Un Code du Travail qui risque de renvoyer l’économie au chômage! (Edito)

En pleine crise économique, où chaque investisseur est un acteur essentiel pour maintenir à flot l’emploi et la production, la Tunisie choisit d’adopter un nouveau Code du travail qui rigidifie encore plus le marché de l’emploi. Certes, ce texte répond à une demande sociale visant à mettre un terme à la précarité dans les relations salariales, mais, comme c’est toujours le cas avec le populisme, il apporte de mauvaises réponses à de vrais problèmes. En effet, sous couvert de protection des salariés, ce texte risque surtout d’engendrer un effet boomerang aux conséquences désastreuses sur l’économie nationale.
L’interdiction quasi totale des contrats à durée déterminée (CDD) et du travail intérimaire enferme les entreprises dans un cadre rigide, où toute embauche devient un engagement définitif. Loin d’encourager le recrutement, cette mesure pourrait dissuader bon nombre d’entreprises, notamment étrangères, de maintenir ou d’étendre leurs activités en Tunisie. Certaines envisageraient même de se délocaliser, tandis que d’autres, par crainte des implications de cette loi, préféreraient tout simplement ne pas investir.
« Cette rigidité ne peut conduire qu’à une crispation », nous confiait récemment un entrepreneur installé en Tunisie. Selon lui, imposer des CDI comme norme unique, sans alternatives adaptées aux réalités économiques et sectorielles, est une hérésie dans un contexte aussi incertain. La flexibilité, loin d’être un luxe, est une nécessité vitale pour permettre aux entreprises de s’adapter à la conjoncture.
Autre écueil de cette réforme : son absence totale de concertation avec les partenaires sociaux. Aucune discussion approfondie n’a été menée avec les employeurs, les syndicats ou les experts économiques pour anticiper les effets réels de ces nouvelles contraintes. Résultat : une loi qui, sous prétexte de protéger l’emploi, risque paradoxalement de le fragiliser encore plus.
Dans un pays où le taux de chômage reste élevé et où la précarité économique pousse déjà bon nombre de jeunes et de diplômés à l’exode, fallait-il vraiment ajouter une couche d’incertitude supplémentaire ? La protection du salarié est une cause noble, mais sans entreprises capables d’embaucher et de croître, elle restera lettre morte. En restreignant à ce point la liberté contractuelle, le législateur semble avoir oublié une règle élémentaire de l’économie : la confiance est le moteur de l’investissement, et l’investissement est le seul remède durable contre le chômage.
Wissal Ayadi