La Tunisie désunie face à la guerre en Libye, Charivari au parlement

03-06-2020

Les députés ont dénoncé ce mercredi 3 juin l’ingérence des forces régionales et internationales en Libye, dont le but est « d’asseoir leur emprise sur ses richesses ». Ils ont rejeté tout alignement derrière tel axe ou tel autre, et appelé à ne tenir compte que de l’intérêt de la Tunisie. D’aucuns, notamment les députés d’Ennahdha, s’en sont pris au projet de motion du PDL, et ont défendu la position du président de l’Assemblée envers la crise en Libye.

La plénière consacrée à « proclamer le refus du parlement de toute ingérence étrangère en Libye, et le rejet de l’instauration d’une base logistique sur le territoire tunisien, favorisant une telle intervention », a repris cet après-midi après avoir été marqué ce matin par un débat houleux et des tensions liées à des aspects organisationnels et procéduraux.

La présidente du PDL qui réclame notamment que Rached Ghannouchi soit démis de la présidence de l’Assemblée avait d’emblée pointé des tentatives de bloquer la plénière et d’en empêcher l’aboutissement.

La partition de  la Libye est une ligne rouge

« Le but du projet de motion du PDL est d’impliquer l’Assemblée au cœur des conflits politiques », a fustigé Imed Khemiri (Ennahdha), lors de la séance de l’après-midi dont les travaux se poursuivent encore. Le président de l’ARP a appelé « à rapprocher les protagonistes libyens et sa position était en harmonie avec celle de la diplomatie tunisienne », a-t-il souligné, pointant une atteinte aux relations de la Tunisie avec certains pays, du fait de cette motion.

« Nous sommes prêts à défendre les territoires et les frères libyens. Nous sommes concernés par l’unité territoriale de la Libye et toute tentative de partition du peuple libyen est une ligne rouge, a indiqué Hatem Mliki (bloc national), pointant « des troubles dans la diplomatie tunisienne depuis la révolution, dont l’origine provient des divergences au sein de la classe politique ».

« Le peuple libyen est face à une situation qu’il avait connue auparavant, soit la résistance en vue de l’évacuation de l’occupation », a considéré Mongi Rahoui (bloc démocratique). « Certaines légitimités qui tirent leur force de l’extérieur n’ont pas de profondeur à l’intérieur », a-t-il lâché.

« Le gouvernement d’union libyen reconnu par la communauté internationale réalise des réussites face à toutes les opérations de partition de la Libye et son peuple », a estimé Oussma Sghaier (Ennahdha).

Fayçal Tebbini (indépendant) a pointé « ceux qui sont devenus des agents des pays étrangers du fait de la haine et de la rancœur qu’ils éprouvent envers leurs compatriotes ».

Mohamed Hsairi (Qalb Tounes) a souhaité que cette plénière n’impacte pas la relation avec nos frères en Libye. « Nous avons des relations familiales et populaires et nous formons un seul peuple », a-t-il dit.

Hassouna Nasfi (bloc démocratique) a appelé à traiter cette affaire avec objectivité. « La question est de savoir si on laisse la Tunisie devenir une base pour perpétrer des frappes contre la Libye ». « Nous sommes avec la Tunisie seulement. Nous ne rangeons ni derrière Haftar ni derrière Sarraj, mais notre rôle est de jouer la médiation entre les deux parties ».

Abir Moussi, à l’origine de cette plénière, s’était auparavant insurgée contre toute tentative « d’exploiter le territoire national et les espaces maritimes et aériens de la Tunisie, en vue de l’ingérence en Libye et la déstabilisation de la sécurité dans la région ».

« La Tunisie ne doit pas se transformer en régence ottomane »

Dans une déclaration médiatique en marge d’un sit-in organisé par son parti devant l’Assemblée, la députée a appelé le parlement à adopter une position claire rejetant toute intervention étrangère en Libye. « La Tunisie ne doit pas se transformer en régence ottomane, ou être un instrument entre les mains de ceux qui poursuivent des visées expansionnistes. », s’est-elle élevée. 

Les partisans du PDL avaient observé ce mercredi un sit-in devant les locaux annexes de l’Assemblée où ils ont brandi des slogans hostiles à Rached Ghannouchi, le critiquant « pour avoir outrepassé ses prérogatives, et appela »nt à ce qu’ »il soit démis de son poste ».

Gnetnews