La Tunisie présente à la COP 28, enjeux et attentes de sa participation, selon le climatologue Zouheir Hlaoui

29-11-2023

La 28e Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP 28) débutera ses travaux demain jeudi 30 novembre à Dubaï, et se poursuivra jusqu’au 12 décembre 2023.

Une délégation comptant des représentants de ministères ainsi que la société civile représente la Tunisie à cet événement crucial pour l’avenir de notre planète, impactée de manière significative par les conséquences néfastes des changements climatiques. Et dans ce registre, la Tunisie n’est pas en reste puisqu’elle demeure être un des pays les plus touchés par les changements climatiques dans le bassin méditerranéen.

La présence tunisienne à la COP 28

La Tunisie, acteur assidu de ces rencontres et signataire de divers accords et protocoles visant à atténuer les changements climatiques, est un pays particulièrement vulnérable aux effets de tels changements, comme l’explique M. Zouheir Hlaoui, professeur en climatologie et membre de l’Association tunisienne des changements climatiques et du développement durable (2C2D) et présent lors de cet évènement.

Les pénuries alimentaires et les problèmes liés aux énergies fossiles, en particulier le gaz et le pétrole, responsables des émissions de gaz à effet de serre et du réchauffement climatique, sont des défis majeurs.

« La vulnérabilité de la Tunisie, bien ancrée dans la lutte mondiale contre les changements climatiques, découle de sa position géographique entre trois continents, face à une mer aux frontières nord et est du pays. Bien que ne produisant que 0,07% des gaz à effet de serre à l’échelle mondiale, la Tunisie est fortement exposée aux effets néfastes des changements climatiques », nous dit-il.

En effet, cette vulnérabilité a des répercussions économiques significatives, en particulier dans les secteurs agricole et touristique, piliers de l’économie tunisienne. Les problèmes liés à l’eau, tels que la sécheresse extrême dont le pays est le théâtre depuis 5 ans, l’accès, la gestion et la qualité de l’eau, affectent gravement l’agriculture, tandis que l’érosion côtière due à la montée des eaux et l’apparition d’espèces invasives sur le littoral seront des sujets à discuter lors des négociations à la COP 27.

Le financement : Un enjeu majeur pour la Tunisie

Pour remédier à ces défis, la Tunisie a besoin de connaissances et de financements. M. Hlaoui souligne que la COP 28 offre l’occasion de solliciter le soutien financier de bailleurs de fonds étrangers, bien que les conditions d’accès à ces financements aient été durcies, compliquant la situation pour les pays en développement.

« Les pays en voie de développement peinent à accéder aux financements alors que de nombreux pays développés avaient accepté de financer des actions pour le climat en leur faveur, notamment lors de la dernière COP », déplore l’expert.

La création du Fonds pour les pertes et dommages lors de la COP 27 à Charm El-Cheikh a été saluée comme l’un des résultats les plus positifs. Malgré une résistance persistante des pays riches, cet accord a finalement vu le jour après plus de 30 ans de négociations. Cependant, des questions subsistent quant aux contributeurs, aux bénéficiaires du fonds et aux conditions d’accès.

Les « pertes et dommages » font référence aux conséquences des effets climatiques qui échappent aux mesures d’adaptation et d’atténuation. Les « dommages » concernent ce qui peut être réparé ou reconstruit, tels que les infrastructures, les logements, les terres agricoles, les cultures ou le bétail. Les « pertes » englobent tout ce qui est irrécupérable, y compris les vies, les impacts sur la biodiversité, les interruptions d’études ou l’obligation de quitter la terre ancestrale.

Le Fonds pour les pertes et dommages vise à fournir un financement rapide, accessible et sans endettement pour répondre aux besoins pressants des personnes de plus en plus déplacées en raison de l’aggravation des effets du changement climatique en Afrique. En 2023, les phénomènes météorologiques extrêmes ont causé la mort d’au moins 15 700 personnes en Afrique et ont touché au moins 34 millions autres jusqu’à présent.

« Ce sera l’occasion de mettre en place les mécanismes d’activation et de validation de ce fonds », souligne Zouhaier Hlaoui.

La Tunisie fait partie de 3 groupes de pression

La délégation tunisienne, regroupant des représentants de plusieurs ministères, organisations nationales, société civile, experts nationaux et internationaux, ainsi que des jeunes négociateurs, participera activement à la prise de décision relative à l’exécution, le suivi et l’évaluation des conventions des Nations unies sur le changement climatique à Dubaï.

La Tunisie fait partie du groupe de pression arabe, Afrique et « 77+Chine », pour garantir l’accès aux financements, aux savoir-faire et aux connaissances. Haloui, insiste sur l’urgence de la situation, illustrée par les récentes vagues de chaleur et le déficit pluviométrique critique en Tunisie.

Cependant, Zouhaier Hlaoui précise que la COP 28 ne vise pas à obtenir des projets ou des financements, mais à prendre des décisions internationales ouvrant la voie à un meilleur accès aux financements.

Wissal Ayadi