Tunisie : Quoique tardives, les pluies de Mai sont bénéfiques pour les arbres fruitiers, le fourrage vert….mais

29-05-2023

Les précipitations de ce mois de Mai apparaissent comme une bénédiction, après des mois de sécheresse intense, leur impact est variable sur l’agriculture, cela dépend des récoltes.

L’apparition des pluies tardives pose un défi majeur pour le secteur agricole en Tunisie, perturbant les calendriers de semis et menaçant les récoltes.

Alors que les agriculteurs s’adaptent traditionnellement à des schémas climatiques bien établis, l’arrivée tardive des précipitations perturbe les plans de plantation et compromet les rendements escomptés.

Quelles conséquences ?

Imed Ouadhour est agriculteur et  président du bureau régional du Syndicat des agriculteurs tunisiens (SYNAGRI) de Bizerte. Il nous explique dans un premier temps que les pluies de ces derniers jours n’ont pas d’impact particulier sur les grandes cultures. « Seules les récoltes de colza seront décalées », nous dit-il.

Par contre, il indique que cela a eu des conséquences négatives sur la récolte du foin. « La productivité va être touchée, car beaucoup d’agriculteurs ont procédé à la moisson mais pas encore à la mise en botte. Et quand la pluie tombe dessus, le foin noircit et devient inutilisable », relève  Imed Ouadhour.

A contrario, les précipitations sont une bonne nouvelle pour les exploitants du secteur arboricole, c’est à dire les arbres fruitiers, qui ont besoin de beaucoup d’eau. C’est le cas notamment pour les oliviers, les pêchers, les abricotiers, les mûriers, etc…

Les pluies sont également les bienvenues pour le fourrage vert destiné à l’alimentation animale notamment pour les vaches laitières. « Pour les agriculteurs qui cultivent El Bechna (millet) et El Fassa (Luzerne), les précipitations sont une bénédiction afin qu’ils puissent baisser leur consommation à partir des sondages », indique Imed Ouadhour.

Pour autant, ces pluies ne vont pas régler les problèmes de sécheresse au vu des taux de remplissage des barrages, qui malgré la pluie n’ont pas encore dépassé le stade critique de sécheresse.

« Il faudra s’attendre à des pénuries de fruits et de légumes »

Imed Ouadhour, s’inquiète pour la saison estivale et des pénuries qui seront à prévoir en raison du manque d’eau. A cet égard il exhorte les autorités à revoir la stratégie de distribution des eaux dans les zones irriguées en vue de la saison estivale et notamment pour la culture maraîchère.

En effet, à cause du stress hydrique que subit la Tunisie, les zones irriguées ne perçoivent qu’une petite quantité d’eau pour la culture des fruits et légumes d’été comme la tomate et le piment par exemple.

Sur ce sujet,  Imed Ouadhour s’interroge sur la stratégie menée par les autorités et sur la manière de faire réussir une saison touristique qui s’annonce exceptionnelle dans un moment ou le secteur agricole souffre de nombreux problèmes.

« Il ne faut pas oublier que nous allons avoir une saison touristique exceptionnelle et qu’il va falloir redoubler d’efforts pour éviter les pénuries de certains fruits et légumes. Les agriculteurs ne pourront pas faire face à la demande s’il n’y a pas assez d’eau disponible », souligne le président du SYNAGRI de Bizerte.

« Il faudra s’attendre à une vraie crise cet été dans l’approvisionnement en fruits et légumes. Si la demande dépasse l’offre, les prix augmenteront trop fortement. C’est la raison pour laquelle il faut aider le secteur agricole à cultiver les produits dont nous aurons besoin en prévision de la forte demande pour éviter l’explosion des prix mais également le recours à l’importation en cas de manque », poursuit-il.

Autre perturbation due aux pluies tardives, celles de la réhabilitation des pistes agricoles. « Vu que les pistes agricoles ont été mouillées, les camions, tracteurs et autres engins ne peuvent plus accéder aux parcelles pour les récoltes. Il va donc falloir intervenir une nouvelles fois ce qui va engendrer des coûts supplémentaires pour l’agriculteur », rappelle l’agriculteur.

La Tunisie sera obligée d’importer 100% de ses besoins en céréales

La Tunisie subit une sécheresse depuis quatre années consécutives, avec une situation nouvelle cette fois-ci : la région du nord-ouest, qui est le grenier à blé du pays, est également touchée. Les récoltes de blé et d’orge sont déjà perdues et les agriculteurs tunisiens doutent de leur capacité à produire suffisamment de grains pour les semis de l’année prochaine.

Le réchauffement climatique est directement responsable de cette situation, avec l’absence de pluie en Tunisie, ce qui obligera sans doute l’État à importer l’intégralité de ses besoins en céréales.

« Si nous avions l’habitude d’importer 80% de blé tendre et 50% de blé dur, il faudra s’attendre à avoir recours à l’importation à 100% pour les deux ».

A noter qu’en temps normal les besoins de la Tunisie (semis + consommation + importation), sont de l’ordre de 28 millions de quintaux. Or pour cette année, les prévisions sont de seulement 3 millions…

Wissal Ayadi