Violence contre les enfants : Parents et enseignants sur la sellette, la déconstruction par l’art (Etude)
A cause de la pandémie du Covid-19, la violence perpétrée par les adultes sur les enfants a augmenté. Cela revient à l’état psychologique des parents submergés par les contraintes du contexte sanitaire, qui subissent une pression sans précédent, celle de remplir leurs tâches quotidiennes, tout en prenant leurs précautions contre le virus.
Ce constat est confirmé par les résultats d’une étude sur « la déconstruction de la violence par l’art », menée par l’association « L’art-Rue », en collaboration avec une équipe de pédopsychiatres, psychologues cliniciens et experts de l’enfance, sur un échantillon d’élèves de deux écoles primaires de Tunis (celles de Bab Souika et de rue d’El Marr).
 D’après cette étude, 20% des élèves subissent une violence domestique, 24% souffrent d’anxiété, 20% passent par une dépression, 21.2% vivent dans la pauvreté, dont l’impact du Covid-19 y contribue avec 25%.
 Un autre élément confirme l’augmentation du taux de violence perpétrée sur les enfants, d’une manière générale. Il s’agit du record de signalements de maltraitance enregistré lors du confinement dernier. Durant la période du 6 avril au 2 juillet 2020, le ministère de la femme, de la famille, et des personnes âgées a reçu sur le numéro vert 1809, 4672 dénonciations dont 4664 signalements liés à des problèmes psychologiques. 511 appels avaient pour origine des enfants, dont 316 signalements de violence à leur encontre.
Ces générations futures nées dans une période de crise généralisée subissent de la violence de la part de tous les adultes qui les entourent, notamment des parents et des enseignants, d’après cette étude réalisée par « l’Art-Rue ».
Selon Dr.Zeineb Koubaa, psychologue clinicienne ayant participé à l’élaboration de l’étude, les observateurs placés dans les classes primaires de ces deux écoles, durant 3 ans, ont noté que les parents comme les enseignants, estiment qu’il s’agit d’une violence légitime. Leurs statuts d’éducateurs les autorisent à se permettre de « maltraiter » l’enfant  pour éduquer et améliorer son comportement.
« Alors qu’en réalité, ceci a l’effet contraire. Les élèves éprouvent de plus en plus des changements cognitivo-comportementales, qui virent généralement vers la violence et l’agressivité », a conclu la psychologue clinicienne.
Pour une parentalité positive
L’étude compte aussi un volet expérimental qui vise à introduire l’art comme un tremplin pour canaliser cette violence.
L’objectif de cette équipe de spécialistes est de susciter chez les élèves des changements cognitivo- comportementaux, à travers l’art, tout en impliquant les parents.
« A travers des groupes d’expression avec des enfants, des parents et des enseignants de deux écoles ou cette initiative a été menée, des psychologues de différentes spécialités et des pédopsychiatres ont conduit des échanges oraux, et des ateliers à travers la médiation artistique. Le but, à travers des phases d’observation et d’accompagnement, est de comprendre les mécanismes de la violence et de donner des pistes pour la déconstruire à travers l’art, la parole entre individus, dans l’environnement scolaire et au sein de la cellule familiale, afin de permettre à l’enfant de s’épanouir pleinement ».
 D’autre part, il y a eu la création de groupes d’échange entre parents d’élèves, dont l’objectif est de réfléchir à l’instabilité de leurs enfants, et d’aboutir à une parentalité positive, rompre l’isolement, bénéficier de l’échange sur l’éducation avec les autres parents, se pencher sur les différents conflits conjugaux ou familiaux en liaison avec la violence de leurs enfants, et se positionner par rapport à leur vécu, sans jugement ou contrainte morale…
Le soutien psychologique pour les adultes comme pour les enfants, en cette période de crise a été recommandé par cette équipe d’experts de l’enfance, pourtant ce genre d’initiatives demeure très rares en Tunisie. Les adultes comme les enfants, en état de détresse psychologique, ont besoin d’accompagnement pour améliorer leur état, afin de ne pas tomber dans le cercle vicieux de la violence.
Emna Bhira