Crise de confiance, de valeurs, abandon des régions intérieures ; les Tunisiens jugent sévèrement les dix ans de la révolution !

12-01-2021

Ce mardi matin, le temps est maussade sur l’Avenue Habib Bourguiba à Tunis. Le 14 janvier 2011, cette artère est devenue un des symboles de la Révolution en Tunisie. Dix ans plus tard, il est temps de faire le bilan… Que reste-t-il de l’espoir d’une meilleure Tunisie ? Réussite ou échec, qu’en pensent les Tunisiens? Nous sommes allés à leur rencontre.

Il n’y a pas que le temps qui est maussade en ce début d’année 2021. En effet, les Tunisiens le sont aussi. En plus de la crise sanitaire, une crise socio-économique profonde touche le pays et personne n’est épargné.

Chômage, pouvoir d’achat en baisse incessante, pauvreté et crise de confiance politique, l’avenir leur semble de plus en plus flou.

Pourtant il y a 10 ans, c’est l’espoir d’une Tunisie meilleure, démocratique et libre qui a poussé le peuple à se soulever…

Aujourd’hui, il est unanime, le pays traverse l’une des phase les plus sombres de son histoire.

Nous rencontrons un homme originaire de Kasserine, l’un des berceau de la révolution. Pour lui, cette dernière est un échec. Son bilan: « tous les gouvernements qui se sont succédé ont échoué, la classe politique est rongée par la corruption et le peuple meurt de faim ». Tous les dirigeants post-révolutionnaires ne sont pas dignes des martyres tombés sous les balles  et de la jeunesse tunisienne sortie dans la rue pour crier « Dégage », a-t-il ajouté.

Il déplore également l’abandon par l’Etat des régions intérieures, qui souffrent cruellement de projets de développement et où le chômage fait des ravages.

D’après un autre homme que nous avons interrogé, la Tunisie connaît, depuis 2011, une crise de valeurs. Pour lui, les Tunisiens sont devenus méfiants les uns des autres. « Il n’y a plus de respect entre les gens et surtout envers les femmes ». Là aussi, le retraité accuse la classe politique. Il prend notamment pour exemple les propos de Hichem Mechichi pendant son voyage officiel en France il y a quelques semaines. « A l’international, la Tunisie est désormais stigmatisée et son peuple est considéré comme terroriste. Le chef du gouvernement à lui même fait l’amalgame », dénonce-t-il.

Le désespoir est tel que certains, voire la plupart, avouent avoir une certaine nostalgie pour  l’ancien régime. Celle d’un pouvoir autoritaire, dirigeant son peuple sous le joug de la peur. « Il semble que les Tunisiens soient en manque de « bâton ». Nous vivons dans une sorte d’anarchie où les gens pensent qu’ils n’ont pas de limites », nous raconte un passant, pour qui l’espoir ne réside désormais que dans la destinée divine.

Malgré toute cette négativité, tous ont encore espoir et croient en une Tunisie meilleure. Un jeune avocat, se revendiquant fils de la révolution, est persuadé que le pays est sur la bonne voie. En effet, il affirme qu’il a confiance dans le peuple tunisien. « Un oiseau que l’on sort de sa cage, n’y reviendra jamais », nous dit-il.

Retrouvez ci-dessus notre micro-trottoir sur le dixième anniversaire de la révolution.

Wissal Ayadi