FTDES: Hausse de 181 % des protestations en janvier 2025
![](https://news.gnet.tn/wp-content/uploads/2021/10/manif-dimanche-e1633939647649.jpg)
Le mois de janvier 2025 a été marqué par une intensification des mouvements sociaux en Tunisie, avec une hausse spectaculaire de 181 % des protestations par rapport à la même période l’an dernier. Selon le rapport du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES), le nombre de manifestations est passé de 137 en janvier 2024 à 386 en janvier 2025, confirmant la reprise des revendications sociales après une période d’accalmie.
Un retour massif des revendications sociales
Contrairement à l’année précédente, qui avait connu une baisse notable des mouvements sociaux, ce début d’année enregistre une recrudescence des protestations. Le rapport du FTDES souligne que cette dynamique a été amorcée dès le dernier trimestre de 2024 et qu’elle s’est amplifiée avec le début de l’année 2025.
Les revendications portent principalement sur des questions liées à l’emploi et aux conditions de travail. Ainsi, 65 % des mouvements observés concernent la régularisation des situations professionnelles, le droit au recrutement, l’amélioration des conditions de travail, le paiement des salaires en retard et l’application d’accords précédemment conclus mais restés lettre morte.
Dans ce contexte, les décisions du gouvernement, notamment celles relatives à la régularisation des enseignants suppléants et des ouvriers de chantiers, ont suscité une vague de mobilisations dans d’autres secteurs aux situations similaires. Parmi eux, les éducateurs contractuels du ministère de l’Éducation ont entamé un sit-in à la mi-janvier, toujours en cours en février. D’autres catégories professionnelles, comme les employés du Centre national pour la promotion des personnes handicapées, les travailleurs du secteur agricole et les agents sous contrat au ministère de l’Intérieur, ont également intensifié leurs actions.
En parallèle, les diplômés chômeurs sont revenus sur le devant de la scène en organisant des manifestations régionales dans plusieurs gouvernorats.
Des revendications élargies aux services publics et aux besoins de base
Les tensions sociales ne se limitent pas aux questions d’emploi. Plusieurs manifestations ont été observées pour exiger l’amélioration des services publics, notamment la distribution d’eau potable, l’accès à l’électricité et au gaz, l’entretien des routes, la gestion des déchets et le renforcement des infrastructures éducatives et sanitaires.
La pénurie de gaz domestique, survenue en pleine vague de froid, a également déclenché des manifestations dans plusieurs régions, les citoyens exprimant leur colère face à la difficulté d’accéder à ce produit de première nécessité.
Les mobilisations en soutien à la cause palestinienne et aux prisonniers politiques
En parallèle des revendications socio-économiques, janvier 2025 a aussi été marqué par des mobilisations en soutien au peuple palestinien, notamment à la suite de l’accord de cessez-le-feu à Gaza.
Le rapport du FTDES met également en lumière des protestations réclamant la libération des prisonniers d’opinion et des détenus pour leurs activités politiques. Parmi les événements marquants, l’ancienne présidente de l’Instance Vérité et Dignité, Sihem Ben Sedrine, a observé une grève de la faim pendant 16 jours pour dénoncer son incarcération prolongée, qu’elle considère comme une détention arbitraire.
Un mouvement social ancré dans la capitale et les régions intérieures
Tunis demeure l’épicentre des contestations avec 112 manifestations recensées, suivie par les gouvernorats de Jendouba (39), Gafsa (34), Tataouine (31), Kairouan (21), Kasserine (18) et Bizerte (16). Des mobilisations ont également été observées à Sousse, Siliana, Mahdia et Sidi Bouzid.
Le rapport souligne l’implication des deux sexes dans les protestations, avec 297 manifestations réunissant hommes et femmes, tandis que 62 mouvements étaient exclusivement masculins et 20 exclusivement féminins.
Une évolution des modes de protestation
Si les réseaux sociaux restent un outil de mobilisation, leur utilisation comme principal cadre de contestation a diminué en janvier 2025. Seulement 104 protestations ont été menées via des appels médiatiques, des pétitions ou des déclarations publiques, contre une majorité d’actions sur le terrain.
Les sit-in (50), les grèves (44), les grèves de la faim (17) et les blocages d’activités (13) ont été les formes de mobilisation les plus fréquentes. À cela s’ajoutent huit marches vers la capitale, six manifestations pacifiques, ainsi que cinq journées de « colère » et quatre cas de brûlage de pneus.
Une recrudescence des suicides et tentatives de suicide
Par ailleurs, le rapport du FTDES met en garde contre une hausse des cas de suicide et de tentatives de suicide en janvier 2025. Douze cas ont été recensés, dont huit ayant conduit à la mort.
Les jeunes sont les plus touchés par ce phénomène, les élèves représentant la moitié des cas enregistrés. Le recours à l’auto-immolation (six cas), l’ingestion de médicaments (trois cas) et la pendaison (trois cas) sont les méthodes les plus fréquentes.
Sidi Bouzid (4 cas) et Kairouan (3 cas) figurent parmi les régions les plus concernées, suivies par Tunis, Ben Arous, Kasserine et le Kef. Le rapport insiste sur la nécessité d’une prise en charge sérieuse de cette problématique par les autorités compétentes.
Gnetnews