Tunisie : Marouane Abassi dit toute la vérité sur la situation économique

21-05-2021

Le gouverneur de la banque centrale, Marouane Abassi, a plaidé ce vendredi 21 Mai pour « une trêve politique et économique » de 6 mois à une année, pour que l’on puisse avoir de la visibilité, et sortir de cette situation difficile. « Les agences de notation ne vont pas nous pardonner », a-t-il prévenu.

Marouane Abassi a qualifié, lors d’une plénière à l’Assemblée, la situation de difficile et « en même temps, on n’est pas en train de faire face aux problèmes économiques. »

« Lorsqu’on ne produit pas, on risque de ne pas pouvoir manger »

Il a appelé « à relancer l’investissement, l’exportation et la croissance pour qu’il y ait développement », déplorant que « ces trois moteurs de l’économie tunisienne soient touchés ».

« Lorsqu’on ne produit pas et on n’exporte pas, on peut ne pas manger », a-t-il lancé, insistant sur la nécessité de promouvoir l’investissement et l’exportation, deux priorités pressantes.

Le chef de l’Institut d’émission a passé en revue certains indicateurs graves, notamment la baisse du PIB qui en était à -9 % en 2020, alors que les prévisions tablaient sur 3 %, soit une baisse de 12 %. « C’est la première fois qu’un tel repli se produise en Tunisie, hormis en 1962 où le PIB a régressé, mais en des proportions moins aiguës ».

« La pandémie a touché l’économie réelle et l’économie parallèle, et l’Etat devait trouver des ressources, en une courte période, pour faire face à ses répercussions », a-t-il dit, faisant état d’une baisse de 70 % du secteur touristique.

Abassi a évoqué « les décisions difficiles prises au niveau de la BCT depuis 2018 en matière de politique monétaire et de change, ayant permis de maîtriser l’inflation, en en ramenant le taux à 5 %, et à avoir un dinar plus ou moins stable pendant deux ans, entre avril 2019 et avril 2021 ».

Il a évoqué la maitrise du déficit courant, ayant baissé à 6,8 %, contre 11,2 % en 2018.

« L’amélioration des transferts des Tunisiens de l’étranger, ayant atteint des niveaux de 16 à 17 % les quatre premiers mois de cette année, outre la baisse du déficit énergétique et la baisse de l’importation ont permis d’atteindre un déficit raisonnable ».

Et de poursuivre : « les problèmes vont se poser en 2021, car l’importation va reprendre comme avant, signalant que la BCT est en train de travailler avec le ministère du Commerce sur la manière de rationaliser l’importation ».

« Lorsqu’on s’est ouvert en 2011, en important des produits de Chine et de Turquie, les déficits commerciaux se sont creusés, ce qui a eu des répercussions directes sur le déficit courant », a-t-il noté.

« J’en ai marre des discours insensés »

Il a par ailleurs évoqué la dégradation des taux de l’investissement et de l’épargne, sans lesquels, il ne peut y avoir de croissance.

« En 2010, le taux d’épargne était de 20 % et le taux d’investissement de 26 %, aujourd’hui, le taux d’investissement est moins de 12 à 13 % et taux d’épargne entre 6 à 8 %. » Il a cité « les pays concurrents de la région MENA, dont le Maroc, où le taux d’épargne est de 30 %. »

Abassi a appelé à relancer les investissements locaux et étrangers, imputant la baisse des investissements extérieurs à la détérioration du climat des affaires. « Il faut faire attention aux discours qui créent un chaos économique et à ces experts qui viennent sur les plateaux pour présenter des indicateurs erronés, et parlent de faillite, alors que ce n’est pas vrai. J’en ai marre de ces discours insensés » فديت من الكلام الفارغ, « a-t-il lancé.

Il a fait état « d’opportunités importantes, en termes de relocalisation de l’investissement au niveau de la méditerranée, et de rebond de croissance de 5 à 6 % en Europe, mais on ne va pas pouvoir en profiter, en l’état actuel. »

Selon ses dires, « la BCT poursuit deux objectifs majeurs : la maîtrise de l’inflation et la stabilité financière ».
« La maitrise de l’inflation est la responsabilité de tous, lorsqu’on donne de l’argent sans contrepartie économique, on crée l’inflation », a-t-il prévenu.

Le gouverneur de la banque centrale a appelé à exploiter les potentialités dans le secteur du phosphate, l’investissement dans les secteurs du gaz et du pétrole, ainsi que des relations avec la Libye et l’Algérie, pour permettre à l’économie de se redresser.

Gnetnews