils peuvent faire face, certains choisissent de dépenser davantage pour leurs cérémonies.

En Tunisie, le célèbre adage « Sept jours, sept nuit » est toujours de rigueur dans de nombreuses familles, même si les moyens financiers ne suivent pas toujours. Souvent ce type de mariage est célébré, certes pour se faire plaisir, mais aussi sous le coup des pressions familiales. C’est ce qui est arrivé à Ameni, 28 ans, la seule fille de la fratrie, originaire de Sousse. « A la base, je ne voulais faire qu’une cérémonie à la mairie et finalement nous allons devoir faire toutes les étapes d’un mariage traditionnel », nous dit-elle à quelques semaines de ce grand événement. C’est surtout sa maman qui a insisté en la rassurant sur le budget qui sera assuré principalement par elle. Ameni estime que son mariage coûtera aux alentours de 20.000 dinars.

Pour d’autres, un grand mariage est aussi une manière de faire « comme les autres ». C’est le cas de Samia, une habitante de Tunis: « Nous avons décidé de ne pas nous laisser abattre par la situation économique. Après tout, toutes mes cousines ont fait un grand mariage et il s’agit d’un moment important de la vie qu’on ne vit qu’une fois, même si cela signifie beaucoup d’argent », nous confie-t-elle.

Certains professionnels du secteur événementiel ont également constaté un regain d’intérêt pour les grandes célébrations. Amel, une organisatrice de mariages à Tunis, explique : « Malgré les difficultés économiques, nous avons remarqué une augmentation des demandes pour des mariages grandioses. Les gens veulent marquer ces moments importants de leur vie, et ils sont prêts à faire des sacrifices financiers pour le faire. Quitte même à faire un crédit ». Elle nous confie qu’en règle générale, ce genre de mariage coûte au minimum 15.000 dinars, pouvant atteindre parfois des sommes astronomiques en fonction de la salle, du traiteur, des robes, etc.

Les petites cérémonies, symbole de l’anticonformisme de la jeunesse

La crise économique et les conséquences de la pandémie ont également laissé leur empreinte sur les célébrations en Tunisie. De nombreuses familles se voient contraintes de limiter leurs dépenses et d’organiser des événements plus modestes. Pour certains, il s’agit d’une adaptation nécessaire à la réalité économique du pays.

Khadija, originaire de Sfax, explique : « Mon futur mari se remet à peine de son licenciement à cause de la pandémie. Nous avions du reporter notre mariage. Ce n’est que trois ans plus tard que nous allons finalement nous unir. Nous avons dû revoir nos attentes et nous contenter de célébrations plus modestes avec notre cercle restreint de proches ».

Pour cela, les futurs époux ont prévu un mariage civil à la mairie et une petite réception dans le jardin des parents du marié avec la présence de la famille et des amis proches, pour un coût totale d’environ 7000DT. « Cela nous a permis de nous organiser une lune de miel en Turquie, chose que l’on aurait pas faire si nous avions organisé un grand mariage », poursuit Khadija.

De plus en plus de jeunes manifestent un désintérêt croissant envers la complexité organisationnelle des mariages traditionnels, indépendamment de considérations purement économiques.

Une tendance émerge où les jeunes préfèrent opter pour des célébrations simples, avec un nombre restreint d’invités, sans que cela ne soit lié au statut socio-économique des mariés.

Cette évolution peut principalement s’expliquer par le fait que de nombreux jeunes ressentent un désir de se démarquer du conformisme ambiant.

Les célébrations, qu’elles soient grandioses ou intimes, sont une part importante de la culture tunisienne. Dans les deux cas, elles restent une manière pour les Tunisiens de se réunir et de partager des moments de joie.

Wissal Ayadi