La Tunisie face à l’urgence de la transition écologique, imposée par le Coronavirus

09-03-2021

Le coronavirus a éveillé les consciences des Etats du monde entier quant à l’urgence d’un nouveau modèle économique plus vert et plus résilient. La Tunisie n’est pas en reste, et compte s’adapter aux exigences imposées par cette crise, et son effet accélérateur, pour concrétiser ses ambitions en matière de transition écologique.

C’est dans ce cadre qu’en partenariat avec le GIZ, le ministère de l’Environnement a organisé ce mardi une conférence de presse à Tunis, afin de présenter les résultats d’une étude sur les impacts socio-économiques et environnementaux de la pandémie en Tunisie.

Les experts du monde entier sont unanimes… La prochaine crise qui nous attend sera climatique. Si les pays développés ont compris l’enjeu de l’après Covid, en Tunisie malgré des lenteurs, la question écologique commence également à être prise en compte.

L’étude qui compile plusieurs recherches, réalisées tout au long de l’année 2020, montre que cette pandémie a sensiblement changé la face du monde.

Impacts économiques et sociaux

Au niveau mondial, la croissance a subi une perte de 22.000 milliards de dollars, provoquant un accroissement de l’endettement de 24.000 milliards de dollars.

L’arrêt du commerce international a provoqué une baisse de 9,5%. L’étude montre que le coronavirus a fait apparaître 100 millions de nouveaux pauvres à travers la planète.

En Tunisie, la pandémie a crée un ralentissement de la croissance la portant à -8,8% pour l’année 2020.

La dette publique arrive à un degré de soutenabilité qui est de plus en plus compliqué à gérer. Celle ci est passée de 72,2% du PIB en 2019 à 86,6% en 2020, a alerté Adel Ben Youssef, expert économique et auteur de l’étude.

« Les économistes s’accordent à dire que dans une crise d’une telle ampleur, la dette ne doit pas être une barrière », explique l’expert.

Il ajoute que le marché de travail en Tunisie est instable du fait du secteur de l’informel, où travaille 50% de la population. Ces personnes n’ont pas pu bénéficier des aides prévues par l’Etat afin de limiter les dégâts de la crise.

L’étude indique également que le coronavirus a eu un impact négatif sur l’éducation. En effet, le confinement a contraint les élèves à rester suivre les cours depuis chez eux. D’après une étude réalisée par la Banque Mondiale, 61% des ménages tunisiens affirment que leurs enfants n’ont participé à aucune activité éducative durant cette période.

« Cette cassure mène à une baisse de la productivité de ces élèves et étudiants qui aura un impact à long terme sur le marché du travail », souligne M. Ben Youssef.

Impact environnementaux

La crise du Covid-19 a été une aubaine pour l’état de santé de la planète. Ainsi, on a observé dans le monde une baisse de 8% des émissions de gaz à effet de serre (GES). Il s’agit là d’une réussite dans le cadre des accords de Paris sur le climat.

La consommation d’énergie elle a été diminuée de 20%. Pour preuve, l’explosion du nombre de voitures électriques. Une pause écologique qui a permis aussi de bénéficier d’une meilleure qualité de l’air et de la régénération de la biodiversité.

En Tunisie, les GES ont été diminués de 3% en 2020.

En ce qui concerne les déchets, l’étude montre que les Tunisiens ont fait attention au gaspillage, passant de 30% à 10% pendant les mois de confinement, grâce à un changement de comportement

Autre effet positif de la pandémie, l’accélération de la digitalisation. Adel Ben Youssef a mis en avant la montée des services en ligne comme les consultations médicales sur Internet, le développement du e-commerce et la mise en pratique de l’e-Gov permettant de bénéficier de services administratifs en ligne.

Plan de relance

Aujourd’hui, au moment où la population mondiale est en phase de vaccination, la prochaine étape sera celle de la relance économique. Une relance qui doit prendre en compte une nouvelle variable, celle de la transition écologique.

Ainsi dans le monde, 12.000 milliards de dollars ont été consacrés aux plans de relances, dont 4000 milliards seront alloués aux dépenses dites vertes, à l’image du Green Deal en Europe.

Il s’agit là d’une accélération vers l’accomplissement des Accord de Paris sur les changements climatiques.

En Tunisie, il y a eu un plan d’urgence d’une enveloppe de 2,5 milliards de dinars qui a permis de venir en aide la population et aux entreprises impactés pars la pandémie. « Il y a eu un plan d’urgence mais pas de plan de relance », indique Adel ben Youssef.

Recommandations

Cette étude émet un certain nombre de recommandations:

– La première concerne l’urgence d’une transition énergétique afin de mieux contrôler les finances publiques et les émissions de gaz à effet de serre.

– Il faut également accélérer la digitalisation de l’économie en tenant compte de ses impacts sur l’environnement. Investir dans les technologies digitales pour une plus grande efficacité énergétique, engager des initiatives pour développer les villes intelligentes et continuer à élargir le spectre des services en ligne.

– Le secteur agricole devra être repensé afin d’accroître la sécurité alimentaire. Il s’agit là principalement de limiter les importations, de modifier les types de culture en privilégiant les savoir-faire locaux et en raccourcissant les circuits de distribution.

Changer le paradigme dans le secteur du bâtiment et de la construction. L’utilisation de nouveaux matériaux et de nouvelles techniques de construction pro-environnementales pourraient sensiblement faire baisser les factures d’énergies des particuliers.

Favoriser ce qu’on appelle la mobilité douce, en misant sur l’électrique au détriment des moteurs thermiques.

Wissal Ayadi