Tunisie : 2ème Aïd sous l’ombre du Coronavirus, rien n’est plus comme avant (Reportage)

29-04-2021

Dans une quinzaine de jours, les Tunisiens célébreront la fête de l’Aïd, qui marque la fin du mois saint de Ramadan, et le premier jour du mois de « Chawwal ».

Les préparatifs pour cette occasion ont déjà démarré dans les boutiques et les centres commerciaux. Cette année, les mamans ont anticipé l’achat des vêtements et des jouets pour les enfants.  En effet,  à cause de cette troisième vague du Coronavirus en Tunisie, plusieurs familles ont choisi de faire leurs courses à l’avance, histoire d’éviter l’encombrement dans les grandes surface à l’approche de l’Aïd.

En plein pic épidémique, « Aid El Fitr » aurait-il le même goût d’antan, avec des préparatifs faites à la hâte, dans une ambiance de méfiance et d’inquiétude ?  Gnetnews a choisi de se rendre dans un centre commercial de Tunis, un des Malls les plus fréquentés, notamment dans les périodes des fêtes.

10h 30mn, l’heure d’ouverture des boutiques, les magasins étaient encore désertés. Les employés et les commerciaux étaient en train de lever les rideaux. Quant aux clients, accompagnés de leurs enfants, ils ont commencé à affluer vers midi, pour profiter du calme avant l’heure de pointe…

Masques sur le visage pour les grands, quelques gouttes de gel hydroalcoolique sur les mains des petits, et la recherche de la meilleure tenue rapport qualité/prix peut démarrer en toute sécurité notamment en début de semaine, hors des horaires d’affluence.

Ces magasins de vêtements d’enfants présente un embarras de choix, sauf que les prix sont en flambée, notamment chez les enseignes internationales…

C’est que nous a confirmé une jeune maman, Samia, femme au foyer, qui était en train de chercher une tenue pour son petit garçon de 5 ans. Pour elle, il vaut mieux éviter les weekends pour pouvoir appliquer la distanciation sociale, et réduire le contact avec les autres… 

 En évoquant les prix des vêtements d’enfants, elle a souligné que tout le secteur du prêt-à-porter a gonflé ses tarifs !

« Depuis l’année dernière, les vêtements de qualité, à base de matières qui résistent aux marques du temps et aux lavages redondants comme la laine, le coton ou encore le cachemire sont devenus inaccessibles. En contrepartie, les articles bas de gamme, fabriqués en Chine, ont envahi nos marchés », nous dévoile-t-elle. 

Dans une autre boutique, nous avons rencontré Ines, professeure universitaire, et mère d’une petite fille de deux ans, venue pour lui acheter sa robe de l’Aid. Cette jeune maman a choisi de laisser Baya chez ses grands-parents pour pouvoir faire ses courses tranquillement, sans pour autant s’inquiéter de la possibilité qu’elle touche des surfaces contaminées par le virus. 

En parlant de son budget consacré à cette occasion, elle nous a dévoilés qu’elle  venait de dépenser 100 dinars pour les baskets de sa fille. « Tout de même, il existe d’autres articles bon marché, à prix réduits pour satisfaire toutes les bourses », souligne-t-elle.

«Pour mon cas, mes parents ne ratent pas l’occasion de chouchouter Baya. Ils ont cotisé pour lui offrir le meilleur durant cette fête. Quant à moi, je lui ai consacré un budget de 200 dinars pour lui acheter sa robe, son petit sac et un jouet, comme le veut la tradition… », nous confie la cliente.

Par ailleurs, d’autres familles plus nombreuses peinent à perpétuer cette tradition. Pour cette famille de trois enfants, les parents ont choisi de n’acheter que l’essentiel à l’occasion de l’Aid. « Chacun a le droit d’acheter que ce qui manque à sa garde-robe, soit un article par enfant. C’est tout ce que je pourrais offrir cette année », a déploré le père.

«Je suis au chômage partiel depuis l’année dernière à cause de la fermeture de l’hôtel dans lequel je travaille. Ma femme, fonctionnaire a un salaire très moyen. Nous avons donc opté pour cette méthode pour ne pas priver nos enfants de la joie de l’Aid, tout en respectant nos capacités financières », nous confie-t-il.

En effet, à cause de la régression du pouvoir d’achat, la hausse du chômage et la cherté de la vie, plusieurs citoyens ont acheté les vêtements de l’Aid durant les soldes, pour faire des économies. D’autres se sont retournés vers le seconde-main qui se vend dans les fripes, ou encore dans les boutiques de troc (échanger des articles quasi neufs contre d’autres). Un concept qui est en train de gagner du terrain en Tunisie…

Pour d’autres Tunisiens, Aid El Fitr n’est pas seulement une occasion pour célébrer la fin du mois de ramadan, visiter la famille, et échanger les vœux. Il s’agit pour eux d’un moment de bienfaisance, de partage et de générosité. C’est le cas, de cette jeune femme, sans enfants, qui a choisi de faire un don de vêtements à un orphelinat.

« Il faut penser aux oubliés et aux moins chanceux durant cette fête. Ces enfants méritent aussi d’être heureux et de vivre les joies de l’Aïd », indique la jeune femme. « Penser aux personnes qui sont dans le besoin notamment durant ce mois spirituel, est le plus grand cadeau qu’on puisse offrir pour soi et pour autrui », a-t-elle conclu.

Emna Bhira