Agricultrices et ouvrières plus impactées par le covid-19 en Tunisie, selon une étude d’ONU-femmes

09-07-2020

La pandémie du Covid-19 a touché les tranches les plus vulnérables de la société, notamment les femmes agricoles, ouvrières et chômeuses. Ce constat a été révélé par les services à distance, comme le numéro vert 1899 dédié aux femmes, enfants ou séniors ayant subi de la violence. Ces moyens ont été une bouée de sauvetage pour plusieurs victimes durant le confinement.

C’est le constat confirmé par Dr. Ahlem Belhaj, expert humanitaire auprès d’ONU Femmes, lors de la présentation du Policy Brief, une étude autour de la thématique « Les femmes tunisiennes à l’épreuve du Covid-19 : du confinement au déconfinement ».

Impact du Covid-19 sur la violence fondée sur le genre en Tunisie

Le bureau régional d’ONU Femmes pour les Etats arabes a mené une étude pour identifier et répertorier l’impact du Covid-19 sur les attitudes et les pratiques des hommes et des femmes en matière d’égalité des sexes et de violence contre les femmes. Le bureau a lancé une enquête en ligne dans 9 pays du Moyen-Orient en ciblant un minimum de 1000 participants dans chaque pays  (500 hommes et 500 femmes).

En Tunisie, un nombre total de 1508 personnes ont répondu à l’enquête en ligne, dont 502 femmes âgées entre 12 ans et 54 ans.

Dans l’ensemble près de 52% des personnes interrogées ont déclaré avoir été témoins de violences ou connaitre une femme ayant subi un certain type de violence depuis la propagation du Covid-19, avec de légères variations selon le sexe. Un tiers de ces répondants ont indiqué qu’elles ont subi des violences domestiques de la part de leurs conjoints depuis le confinement, ou connaissent une femme qui a vécu ce type d’agression. 32% ont subi des violences domestiques de la part d’un membre de la famille. Et, 35% ont subi un harcèlement sexuel en ligne.

Les résultats suggèrent que le fait d’être témoin ou de connaitre une femme ayant subi des violences sont plus fréquents chez les habitants des zones rurales. A noter aussi que, les répondants ayant un faible niveau d’instruction sont plus enclins que ceux plus instruits à mentionner qu’ils ont été témoins ou connaissent une femme victime de l’un des trois types de violence en question.

Selon ce rapport, les services de sécurité de proximité, comme les forces de l’ordre ou encore les commissariats de police n’étaient pas abordées par ces victimes, en raison des restrictions concernant les déplacements et le transport durant le confinement sanitaire général.

Les résultats ont montré que 26% des participants qui connaissent une femme ayant subi des violences, soit la part de son mari ou d’un membre de sa famille, soit du harcèlement en ligne, ont effectivement cherché de l’aide. Parmi celles qui ont demandé de l’aide, 22% l’ont demandé auprès de la police, 16% auprès d’amis ou de membres de la famille, 10% auprès du tribunal, 8% auprès d’un refuge pour les survivants de la violence et le même pourcentage a sollicité l’aide des ONG.

L’experte auprès d’ONU femme, a par ailleurs rappelé que le nombre des victimes a été neuf fois plus important durant cette période. La ligne 1899 a enregistré plusieurs appels aux secours, mais aussi les associations et ONG actives pour la lutte contre la violence faite aux femmes ont reçu également des demandes de protection, d’accompagnement ou d’abri pour fuir les agressions.

Le phénomène de « Féminisation de la pauvreté » continue

Dr.Belhaj s’est penchée aussi sur le phénomène de la « féminisation de la pauvreté ». Les femmes travaillant sans contrat et sécurité sociale, ne pouvaient plus nourrir leurs familles durant le confinement, sachant que d’habitude ce sont elles qui prennent en charge leurs enfants. Avec l’arrêt de leurs activités  professionnelles, les aides ménagères en particulier se sont retrouvées au chômage. Quant aux femmes agricoles, elles ont continué à travailler, en s’exposant aux accidents de la route…

En effet, les politiques restrictives sur la lutte contre la propagation de la pandémie n’ont pas pris en considération la situation de ces femmes, a déploré Dr.Belhaj.

« Les conventions sur la protection des femmes agricoles et les aides ménagères n’ont pas été activées, a ajouté l’experte auprès d’ONU Femmes, qui a appelé par ailleurs à améliorer l’image de la femme dans les médias, mettre en place des hauts cadres spécialisés dans l’égalité entre les sexes sur les projets de développement… ».

Emna Bhira