Tunisie : L’inflation baisse dans les chiffres, mais est de plus en plus pesante dans le porte-monnaie
Le taux d’inflation se replie à 8,6% contre 9% au mois de septembre. Ce recul, malgré la hausse mensuelle, est dû à la décélération du rythme d’augmentation des prix entre octobre et septembre de cette année comparé à la même période de l’année dernière, rapporte l’Institut National de la Statistique.
Malgré ce recul, le fardeau économique demeure lourd pour de nombreux citoyens. Pour ces derniers, la réalité quotidienne est bien différente. Ils continuent de ressentir les pressions inflationnistes qui pèsent sur leur pouvoir d’achat, laissant planer des inquiétudes quant à leur avenir financier.
Nous nous sommes rendus dans un hypermarché de la banlieue de Tunis afin de prendre connaissance des prix des produits alimentaires de base. Nous avons également recueilli des témoignages de clients.
Huile, Å“ufs et conserves
En ce début du mois de novembre, c’est la cohue dans cet hypermarché de la banlieue nord de Tunis. Une fois le salaire en poche, les Tunisiens se précipitent dans ces magasins pour s’assurer de faire le plein de provision pour le mois.
Toujours selon l’INS, sur un mois, les prix des produits alimentaires augmentent légèrement de 0,1%, à la suite de la hausse des prix des huiles alimentaires de 2,5%, des prix des condiments de 2,6%, des prix des viandes bovines de 1,4% et des prix des viandes ovines de 1,1%.
Dans le rayons des huiles végétales, le bidons de 5 litres se vend entre 22 et 25 dinars, selon les marques. Il s’agit tout de même d’un budget important pour certains Tunisiens qui se plaignent de la hausse constante des prix de ce produit essentiel. A noter que l’huile subventionnée demeure toujours introuvable.
Autre aliments essentiels des cuisines des ménages tunisiens, la tomate concentrée qui a subi une hausse substantielle de son prix. La conserve de 1 kilo est proposée à 4,9DT. Pourtant, dans une déclaration datant de septembre dernier, Bayram Hamada, membre du conseil central de l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche (UTAP) avait indiqué que le coût total de production d’un kilo de tomate concentré était de 3,2 dinars ou 3,3 dinars et que son prix de vente ne savait donc pas dépasser les 4Dt. Force est de constater que ce n’est pas le cas. « Je ne comprend pas pourquoi la tomate est devenue aussi chère. Pourtant, nous en cultivons beaucoup en Tunisie, ce n’est pas normal. Cela devrait faire partie des produits subventionnés », nous dit un client interviewé devant le rayon.
Pour le thon, il est également en hausse. S’il y a quelques semaines la boite de 160 gramme était proposé à un peu plus de 7DT, elle est aujourd’hui affiché à 8,6DT.
Pour un plateau d’oeuf, il faudra compter près de 15DT pour un plateau de 30 alors qu’il y a quelques mois il était possible d’en trouver à 13DT.
Fruits et légumes en baisse
Selon les dernières données de l’INS sur l’inflation, les légumes sont en baisse de 1,9% et les prix des fruits reculent de 0,9%. Dans le rayon frais du supermarché, les prix des légumes se départissent de cette manière:
Tomates: 0,980DT le kilo
Piments: 2,8DT le kilo
Concombre: 3,2 DT le kilo
Oignon blanc: 1,6DT le kilo
Oignon vert: 1,1DT la botte
Laitue: 0,980DT la pièce
Carottes: 2,9DT le kilo
Pomme de terre: 1,4DT le kilo
Pour ce qui est des fruits, l’offre n’est pas abondante. La sécheresse semble être en partie responsable de cette situation. Les fruits de saison comme la grenade est proposée à 2,6DT le kilo, les clémentines à 6,7DT, les citrons à 2,3DT et les pommes se stabilisent à 4,5DT.
Malgré une stabilisation relative des prix des fruits et légumes, certains citoyens se plaignent de l’inflation qui demeure constante selon eux. « Les statistiques peuvent dire ce qu’elles veulent, mais la réalité, c’est que les prix ne cessent d’augmenter. Notre budget familial est de plus en plus tendu, il devient de plus en plus difficile de joindre les deux bouts », nous dit, exaspérée, une ménagère.
L’envol du prix des viandes rouges
Selon l’INS, les prix des viandes bovines ont subi une hausse de 1,4% et ceux des viandes ovines de 1,1%.
Et cela s’en ressent dans au niveau des rayons boucherie avec une hausse spectaculaire de l’agneau et du veau. Le kilo d’agneau est proposé à 45DT et celui du veau à 39DT.
Pou ce qui est de la volaille, si le kilo d’escalope de dinde était jusqu’à présent inférieur à celui du poulet, il a finalement augmenté pour atteindre le même prix, voire plus. Il faudra débourser 18,3DT pour un kilo d’escalope de dinde et 18DT pour le poulet. A noter que le poulet au kilo est affiché à un peu plus de 8DT.
Un retraité venu acheté une petite portion de 300gr témoigne. « On nous dit que les prix ont baissé mais c’est faux. Avant je mangeais de la viande tous les jours, aujourd’hui ce n’est plus le cas. Avec ma pension d’à peine 1000DT, je ne peux plus me le permettre », nous confie-t-il.
Un autre client, quadragénaire quant à lui s’inquiète de l’inflation. « L’inflation peut avoir ralenti, mais mes revenus n’ont pas suivi. Les augmentations salariales sont rares, et cela signifie que je dois constamment ajuster mon mode de vie pour faire face aux coûts croissants. Je m’inquiète de l’avenir et de ma capacité à épargner pour des projets importants », assure-t-il.
Ces témoignages mettent en lumière l’écart entre les statistiques officielles et la réalité ressentie par de nombreux Tunisiens, qui continuent de lutter contre la hausse des prix au quotidien.
Wissal Ayadi