Tunisie : Le sens d’un remaniement, qui suscite des grincements de dents

18-01-2021

Le remaniement annoncé, samedi 16 janvier, par le chef du gouvernement, est diversement accueilli sur la scène politique. Les changements opérés par Hichem Méchichi sont substantiels, et touchent 11 portefeuilles ministériels. Le but est de pourvoir à la vacance à la tête de trois ministères, dont les titulaires ont été démis de leurs fonctions pour des raisons diverses (Culture, Environnement et Intérieur), ainsi que de remplacer certains ministres dont la prestation est jugée en deçà des attentes.

Ainsi, deux ministères régaliens changent de titulaires ; Youssef Zouaghi a été nommé à la tête du ministère de la Justice, et Walid Dhahbi à l’Intérieur. Des secteurs à vocation économique ont été, par ailleurs, touchés par ce renouvellement, comme le ministère de l’Industrie et des petites et moyennes entreprises confié à Ridha ben Mosbah, celui de l’Energie et des Mines à Sofiène Ben Tounes, de l’Agriculture et des ressources hydrauliques à Oussama Khériji, de la Formation, de l’Emploi et du Développement économique et solidaire à Youssef Fenira, et des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières à Abdellatif Missaoui.

Aussi, le ministère de la Santé change-t-il de premier responsable, en pleine crise sanitaire. Hédi Khaïri aura à veiller à sa destinée, avec pour principale mission d’infléchir la courbe ascendante des contaminations, des cas graves et des décès par le Coronavirus, et de parachever le travail, entamé par ses prédécesseurs.

Comme c’est souvent le cas, dans les remaniements passés, certains noms dévoilés suscitent des grincements de dents, soit d’une manière allusive, soit ouvertement.

Le bloc démocratique désapprouve 

L’ONG I Watch a émis des réserves sur le choix porté sur Sofiène Ben Tounes, à la tête du ministère de l’Energie.

L’organisation s’est dite étonnée par cette nomination, signalant que ce dernier est « président du Conseil d’administration, et président exécutif de la société Oscar infrastructure services, et est membre de Qalb Tounes ».

« Cette entreprise compte également Mohamed Zaânouni, en tant que vice-président chargé des affaires juridiques, et est également avocat de Nabil Karoui », ajoute-t-elle.

Autre critique qui s’est d’emblée exprimée envers le remaniement, est celle du bloc démocratique à l’Assemblée.

Dans une déclaration à Radio Express, le député Abderrazek Aouidate a indiqué dimanche que « le bloc parlementaire ne votera pas la confiance au remaniement ministériel, étant donné que celui-ci revêt une portée politique, du fait de la proximité des noms annoncés des partis soutenant le gouvernement ».

Selon son opinion, « le remaniement ministériel aurait dû intervenir, après la fin du dialogue national », pointant « un simple changement de personnes, et non de programmes et de conceptions ».

Ennahdha soutient, mais ses membres contestent

Le mouvement Ennahdha annonce ce lundi 18 janvier son soutien au remaniement ministériel annoncé par Hichem Mechichi, « en vue de plus d’efficience et d’efficacité de l’action gouvernementale ».

Dans un communiqué rendu public au lendemain de la 48ème session de son Conseil de la Choura, le mouvement souhaite que « ce remaniement soit appuyé par les différentes parties politiques, ce qui permet de désamorcer les tensions, et de se consacrer aux prochaines échéances, notamment la lutte contre la pandémie du Coronavirus et ses retombées. »

Sauf qu’au sein du mouvement islamiste, l’unanimité à ce sujet semble faire défaut. Dans une déclaration à Mosaïque, Yamina Zoghlami a indiqué que « le remaniement ne sera entériné, que si Mechichi renonce aux noms, objet de soupçons de corruption ou de conflits d’intérêt ».

Zoghlami a appelé le chef du gouvernement à ne pas soumettre ces noms à la séance plénière, soulignant : « Mechichi n’assume pas la responsabilité du choix de ces ministres, ce sont les partis qui les ont choisis d’en assumer la responsabilité ».

Même son de cloche chez son collègue, le député Néji Jmal. « Le chef du gouvernement a le droit d’opérer un remaniement, mais des soupçons de corruption et de conflit d’intérêts pèsent sur certaines personnalités, dont il aurait dû éviter la désignation ».

Plusieurs autres partis, qu’ils soient ceux faisant partie de la ceinture politique du gouvernement, ou de l’opposition ne se sont pas encore exprimés, leurs positions seront connues dans les prochains jours.

Le bureau de l’Assemblée se réunira demain mardi 19 janvier, afin d’examiner la correspondance dépêchée dimanche par le chef du gouvernement au parlement, laquelle inclut la liste des ministres proposés. Mechichi demande la tenue d’une plénière de vote de confiance, dont la date sera fixée, lors de cette réunion.

Gnetnews