Tunisie : Le mouvement judiciaire a touché 1088 magistrats, dont trois hautes fonctions (AMT)

06-09-2023

L’Association des magistrats tunisiens pointe ce mardi 05 septembre 2023 « une série d’irrégularités et de dérives ayant entaché le mouvement judiciaire de l’année 2023/ 2024, tant sur la forme que sur le fond ».

Dans un communiqué fleuve, le bureau exécutif de l’AMT, passe au peigne fin ledit mouvement, qu’il considère comme étant « l’émanation de la ministre de la Justice, en termes de conception et de préparation, dans un contexte de campagnes ayant visé les magistrats, par leurs noms et leurs postes », et « de dénigrement et de calomnie ».

Le mouvement judiciaire qui a concerné 1088 magistrats, est considéré comme « le plus grand en termes d’effectif ».

« Sans doute que le mouvement judiciaire 2023-2024 est la plus immense dans l’histoire de la magistrature tunisienne, non seulement en termes d’effectif, mais aussi en matière du nombre de tribunaux touchés, des fonctions et responsabilités judiciaires, et de nouvelles juridictions reconstituées », souligne le BE de l’association.

« Le mouvement a touché 1088 magistrats et magistrates, soit 425 de troisième rang, 332 de deuxième rang, et 331 de premier rang. Il a également concerné trois hautes fonctions judiciaires, le procureur général près de la Cour de Cassation, l’inspecteur général au ministère de la Justice, et le président du tribunal foncier.

Elle a concerné, notamment, 10 premiers présidents de Cours d’appel, 10 procureurs généraux, 13 présidents de tribunaux de première instance, 16 procureurs de la république et autres.

« Ce grand nombre reflète l’ampleur de l’intervention au niveau des hautes responsabilités judiciaires au sein des tribunaux, dont la finalité est de reconstituer le paysage judiciaire, dans sa quasi-intégralité », considère l’association des magistrats.

Le mouvement a concerné, d’une manière sans précédent, la nomination de cinq adjoints du président de la Cour de Cassation, au rang de présidents de chambres à ladite Cour, ce que l’association considère, en substance, comme « des postes inutiles créés étant donné que les magistrats concernés ont été écartés de leurs responsabilités originelles à la Cour de Cassation et au ministère de la Justice, afin que ces postes soient consacrés par la ministre aux proches ».

S’agissant des irrégularités de forme, le BE de l’AMT déplore que « le mouvement judiciaire n’ait touché aucun magistrat révoqué, malgré les jugements définitifs émis par le tribunal administratif, suspendant l’application du décret présidentiel n’o 516, du 01er juin 2022 ». L’association déplore aussi « l’absence totale des principes de bonne gouvernance et d’égalité des chances entre l’ensemble des magistrats ».

Sur le fonds, l’AMT critique que » le mouvement ait validé l’ensemble des nominations et des décisions de la ministre de la Justice, sans révision », ainsi que « l’atteinte à la composition du Conseil supérieur provisoire de la Magistrature, et au pouvoir de décision en son sein, au profit du pouvoir exécutif ».

L’AMT considère, de surcroût, que le mouvement judiciaire anéantit, définitivement, le processus judiciaire de la justice transitionnelle.

Le mouvement judiciaire est paru en vertu du décret n’o 574 du 29 août 2023, et concerne l’ensemble des magistrats du corps judiciaire.

Gnetnews