Tunisie : Production des tomates séchées à Tebourba : export, emploi et développement
C’est sur des terres de 8,5 hectares, dans la localité de Laaroussia, à quelques kilomètres de la ville de Tebourba dans le gouvernorat de la Manouba, que la société Tunisia Food Industry a décidé d’implanter son champs destiné à la production de tomates séchées, il y a de cela 18 ans.
A l’horizon, des grandes étendues rouges sans fin avec des centaines de petites mains qui coupent, entreposent et salent des centaines de kilos de tomates… Le tour sous une chaleur presque insupportable.
GnetNews est allé à la rencontre de ces ouvriers et ouvrières qui chaque après-midi entre juin et août travaillent sans relâche afin de subvenir à leur besoin. Une entreprise qui a permis à plusieurs dizaines de familles de vivre et à toute une localité de changer de visage. Reportage
La tomates tunisiennes appréciées pour leur qualité
A notre arrivée, nous rencontrons Mohamed et Zouhaier El Wardi. Ces deux frères originaires de Nafta ont décidé de se lancer dans la production de tomates séchées destinées exclusivement à l’export. D’après Zouheir El Wardi, la tomate tunisienne est très appréciée pour sa qualité. La plupart de la marchandise est destinée au marché italien, dont la recette de la tomate séchée lui est propre.

Les opérations de production sont la réception des tomates provenant d’agriculteurs de toute la Tunisie, le triage selon la qualité, la couleur et le calibre, le lavage, le coupage, le salage et enfin le séchage. « Selon la température extérieure, le séchage dure entre 3 et 5 jours », nous dit Mohamed El Wardi. Mise en cartons ou en barquettes, elles sont ensuite envoyé via camion réfrigéré vers les clients.
Chaque année, ce sont entre 500 et 600 tonnes qui sont envoyés à l’export vers l’Europe pour être par la suite mises en bocaux ou en barquettes et commercialisées. « Certes sur le produit fini il est mentionné le « made in italy », mais la provenance des tomates de Tunisie est également précisé », souligne le gérant.
Les changements climatiques ont affecté la production
Depuis près 4 ans, la Tunisie est lourdement frappée par les changements climatiques, avec l’apparition d’épisodes de longues sécheresse, et de températures extrêmes. Une situation qui a, bien sûr, affecté en premier lieu le secteur agricole, soumis aux aléas de la météo.

« Au fur et à mesure des années, notre période d’activité qui s’étendait de juin à septembre a diminué, pour finalement aujourd’hui s’arrêter à la mi août », souligne Zouheir El Wardi.
Sécheresse et températures extrêmes, un combo qui a engendré la diminution importante du nombre de terrains destinés à la production de tomates et donc à la baisse de production et une à une augmentation sensible des prix.
L’économie sociale et solidaire : un atout majeur pour les zones rurales
La société de tomates séchées n’est pas seulement une activité, c’est aussi des histoires de vies touchantes et qui poussent à nous faire réfléchir sur la valeur du travail, aujourd’hui en déperdition, notamment dans les grandes villes.
Tunisia Food Industry emploie pas moins de 250 saisonniers pour la confection des tomates séchées, dont 80% de femmes.
Il est 17h quand nous arrivons sur l’exploitation des frères El Wardi et le mercure affichait encore les 46°. Une chaleur étouffante, mais qui ne décourage pas ces hommes et ses femmes affluant des localités voisines afin de travailler et subvenir à leur besoins.
Assis à l’ombre, ils et elles attendent la dispatching de chacun sur les longues tables destinées à accueillir la tomate coupée en deux. Chapeaux en paille pour se protéger du soleil, vêtements à manche longue pour éviter les brûlure du sirocco qui soufflent, les saisonniers prennent place.
Sur chaque table, plusieurs kilos de « rouges » attendent d’être découpées dans le sens de la longueur. « Ce n’est pas un geste anodin. Il faut bien couper au milieu pour avoir un séchage uniforme nous », dit Monia saisonnière depuis 12 ans.

Elle nous raconte son parcours de vie. « Je suis arrivée ici et je ne savais pas du tout comment faire. Au fur et à mesure j’ai appris. J’ai débuté par le coupage, puis on m’a désigné pour faire le salage et aujourd’hui, je suis superviseur et formatrice. J’apprends aux nouvelles recrues les secrets du métier », dit elle fièrement. Maman de trois enfants, ce travail lui a permis de financer leurs études et d’offrir à sa fille un mariage digne.
« Il faut que toutes les femmes travaillent pour ne pas être dépendantes de leurs maris. Avoir un salaire à soi c’est une réelle fierté », lance Monia.
Pour chaque table finie, la rémunération est de 20DT. Les plus expérimentés peuvent se faire jusqu’à 80DT par jour. Pour cela, les familles n’hésitent pas à faire contribuer leurs enfants. Sur l’une des tables, nous avons rencontré l’une d’entre elles à l’œuvre avec le concours de sa fille ainée et cadette. « Cela nous permet d’augmenter la cadence de coupe pour faire le maximum de table possible », nous dit-elle.
Depuis l’implantation de l’exploitation à Laaroussia, c’est le visage de toute une localité qui a changé. Des commerces ont vu le jour et les maisons des salariés ont pu être améliorées. « Au delà de l’aspect commercial, nous sommes très fières d’avoir pu contribuer au développement de cette région très rurale », conclut Zouheir El Wardi.
Retrouvez dans la vidéo ci-dessus un reportage vidéo complet.
Wissal Ayadi