Le FLN se rallie à la proposition de l’armée pour écarter Bouteflika

28-03-2019

Reuters – Le Front de libération nationale (FLN) au pouvoir en Algérie depuis l’indépendance s’est rallié mercredi à la proposition du chef d’état-major de l’armée de recourir à l’article 102 de la Constitution pour écarter le président Abdelaziz Bouteflika.

Auparavant, le Rassemblement national démocratique (RND), partenaire de la coalition au pouvoir, et le puissant syndicat UGTA (Union générale des travailleurs algériens) avaient également annoncé leur soutien à l’approche privilégiée par les militaires.

Mais ce plan de sortie de crise a été rejeté par les manifestants mobilisés depuis plus d’un mois contre le “système” et qui veulent renverser l’élite politique actuelle.

Mardi, le chef d’état-major de l’armée et vice-ministre de la Défense, le général Ahmed Gaïd Salah, a demandé que le président, âgé de 82 ans et considérablement affaibli depuis un AVC en 2013, soit déclaré par le Conseil constitutionnel inapte à exercer le pouvoir.

Pour le FLN, cette idée marque un début de solution qui permettra de sortir de la crise politique actuelle. “Nous annonçons notre soutien à cette initiative, début d’un plan constitutionnel qui nous permettra de protéger le pays des dangers”, précise-t-il dans un communiqué.

Dans la matinée, le RND, parti dirigé par l’ancien Premier ministre Ahmed Ouyahia, avait lui aussi “recommandé la démission du président Abdelaziz Bouteflika en vertu du quatrième paragraphe de l’article 102 de la Constitution”.

Pour sa part, l’UGTA, dans un communiqué, “salue et prend acte de l’appel” du général Salah “à l’application de l’article 102 de la Constitution, constituant le cadre légal à même de surmonter la crise politique à laquelle est aujourd’hui confronté notre pays”.

L’article 102 dispose que le président peut être déclaré en “état d’empêchement” en cas de maladie grave et durable qui le place dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions.

L’un des chefs de file du mouvement de contestation, l’avocat et militant des droits de l’homme Mustapha Bouchachi, a toutefois souligné que les manifestations se poursuivraient pour obtenir “un changement du système politique”.

“L’application de l’article 102 signifie que les symboles du système superviseront la période de transition et organiseront l’élection présidentielle”, a-t-il dit.

Les manifestants refusent un changement “de façade” et exigent “une vraie démocratie”, a aussi déclaré à Reuters un employé des postes de 26 ans, Zakaria Jaziri. “Nous saluons l’initiative de l’armée mais nous ne voulons pas que les hommes de Bouteflika restent au pouvoir jusqu’à la prochaine élection”, a renchéri Djamel Hadidi, un employé de banque de 37 ans.

La décision sur le recours à l’article 102 de la Constitution est désormais entre les mains du Conseil constitutionnel.

Si Abdelaziz Bouteflika est reconnu inapte à exercer ses fonctions, ce qui doit être ratifié par une majorité des deux tiers dans les deux chambres du Parlement, il sera remplacé pendant une période d’au moins 45 jours par le président du Conseil de la nation, la chambre haute du Parlement algérien, Abdelkader Bensalah.

“Existe-t-il un risque de radicalisation ou de confrontation si les manifestants rejettent l’approche proposée par l’armée ? C’est une hypothèse qui ne peut être totalement exclue”, a déclaré Louisa Dris, professeur de science politique à l’université d’Alger.

La dernière fois que l’armée est intervenue directement dans une crise politique remonte à 1992, quand les généraux avaient annulé les élections que les islamistes semblaient bien placés pour l’emporter. La guerre civile qui a suivi a fait selon les estimations environ 200.000 morts.