Le CREDIF rend hommage aux femmes tunisiennes de l’époque coloniale

10-03-2020

Le Centre de recherche, d’études, de documentation et d’information sur la femme (CREDIF), a rendu hommage hier lundi, aux militantes tunisiennes de l’époque coloniale, et cela lors d’un séminaire scientifique sur « Les expériences des luttes des femmes en Tunisie au cours du XXème siècle, tenu à l’occasion  de la journée internationale des femmes célébrée le 08 mars.

La romancière et biographe, Sayda Ben Salem, a présenté à cet égard, son témoignage sur les combats politiques et sociaux menés par l’ancienne militante et première vice-présidente de l’Union nationale des femmes de Tunisie (UNFT), Cherifa Dali Saadaoui (1946-1956).

Il s’agit de la veuve du syndicaliste Hassen Saadaoui. Cette militante était active durant la colonisation française en Tunisie. C’est la première femme tunisienne qui a représenté le pays dans le premier congrès international pour la femme tenu à Berlin en 1950.

« Le syndicaliste Hassan Saadaoui a tenu à ce qu’elle y participe, en portant son « sefseri », habit traditionnelle des femmes à cette époque, et en tenant à la main le drapeau tunisien. Sa photo prise par les médias à l’aéroport de Berlin, a fait la une de la presse locale… », a rapporté la romancière.

Cette  militante a exprimé, dans une interview,  sa gratitude envers son époux, grâce à qui, elle a reçu une éducation à domicile, et puis  devenue militante progressiste, à une époque où les hommes préféraient ramener leurs femmes  à une maison de « Maalma », pour apprendre la borderie…».

« Mariée mineure à l’âge de 14 ans à un quadragénaire, ayant trois enfants avant l’âge de 19 ans, paralysée juste après son troisième bébé, Cherifa Saadaoui a relevé tous les défis pour devenir militante progressiste dans les années 50 ».

« L’épanouissement de la femme, la mère et l’épouse, est le secret pour un foyer heureux. Hassen Saadaoui était conscient de l’importance du bonheur de son épouse, Cherifa Dali », a rapporté la romancière.  

D’autre part, la chercheuse Faten Bouchrara a rendu hommage à d’autres résistantes tunisiennes juives, au cours de l’occupation allemande de la Tunisie (1942-1943).

« Ces femmes comme Louise Hanon et Béatrice Slama Saada, appartenaient à des réseaux de renseignements, comme une forme de résistance en dehors des organisations politiques traditionnelles. Ces femmes fournissaient des informations aux armées alliées, ou encore des renseignements à partir de la Tunisie sur les mouvements des troupes. Elles facilitaient également les tâches aux agents d’espionnage anglais, qui faisaient partie des réseaux Mounier, Béranger, Dick Jones, Bazangour et Air Tunisie ».

La chercheuse a évoqué aussi dans son allocution, la militante tunisienne Gisèle Braka, de confession juive d’origine espagnole et qui vivait à Tunis. Cette femme a créé en 1947, la branche tunisienne de l’organisation humanitaire juive française « L’œuvre de secours aux enfants », qui aide principalement des enfants réfugiés juifs ».

« En étant des femmes, donc moins exposées au public que les hommes, ces militantes étaient chargées des missions les plus dangereuses, comme organiser les évasions des détenus. Elles assuraient aussi le ravitaillement des hommes vivant dans la clandestinité. Elles écrivaient également les adresses sur les enveloppes remplies de tracts, et s’occupaient de leur distribution et de leur collage. Ces femmes veillaient également sur les enfants des camarades emprisonnés… ».

La directrice du CREDIF, Najla Allani , a par ailleurs souligné que « ces festivités coïncident avec le trentième anniversaire du CREDIF. Les célébrations ont commencé le 08 mars, et continuent jusqu’à la date du 08 aout, qui correspond à la fête nationale de la femme tunisienne. Il y aura dans ce contexte la commémoration des militantes tunisiennes, sous le slogan « La Tunisie veut, la Tunisie peut ».

 « Quant à la présidente de l’UNFT, Radhia Jerbi, elle annoncé que « l’union  a confié ses documents historiques  à l’archive nationale, afin de permettre à la jeunesse tunisienne d’apprendre sur  les œuvres des militantes tunisiennes dans les  secteurs de la santé, l’économie, la lutte contre l’analphabétisme… »

Ce séminaire « Expériences de luttes féminines en Tunisie du XXème siècle », a été organisé avec le soutien de la fondation Rosa Luxembourg, en collaboration avec le CREDIF et l’UNFT.

Emna Bhira