Reportage à Tunis : A chaque école ses restrictions, mais déjà 416 cas covid+ recensés en milieu scolaire

02-10-2020

Un peu plus de deux semaines après une rentrée scolaire exceptionnelle, intervenue le 15 septembre dans un contexte épidémiologique critique, les écoles, collèges, et lycées ont enregistré 416 cas dépistés positifs au Coronavirus, 180 cas parmi les élèves, 168 enseignants, 46 personnes du corps administratif et 22 cas parmi les agents.

Selon un tout dernier bilan, présenté ce  vendredi 02 octobre par le ministre de l’Education, Fethi Sellaouiti, lors d’une plénière de dialogue avec le gouvernement, les établissements scolaires comptent, également, 1260 cas suspectés de porter le virus.

Des chiffres alarmants, qui s’accélèrent quotidiennement, malgré la mise en place d’un protocole sanitaire rigoureux, consistant à décréter un arrêt des cours si trois cas sont enregistrés dans la même classe. Ce protocole impose également la fermeture immédiate de l’école dans l’hypothèse, où trois cas sont signalés dans trois classes de l’établissement.

Entre-temps, l’appel au port obligatoire du masque, au rinçage régulier des mains au savon, à l’utilisation du gel hydroalcoolique et à la distanciation sociale, seraient-ils des gestes préventifs suffisants pour lutter à long terme contre la prolifération de la contagion dans les écoles. Le protocole sanitaire  annoncé par le ministère de l’éducation, serait-il capable de rassurer les parents sur la santé de leurs enfants  ?

Gnetnews a tenté de répondre à ces questions, en effectuant le tour de quelques écoles et lycées étatiques et privés de la capitale, pour voir si la stratégie du ministère visant à endiguer la pandémie était efficace.

Protocole sanitaire & actes de solidarité

Lors de notre visite dans des écoles de la région d’El Menzeh (Tunis),  nous avons pu constater que les consignes sanitaires annoncées par le ministère de la santé, étaient peu convaincantes pour les parents, les enseignants, et aussi le personnel.

Ces établissements ont renforcé le protocole sanitaire par leurs propres moyens, en instaurant d’autres restrictions, à part celles recommandées par les ministères de l’Education et de la Santé.

Interdiction d’accès à l’école aux parents et visiteurs ; fermeture des portes d’entrée principales durant les récréations, et séparation physique contrôlée dans la Cour. Tout cela dans le but de protéger le corps administratif, les parents et les élèves d’une éventuelle contagion.

Dans une autre école primaire de Tunis, un parent nous a dévoilé que les cartables à roulettes sont désormais interdites pour garantir une hygiène irréprochable à l’intérieur. Les élèves s’assoient un par table, et étudient par alternance pour éviter l’encombrement, selon le protocole sanitaire officiel, nous confirme-t-il.

« Je suis rassurée pour ma fille. J’ai l’impression qu’elle est entre de bonnes mains, surtout qu’elle est épanouie depuis la rentrée. Fini l’oisiveté et les vacances qui ont duré presque 6 mois », dit-t-il avec un air optimiste. 

Les enseignants ont, eux, trouvé d’autres alternatives plus modernes pour limiter le contact physique. Ces derniers communiquent désormais  les horaires des cours sur les pages Facebook officiels de l’école. La digitalisation a pris le relais. Chaque classe dispose d’une plateforme privée dédiée aux élèves, accessibles aussi par les parents qui souhaitent s’informer auprès de l’administration ou de l’enseignant.

Dans ces deux écoles de la région d’El Menzeh,  un appel au don a été lancé aux parents, pour aider à mieux gérer la situation. Ces derniers, ont fait preuve de solidarité et ont contribué par l’achat des produits et tapis désinfectants anti contaminants, la prise en charge de la stérilisation hebdomadaire de l’établissement…Et bien d’autres moyens de prévention.

Les actes de solidarité se sont multipliés dans ces établissements pour motiver les enfants  et les aider à supporter psychologiquement cette ambiance inquiétante.

Malheureusement, ce n’est pas le cas dans toutes les écoles de Tunisie. Certains élèves habitant dans les régions les plus précaires, et les zones les plus reculées du pays, touchés aussi par la pandémie, ne peuvent pas se rendre en classe à cause de l’absence des moyens de transport, ne bénéficient pas de l’eau potable vu l’état lamentable de l’infrastructure, et ne disposent pas de blocs sanitaires fonctionnels…Cela entrave encore plus l’endiguement de la pandémie…

Rassemblements et insouciance des élèves

Dans la plupart des lycées que Gnetnews a visités, le protocole sanitaire n’est appliqué qu’à l’intérieur. A notre surprise, des jeunes adolescents des lycées privés ou étatiques, semblent ne pas être conscients des conséquences de la proximité, et la non prise au sérieux des petits gestes d’hygiène à pratiquer tous les jours…

A notre surprise, les rassemblements étaient nombreux devant ces établissements. Les masques sont portés mais baissés dans la plupart du temps. Ces adolescents se réunissent généralement devant le lycée, pour qu’un agent de sécurité leur mesure après la température à l’entrée, un par un. Des comportements contradictoires qui rendent inefficace le protocole sanitaire…

Il est évident que c’est difficile de contrôler des enfants durant l’adolescence, une période durant laquelle ils cherchent plutôt à s’affirmer en s’opposant aux règles. Pour y remédier, faut-il que les parents soient plus vigilants en matière de conscientisation, et de discipline, question de soutenir les écoles et les aider à assurer une meilleure gestion de crise ?

Une mère d’un adolescent de 13 ans nous a confié à ce sujet, que les enfants n’arrivent pas à assimiler le danger que représente cette pandémie, pour eux et pour leurs entourages.

« Je viens chercher mon fils dans chaque récréation, et en cas d’heure creuse aussi, pour lui éviter toute proximité avec ses amis. La distanciation sociale est difficile à appliquer lorsqu’il s’agit d’adolescents…Pas mal de fois, j’ai remarqué que les élèves jouent dans la cour souvent sans porter le masque. Ils l’enlèvent dès la sortie des classes. Quant aux surveillants, ils ne font pas d’effort pour contrôler ce genre de dépassements. Le seul moyen que j’ai trouvé pour protéger mon enfant, était donc de lui imposer ce  nouveau rythme. Moins de fréquentation en ce moment !», insiste-t-elle.

Emna Bhira