Tunisie : Ces créateurs qui font le bonheur des amateurs de la mode !

11-02-2022

Dans un monde qui attache beaucoup de crédit à l’apparence, nous avons souvent tendance à juger une personne sur sa mine, son allure et ses vêtements. Une simple tenue pourrait résumer une manière de penser d’un individu, son appartenance sociale et son état d’esprit, voire ses émotions. Cette même tenue crée une atmosphère, nous inspire parfois et peut jouer sur notre humeur. La mode vestimentaire, est ainsi un véritable enjeu pour les clients qui attribuent une place prépondérante aux tendances…

En Tunisie, les jeunes et les femmes, en particulier, sont les plus adeptes de la mode, et donc à la consommation de vêtements. Envahies par les publicités de marques de vêtements locales et étrangères, qui défilent sur les réseaux sociaux, cette clientèle dépense amplement en habillement…Fashion victimes ou acheteuses compulsives, ces dernières, malgré la crise économique et la détérioration du pouvoir d’achat, ne se privent pas du shopping ! Incapables de résister à une évolution vestimentaire, elles sont conduites dans une spirale de surenchères de marques… Mais à quel prix ?

La mode se limite-t-elle aux classes aisées, ou pourrait-on la suivre, même moyennant de petits budgets, suffit-il, le cas échéant, d’avoir bon goût et astuces ?

Des créateurs de mode et stylistes Tunisiens, ont accepté de répondre aux questions de Gnetnews.

Se sentir bien dans sa peau

D’après Imen Ben Sghair, la créatrice de la marque « Hwita » lancée depuis 4 ans et, spécialisée en habillement pour femmes, sa clientèle n’hésite pas à mettre le paquet pour acheter leur coup de cœur. « Les Tunisiennes ont confirmé ainsi leur intérêt pour la mode, les tendances dont le but ultime est de se sentir bien dans leur peau, tout en soignant leur image… » .

Quant aux petites bourses, elles optent pour des achats moins onéreux, d’articles en vogue également. « C’est l’avantage qu’offre la marque; tous les budgets peuvent y trouver leur bonheur ! Sinon, nous proposons aussi les paiements par facilités », dit-elle.

La créatrice de mode a aussi souligné que sa clientèle est composée de femmes issues de toutes les tranches d’âges, jeunes et moins jeunes, femmes actives et mamans, des séniors également…Qu’elles soient aisées ou avec un budget restreint, on essaie de toutes les satisfaire, avec des articles abordables. D’ailleurs, la fourchette de prix va de 70 à 350 dinars.

La propriétaire  a évoqué aussi l’effet  de l’influence des instagrameuses, sur les consommatrices. « Une seule publication par ces influenceuses portant une de nos créations sur leurs comptes Instagram, et l’affluence pourrait tripler en une journée, et la demande peut éventuellement exploser…Ces encouragements pour la consommation tunisienne bien qu’elle ait un apport positif pour l’enseigne,  poussent par ailleurs, à la surconsommation », souligne-t-elle. « Ces personnes sont suivies par des milliers de consommatrices, qui leur font confiance. Donc une simple recommandation de leur part, pourrait booster les commandes ».

Pourtant, acheter les pièces d’un créateur de mode n’est certes pas à la portée de tout le monde. Car, le cout de création est plus élevé quand il s’agit de pièces travaillées artisanalement, ou encore brodées, dont toute une équipe d’artisans y a contribué. Mais, vu la conjoncture actuelle, subie par le secteur de textile et les consommateurs également, nous avons opté pour la stratégie d’adoucissement des tarifs. Au lieu de vendre en 15 jours, seulement une pièce de 800 dt, Hwita essaye de prendre en considération le niveau de vie du client, en variant les étiquettes….», explique la styliste.

Imen Ben Sghaier-Créatrice de la marque Hwita

La mode n’est pas une question d’argent mais de goût

Nous avons aussi contacté Salma Ahres, la créatrice de la marque « Flicka&Flowka », spécialisée en maroquinerie. Un savoir-faire transmis de génération en génération dans sa famille, et qu’elle a, elle-même, hérité. « L’avantage que Flicka&Flowka » propose, est de pouvoir personnaliser ses chaussures, en choisissant les couleurs, la matière et le modèle, qui conviendraient parfaitement aux gouts des clientes. C’est un petit luxe ayant fait la notoriété de la marque », a commenté Salma.

Cette jeune créatrice a souligné aussi qu’à travers ses designs indémodables, elle ne vise pas la masse. Au contraire, elle travaille sur une niche composée de femmes actives et de mamans, qui valorisent le Hand Made, et qui souhaitent investir dans un achat plutôt rationalisé,  de souliers en cuir des grandes marques recyclées, dont l’assemblage se fait en Tunisie.

Pour cette entrepreneuse, la mode est éphémère, le plus important est de miser sur le confort et la qualité.

 Pour la créatrice, qui vend ses articles de 80 à 180 dt, être à la mode n’est pas une question d’argent mais de gout.     « Les Tunisiennes conscientes de cette astuce, font de leur mieux pour combiner des vêtements de luxe avec d’autres à bas prix, ou de deuxième main (dépôt vente ou fripe), pour créer un ensemble cohérent, et qui va avec les tendances actuelles…En plus, il existe aussi de petites enseignes tunisiennes de prêt à porter, qui ont réussi à démocratiser la mode. S’habiller au gout du jour, n’est plus, de ce fait, consacré à une tranche sociale aisée… », conclut-elle.

Créations Flicka&Flowka

Investir dans la mode durable au lieu de la Fast Fashion

Pour les créatrices de Boho Chic, Meriem Chelha et Sarra Gadhoum, il existe une large différence entre acheter de chez un créateur ou d’un magasin de vêtements fabriqués industriellement.

« Un produit de designer est une valeur sure, qui ne se démode pas. Derrière chacune de leurs pièces se cache une histoire, et pas moins de 2 semaines  de conception et de recherche d’inspiration. Un article fini équivaut parfois à 72h de broderie, et de travail acharné de choix de matières, tissus, textures, couleurs et négociations avec les fournisseurs. D’où la différence des prix entre un produit destiné à la consommation de masse des enseignes de mode à bas prix et, un produit qui s’adresse à une infime partie d’acheteurs exigeants, précommandé ou dans des stocks limités…

D’après ces designers, les deux fabricants proposent en fin de compte des vêtements tendance, mais l’une mise sur la mode durable qui reste toujours actuelle, et l’autre vise la Fast Fashion, voire une mode jetable, fabriquée en des temps records avec des couts réduits pour rester compétitifs, mais qui se démode du jour au lendemain…

Robe Chemise créée par Boho Chic

D’autres alternatives pour rester IN sans se ruiner

Ces créatrices ont été unanimes sur une question : la mode n’est pas consacrée aux classes aisées. Ce sont les produits de grandes marques qui sont inaccessibles, et de créateurs internationaux et de maisons de haute couture…En revanche, porter une tenue de designers, se distinguer et avoir une garde-robe bien remplie, est à la portée de chacun…

 En effet, avec l’existence de la fripe, les dépôts-vente, et les applications téléphones qui vendent les vêtements de seconde main, un large choix vestimentaire se présente devant les Tunisiens.

En effet, acheter une tenue créée par une maison de haute couture, ou un sac de grandes marques internationales ou de créateurs de renommée est désormais à la portée. Les personnes aisées cèdent leurs vêtements à la moitié du prix et parfois moins, pour les vendre dans des dépôts vente, devenus des adresses du luxe à petit prix, très sollicités par la clientèle.

 Ces boutiques très en vogue, fréquentée par les Fashionistas ont su démocratiser le haut de gamme. Avec des facilités de paiement également et un service après-vente, ces nouveaux commerces gagnent du terrain. « Le problème c’est la prolifération de la contrefaçon. Malgré les prix alléchants de ces dépôts, les clients les plus frileux demeurent réticents et ont peur de dépenser des milliers de dinars pour un article qui pourrait s’avérer faux et sans valeur», a dénoncé Imen Sghaier.

La fripe reste dans ce cas la meilleure alternative pour les amateurs des bonnes affaires. Avec un peu de patience et de chance, et en bien fouillant dans les étals, on peut tomber sur des pièces qui valent parfois une petite fortune…

Néanmoins, acheter de seconde-main, contribue aussi à lutter contre la surconsommation, et à diminuer les déchets laissés par les consommateurs qui jettent désormais 2 fois plus leurs vêtements pour en acheter d’autres…Opter pour le déjà utilisé, est un engagement aussi pour contourner le fléau écologique engendré par les usines textile, qui utilisent des colorants toxiques et pesticides et exploitent une main d’œuvre, travaillant dans des conditions inhumaines.

Emna Bhira