Tunisie : Retour des Algériens, les professionnels du tourisme jubilent et se préparent activement au Jour J

08-07-2022

La réouverture des frontières terrestres entre l’Algérie et la Tunisie est enfin officielle et sera effective dès le 15 juillet prochain. Une décision attendue comme le messie par les professionnels du tourisme, qui souffrent de l’absence des touristes algériens ; un marché essentiel pour ce secteur vital à la Tunisie.

A cet égard, le ministre du Tourisme et de l’Artisanat, Mohamed Moez Belhassine, a présidé hier, jeudi  07 juillet 2022, une réunion de coordination en prévision de l’accueil des touristes algériens en Tunisie, afin que cela se passe dans les meilleures conditions possible.

Une bouffée d’oxygène pour les agences

Avant la pandémie de Covid-19, plus de trois millions d’Algériens se rendaient en Tunisie chaque année. Même si tous ne choisissent pas les hôtels pour se loger, mais plutôt des locations d’appartements ou de villas, ils contribuent de manière importante aux recettes touristiques. C’est dire à quel point la réouverture des frontières est une nouvelle qui réjouit les professionnels.

« C’est une véritable bouffée d’oxygène. Nous avons largement poussé pour que les frontières rouvrent…Aujourd’hui nous ne pouvons que nous réjouir », nous dit Ahmed Bettaieb, Président de la fédération tunisienne des agences de voyages (FTAV).

De nombreuses agences travaillent avec des clients algériens qui viennent par voie terrestre en leur proposant des circuits-séjours, souligne-t-il.

« Nous ne voulons pas non plus qu’il y ait un rush de touristes car les structures ne seront pas forcément prêtes. Mais il vaut mieux accueillir un afflux avec des problèmes que rien du tout. Nous avons passé deux ans très difficile », a-t-il ajouté.

Pour autant à seulement 07 jours de la réouverture, les hôteliers et autres corps de métier du tourisme devront très vite se préparer, dans des conditions financières qui ne sont pas évidentes. Le manque de liquidités, et l’absence d’aides financières de l’Etat pour de nouvelles lignes de crédit auprès des banques font qu’aujourd’hui de nombreux établissements n’ont pas pu rouvrir ou remettre leurs équipements à niveau.

« C’est sur qu’il y aura quelques problèmes. Pour les résoudre, nous avons mis en place un réseau de communication entre tous les professionnels du secteur afin de trouver des solutions. ll faut être solidaire pour réussir la saison », souligne Bettaieb.

Il ajoute que « la communication avec les clients est un outil essentiel pour améliorer la qualité du service. Quand il y a des problèmes, il faut parler et expliquer les raisons, sinon cela provoque de véritables perturbations comme on le voit en ce moment avec la compagnie Tunisair ».

Pour le moment, il est encore difficile de savoir si les touristes algériens seront au rendez-vous. Anis Suissi est le Directeur général de la plateforme « ClicnGo », agence leader dans la vente de séjour en B2B, c’est à dire  Business to Business. Ainsi, elle vend ses produits aux agences de voyages et non aux clients directement. Cette agence est également leader sur le marché algérien. Il est plutôt optimiste. « Normalement avec les deux ans de pandémie les Algériens seront de retour en masse car ils aiment beaucoup la Tunisie… En tout cas, nous l’espérons »,  dit-il.

En ce qui concerne les habitudes du client algérien, Anis Suissi affirme qu’ils sont comparables aux clients Tunisiens. « Il faut une bonne chambre, une bonne ambiance, de la bonne nourriture. La seule chose qui le différencie c’est la durée du séjour qui est en moyenne de 5 nuitée pour un algérien contre 2 pour un Tunisien ».

Les touristes Algériens sont des clients sur toute l’année

De son côté, Khaled Fakhfakh, Vice-président de la Fédération Tunisienne de l’hôtellerie affirme que le retour des touristes algériens est une bonne nouvelle pour toute l’année, pas seulement pour la saison estivale.

Contacté par Gnetnews, il explique que l’avantage avec cette clientèle c’est qu’elle se rend dans plusieurs régions de la Tunisie ce qui permet une meilleure répartition des revenus touristiques. « Ils vont à Tabarka, Kairouan, Monastir, Sousse, Hammamet… », nous dit-il.

Fakhfakh insiste surtout sur la zone de Tabarka qui a souffert plus que les autres de la crise sanitaire, car la majorité des touristes sont Tunisiens et Algériens, en l’absence de tours opérateurs dans la région.

« Ils participent au développement des grands et petits commerçants, restaurateurs, artisans, grandes surfaces. De plus, il faut savoir que les Algériens viennent toute l’année, notamment dans le cadre de ce qu’on appelle le tourisme de santé. Donc c’est aussi une bonne nouvelle les établissements de santé », précise le Vice-président de la FTH.

Le retour des touristes algériens va permettre de rééquilibrer les marchés émetteurs pour éviter à la Tunisie « d’être l’otage du marché européen », selon ses propos.

Pour autant, le professionnel ajoute que l’ouverture du ciel Tunisien à l’Open Sky constitue la dernière stratégie pour un tourisme complet et développé. « Nous avons besoin que des compagnies comme Easy Jet ou RayanAir agissent en Tunisie pour ne plus être dépendants des compagnies nationales, internationales ou des TO », conclut le professionnel.

Les premiers signes d’une reprise

Nous avons contacté Mr Rached Krid, Directeur commercial de la chaîne hôtelière Medina Hotels disposant de trois établissements situés dans la zone de Yasmine Hammamet. Ce dernier a bien sûr accueilli cette nouvelle avec joie. Depuis,  l’annonce de la réouverture des frontières avec l’Algérie, c’est le branle-bas de combat afin de satisfaire cette clientèle essentielle à Medina Hotels. 

« Il faut savoir que la saison ne s’annonce pas aussi bonne qu’on le croit et qu’on le relaie dans les médias. Les hôtels ne sont pas tous pleins, à l’exception de quelques hôtels qui travaillent avec le marché européen comme la chaîne TUI ou Iberostar. Donc l’ouverture des frontières des frontières est une vraie bénédiction », nous a-t-il confié. 

Par ailleurs, il explique que le Parc aquatique Carthage Land, qui appartient également au groupe hôtelier est un produit qui travaille essentiellement, pendant la saison estivale, avec la clientèle algérienne, pouvant atteindre les 60%.

Rached Krid est optimiste quant à la venue des touristes algériens cet été. « Ces derniers jours, j’ai réuni tous nos partenaires pour préparer la saison. Parmi eux, les centrales de réservations qui sont spécialisés dans le marché algérien. Ils affirment qu’ils ont eu beaucoup d’appels depuis l’annonce de réouverture des frontières. Les demandes sont beaucoup axées sur les voyages organisés en bus depuis l’Algérie », souligne-t-il.

Il explique également qu’il y a quelques agences de voyages algériennes qui sont déjà en train de réserver des nuitées dans les hôtels. « Le rythme s’intensifie peu à peu. Il y a des signes positifs. Le pic devrait arriver vers le 20 juillet selon les prévisions », a-t-il ajouté.

Par ailleurs, le professionnel fait part de ses craintes concernant certains hôtels en difficulté et qui ont fermé durant ces deux dernières années et qui ont annoncé leur réouverture suite au retour des touristes algériens. « Je me demande comment ils vont faire pour remettre à niveau un hôtel fermé depuis deux ans. Et cela peut nuire à la fidélisation des clients. A cet égard nous avons prévenu nos partenaires contre ce phénomène », conclut Rached Krid.

Wissal Ayadi