Coronavirus/ Bizerte : Le confinement général envisagé face à une situation alarmante, le point avec Dr Baya Cherif
La situation sanitaire dans le gouvernorat de Bizerte ne cesse de s’aggraver. La semaine dernière, la région s’est placée en première place en termes de taux de positivité avec 78,5% (142 cas positifs sur un total de 181 analyses à la date du vendredi 25 juin).
La délégation de Joumine est depuis plusieurs jours en confinement général, où la propagation du virus a atteint un niveau alarmant avec plus de 400 cas sur 100.000 habitants.
Afin de freiner l’hémorragie, les autorités locales ont évoqué la possibilité d’un isolement total à travers tout le gouvernorat. Avec seulement deux hôpitaux principaux et un de circonscription, la situation pourrait vite basculer comme c’est le cas à Kairouan.
Contexte sanitaire
Depuis le week-end dernier, le gouverneur de Bizerte , Mohamed Gouider a mis en place certaines mesures afin de freiner les effets ravageur du Covid-19.
En plus de la délégation de Joumine placée en confinement général, les délégations de Bizerte-nord, Bizerte-Sud, Menzel Jemil et Zarzouna ont été placées en confinement ciblé. Le couvre-feu a été avancé à 20h, les marchés hebdomadaires et les mosquées fermées au public et enfin les rassemblements strictement interdits. Quant aux cafés et restaurants, ils ont pour obligation de lever chaises et tables à 16h et d’interdire les narguilés. Ces dispositions seront en vigueur jusqu’au 11 juillet prochain.
Ces décisions urgentes ont été décrétées au vu du fort taux d’incidence dans ces régions :
Plus de 400 cas sur 100 mille habitants à Joumine ;
Entre 300 et 400 cas pour 100 mille habitants à Bizerte Nord
Entre 200 et 300 cas sur 100 mille habitants à Zarzouna et Menzel Jemil,
Mais ces mesures seront-t-elles suffisantes pour maîtriser la pandémie ? Et surtout seront-elles respectées ? Difficile à en voir le comportement des habitants. Gnetnews s’est rendu à Bizerte ce dimanche. Les quais qui bordent le canal au niveau de la ville de Zarzouna étaient bondés. Au niveau du centre-ville, l’activité était moindre mais les vendeurs ambulants de fruits et légumes étaient présents aux abords du marché couvert et ne portaient pas de masques.
Les cafés ont bien respecté la levée des chaises et des tables à l’extérieur, mais certains établissements ont discrètement laissé les clients s’installer à l’intérieur.
Dans une déclaration à la télévision nationale, le gouverneur Mohamed Gouider a indiqué que si la situation sanitaire ne s’améliorait pas dans les prochains jours, le passage d’un confinement ciblé à un confinement général pourrait être envisagé.
10 lits de réanimation pour tout le gouvernorat
Le gouvernorat de Bizerte est pourvu de deux hôpitaux principaux. L’hôpital Habib Bougetfa situé en ville et celui de Menzel Bourguiba. Les deux établissements sont dotés d’un circuit Covid.
Afin d’en savoir plus, nous avons rencontré Dr Baya Cherif. Elle est médecin principal au CHU de Bizerte et exerce au sein du circuit Covid. Elle nous explique que la situation est critique.
« La capacité du service est de 42 lits mais en réalité seulement 35 patients maximum peuvent être traités car les sources d’oxygène ne sont pas suffisantes », nous dit-elle.
En effet, certaines personnes hospitalisées ne peuvent pas se contenter d’une seule source d’oxygène et en monopolisent deux et ce sans compter les sources défectueuses. « En ce moment, tous les lits sont occupés. Nous avons même des patients qui viennent de Tebourba et de Béja », ajoute le Dr Cherif.
Concernant les lits de réanimation, la situation est encore plus dramatique. L’hôpital Habib Bougetfa est pourvu seulement de 10 lits de réanimation et 6 sont dédiés aux patients Covid. Celui de Menzel Bourguiba n’en a pas.
« Quand nous n’avons plus de place, nous faisons appel à la Shoc Room mais dans la plupart des cas ils n’ont pas de solution », souligne la médecin. La « Shoc Room » est une cellule d’urgence mise en place par le ministère de la santé afin de trouver des places en réanimation.
« La clinique privée El Amen de Bizerte a ouvert des lits de réanimation pour les patients les plus atteints, à condition de payer au minimum 50.000 dinars », déplore Dr Chérif.
L’hôpital de circonscription de Ras Jbel dispose de quelques lits de réanimation, mais n’a pas de médecin-réanimateur et ne servent donc qu’à placer les patients sous machine.
Pourtant la Tunisie a reçu plusieurs dons étrangers de machines Optiflow, qui permettent une alimentation en oxygène plus importante (60 litres). « Nous avons une salle pleine de machines mais elles sont inutilisables, car nous n’avons pas les consommables qui permettent de les faire fonctionner ». Selon elle, certains filtres qui alimentent les machines sont lavés puis réutilisés alors qu’ils devraient être jetés.
Baya Cherif explique par ailleurs que les variants ont provoqué un rajeunissement des patients. « Ces derniers jours, nous avons eu une jeune femme de 36 ans qui avait les poumons attaqués à 80%. Elle est, malheureusement, décédée au bout de quelques jours ».
Le gouvernorat de Bizerte est bel et bien dans une situation plus qu’alarmante. Dans une déclaration récente aux médias, le gouverneur a promis d’augmenter le nombre de lits de 195 actuellement à 300 à travers les hôpitaux de la région.
Par ailleurs, la direction régionale de la santé a indiqué que deux centres de vaccination supplémentaires seront ouvert à Ras Jbel et Mateur. Le premier couvrira les localités de Ras Jbel, Utique et Ghar El Melh, tandis que le deuxième sera dédié aux habitants de Mateur et Ghezela.
La vaccination à Joumine et Sejnane sera assurée par des équipes mobiles.
Wissal Ayadi
Mais comment avec une situation catastrophique comme peut l’a vivre la Tunisie. On laisse rentrer les vacanciers. Alors qu’ils ne pourront plus sortir. Confinement et couvre feu.