Tunisie : L’habit traditionnel traverse les époques, se modernise et est vecteur d’identité !

16-03-2023

Le 16 mars en Tunisie, marque chaque année, la journée nationale de l’Habit Traditionnel. Une fête devenue au fil des années un événement incontournable notamment dans les écoles, où les élèves sont appelés à célébrer ce patrimoine riche et diversifié.

Longtemps cantonné aux cérémonies religieuses ou de mariage, l’habit traditionnel tunisien revient en force grâce à des créateurs qui ont remis au goût du jour, Jebbas, Chechias, Farmlas, Dengris ou encore burnous, pour en faire des accessoires de mode pouvant se porter au quotidien renforçant, par la même occasion, l’identité tunisienne forte de sa diversité culturelle.

La Jebba: un savoir-faire ancestral !

La Jebba tunisienne est la pièce centrale du costume traditionnel tunisien et est très répandue dans tout le pays. Elle est souvent portée par les hommes Tunisiens lors de fêtes religieuses, de cérémonies de mariage ou de circoncision. Il existe plusieurs modèles de Jebba, qui varient en fonction du tissu comme le lin (Kamraya), la laine (Souf), le Ftoul, la soie blanche (Harir) et même la couleur verte (Karmasoud). La broderie, rappelant le style andalou, ne peut se faire que par des artisans qui maîtrisent cet art du tissage à la main en utilisant des outils spécifiques et différents types d’aiguilles à coudre. Un travail minutieux, nécessitant de nombreuses heures de travail.

Mais depuis plusieurs années, les stylistes tunisiens osent la couleur, ainsi, on peut trouver des Jebbas roses, bleues ou encore jaunes, prisées notamment par les artistes qui ont été parmi les premiers à s’exposer avec dans les médias.

Par ailleurs, la Jebba a donné naissance également à des costumes sous forme de vestes et de pantalons qui sont dans le même style. Ils sont souvent portés lors des mariages civils ou lors de « l’Outeya » de la future mariée.

La Chéchia : aussi bien pour les hommes que les femmes

La chechia se positionne surement comme étant l’un des emblèmes de l’habit traditionnel tunisien. Elle est souvent fabriquée à partir de laine rouge et se caractérise par sa forme ronde et plate avec un petit pompon au sommet. Un nom de souk y a même été dédié à la Médina de Tunis (El Chaouachine).

Elle est souvent portée par les petits garçons lors de la cérémonie de la circoncision. Elle a également une signification historique et culturelle en Tunisie, ayant été portée par les soldats tunisiens pendant la période de la colonisation française.

Aujourd’hui, la Chechia est devenue un symbole de l’identité tunisienne. De nombreuses personnes de la jeune génération n’hésitent pas à arborer la Chéchia et là aussi, une nouvelle tendance est née autour de cet accessoire. En effet, qui ne connait pas les t-shirt dont le motif principal est une chéchia et une moustache? Depuis quelques années ces articles se voient dans tous les souks et magasins afin d’agrémenter un style décontracté.

Traditionnellement réservée à la gente masculine, de nouveaux modèles circulent désormais pour les femmes avec des couleurs telles que le vert ou le jaune.

Le Burnous : Un vêtement venu du Sud

Le Burnous est un manteau sans manches à capuche, fait de laine, qui était traditionnellement porté par les hommes Berbères, Amazigh, en Afrique au début du XIXe siècle. Dès 1831, les femmes ont commencé à adopter ce vêtement traditionnel, qui était initialement fabriqué à partir d’une étoffe de poils de chameau blanc avec un capuchon froncé garni de franges ou de glands.

Aujourd’hui, il inspire énormément les créateurs de mode et est souvent confectionné en cachemire, en taffetas ou en laine portés en guise d’ornement pour des robes de soirées ou de mariées.

Merioul Fadhila : le pull de nos grands-mère devenu fashion !

Qui n’a pas vu sa mère ou sa grand-mère porter un Merioul Fadhila ? L’histoire raconte qu’un artisan juif tunisien aurait fabriqué avec amour un pull en coton pour sa bien-aimée avant la Seconde Guerre mondiale. Cette femme n’était autre que Fadhila Khetmi, une oudiste passionnée de théâtre, de danse et de chant, qui était la fille de Nesriye Frawlou, une chanteuse et danseuse turque renommée qui se produisait dans les « Kafichantas » (cafés-chantants) de Tunis. Elle fut la première femme tunisienne à créer en 1928, une troupe théâtrale.

Il fut ensuite porté par nos aïeux sous une « fouta w blousa », afin de couvrir les épaules et les bras.

De nos jours, le Merioul Fadhila est devenu une pièce forte de la mode Tunisienne, dont le motif très distinct a inspiré les créateurs , donnant même naissance à une marque et une boutique entièrement dédié. On peut ainsi trouver, en plus des pulls, des jupes, des chemises ou encore des maillots de bain.

La tendance actuelle est de porter un Merioul Fadhila sur une jupe ou un jean.

Le Dengri: de la tenue d’ouvrier au look branché

C’est sans aucun doute l’habit qui a traversé toutes les époques et les générations. Le dengri, qui était à l’origine un bleu de travail porté par les ouvriers maoïstes, est arrivé en Tunisie il y a plus d’un demi-siècle. Cette veste en coton bleu de Chine est dotée d’un col claudine et de boutons chinois, et est souvent associée à un pantalon chinois de la même couleur.

Autrefois attribué comme uniforme pour les marins et les travailleurs, le dengri est devenu aujourd’hui un symbole de style et donne un look branché à beaucoup de Tunisiens. Et ce grâce encore une fois à la créativité des stylistes qui n’ont pas hésité à customiser notamment les vestes avec des motifs et des couleurs parfois très vives arborés fièrement aussi bien par les hommes que les femmes. 

Ces exemples nous montrent que la culture vestimentaire des Tunisiens est finalement restée ancrée, traversant les époques sans aucune égratignure et se régénérant sans cesse.

Ains, l’habit traditionnel n’est plus aujourd’hui l’acabit d’une simple journée nationale… Il marque au fer rouge la fierté quotidienne de l’identité tunisienne, surtout dans la jeune génération.

Wissal Ayadi