Une partie du monde produit, et une autre consomme, une réalité confirmée par la crise (expert)

« La Tunisie a été classée 61ème mondialement, selon l’indice de la performance logistique. En 2020, elle occupe la 110ème place. Pourtant, la négligence en termes de logistique, la qualité de l’infrastructure, la rapidité des livraisons à travers le transport maritime, aérien, et la douane, figurent parmi les conditions les plus importantes pour les pays partenaires.
C’est le constat révélé par l’expert en économique, Karim Ben Kahla, lors d’un webinar organisé par le forum tunisien pour les droits économiques et sociaux sur « l’impact de la pandémie du Covid-19 sur les agriculteurs et les consommateurs. »
L’universitaire a souligné que ce n’est plus la distance uniquement qui décide de la relocalisation des marchés de sous-traitance. Il y a le risque d’approvisionnement qui est l’un des facteurs déterminants.
Aussi la question des grands transporteurs qui exercent un monopole sur les marchés internationaux. Il s’y ajoute l’indice de la pollution environnementale et la corruption qui sont montés en puissance, explique-t-il.
Concernant l’impact du Covid-19 sur le commerce international, il a indiqué que les sociétés internationales agricoles ont ramé pour maintenir leurs activités.
« Cela a engendré l’ingérence de plusieurs intervenants non spécialisés créant ainsi une complexité des chaines de base de production. Cette crise sanitaire a par ailleurs, démontré qu’il y a une partie du monde qui produit et une autre qui consomme, et a ainsi imposé de nouveaux critères réglant le commerce international ».
« Des conventions économiques colonialistes »
Torkia Chaibi de l’association « Un million de femmes rurales », a évoqué les accords non équitables d’exportation que la Tunisie a signée avec les pays occidentaux.
Selon elle, la Tunisie ne sera jamais indépendante à cause des conventions internationales colonialistes qui ne servent que les intérêts des grandes puissances mondiales. « D’ailleurs, certaines clauses de ces contrats, permettent aux entrepreneurs étrangers de s’approprier les terres agricoles tunisiennes », déplore-t-elle.
« Ce sont des accords antipatriotiques. Ce genre d’échange économique ne fait que plonger le pays dans les dettes. Le secteur agricole n’a pas fait preuve d’une grande insertion professionnelle des chômeurs, et les investisseurs continuent à transférer leurs gains en devise, à l’étranger sans pour autant apporter de la valeur ajoutée au pays. ».
D’autre part, l’activiste Turkia Chaibi a parlé de l’impact de l’utilisation des céréales génétiquement modifiés sur la qualité de la terre. « La Tunisie importe 70% de ses graines, des Etats-Unis et de l’Europe. Ces puissances économiques imposent l’utilisation des pesticides et engrais des grands monopoles ».
La stigmatisation des petits agriculteurs
L’activiste à l’Observatoire de la souveraineté alimentaire et de l’environnement, Aymen Amayed, a rappelé que les petits agriculteurs sont eux qui alimentent les marchés locaux en Tunisie, dans ce contexte de crise sanitaire.
« Pourtant, ces travailleurs figurent parmi les premiers sinistrés du Covid-19. Le manque de moyens de production et de transport, les a mis dans la difficulté de travailler avec les restrictions préventives liées au confinement.
Quant à la pénurie des céréales que vit le pays depuis un moment, elle est due à nos exportations massives qui s’élèvent à plus de 50%, sachant que la Tunisie, figure parmi les 142 pays du tiers monde qui continuent à exporter leurs productions durant le confinement, conclut-il.
« Les importations de la Tunisie continuent, la preuve plusieurs légumes et fruits comme le Kiwi, l’ananas et d’autres produits non locaux sont toujours disponibles dans les grandes surfaces, et l’alimentation de base semble être en revanche, en rupture… ».
Emna Bhira