Tunisie/ France : « Une nouvelle colonisation et une atteinte à la souveraineté »

15-06-2021

L’Assemblée des représentants du peuple a décidé ce mardi 15 Juin de reporter l’examen de la loi 53/2019 portant approbation d’une convention entre le gouvernement tunisien et le gouvernement français, sur la création d’un bureau d’expertise France, agence française d’expertise technique internationale, en Tunisie.

Cette loi a suscité de vives réactions parmi les députés, qui ont perçu dans l’avènement de ce bureau sur le sol tunisien, « une atteinte à la souveraineté nationale, et une nouvelle colonisation française de la Tunisie ».

La Tunisie a-t-elle besoin de la France pour entrer en Libye ?

La députée Leïla Haddad a dénoncé « une convention très grave, qui porte sur la sureté nationale dans ses acceptions économique, commerciale et sécuritaire, c’est une atteinte à la souveraineté nationale », s’est-elle élevée.

Elle a considéré cette convention, comme étant « une nouvelle colonisation de la Tunisie, et une tentative de la France d’avoir une arrière-cour pour accéder à l’Afrique via la Tunisie ».

La députée Mounira Ayari a critiqué cette convention, se demandant « si la Tunisie a besoin de la France, pour accéder à la Libye ». « L’Egypte va employer 3 millions d’Égyptiens dans la reconstruction de la Libye, devrait-on attendre Expertise France pour employer des Tunisiens en Libye », s’est-elle interrogée, se demandant sur le rôle de la diplomatie tunisienne en matière de contribution à la reconstruction de la Libye.

Elle a par ailleurs posé la question de savoir si la présence de l’AFD qui remonte à 25 ans en Tunisie était évaluée ?

« La Tunisie devra arrêter sa dépendance de la France, qui a une longue expérience en matière de colonisation, d’occupation, qui est contre la civilisation, la religion et qui tente de changer notre mode de vie », a appelé le député Ridha Jaouadi.

« L’Allemagne n’a pas une hostilité et une rancœur contre l’Islam et n’impose pas des restrictions aux musulmans sur son sol, alors que la France ne rate pas une occasion pour humilier les musulmans, » a-t-il déploré, fustigeant « la convention de la honte qui vise à exercer une nouvelle tutelle sur la Tunisie, sur les plans sécuritaire et économique ».

La députée Latifa Habachi a affirmé que son bloc Ennadha « appuie cette convention, et toute convention consolidant le partenariat traditionnel, et donnant lieu à une aide technique dans les domaines de développement ». « La France est le premier partenaire de la Tunisie…ce n’est qu’une convention technique qui comprend des clauses standards », a-t-elle fait constater.

Relations triangulaires Tunisie – France – Libye

Dans sa réponse aux interrogations des députés, le Secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, Mohamed Ali Nafti a affirmé que son ministère « ne permet point que la souveraineté de la Tunisie soit piétinée, et que ses intérêts soient touchés ».

Il a, par ailleurs, souligné que « les relations entre la Tunisie et la France remontent à après l’indépendance, et en sont à un stade avancé à la faveur des visites successives, sur le plan institutionnel ».

« Nos relations sociales, économiques et commerciales avec la France n’ont pas commencé avec cet accord », a-t-il dit.

Le responsable a inscrit cette convention dans « les réformes économiques entamées par la Tunisie, qui sont fondées sur une approche de développement inclusive ». « Nous souhaitons consolider les relations de la Tunisie avec son environnement régional et international et profiter des opportunités d’investissements existantes », a-t-il déclaré.

« L’Union européenne est historiquement et géographiquement, notre premier partenaire, nous devons développer nos relations sur les plan bilatéral et au niveau de l’UE », a-t-il ajouté, signalant que « le bureau Expertise France va développer la coopération avec la France dans le domaine du développement solidaire ».

« Ce bureau est le premier siège d’expertise France, en dehors de l’Hexagone », a-t-il dit.

Le Secrétaire d’Etat a par ailleurs affirmé que « les relations entre la Tunisie et la Libye ont atteint un stade avancé à toutes les époques, mais ce n’est pas une hérésie d’instaurer des relations triangulaires Tunisie – France – Libye ».

« L’accès tuniso-français en Libye constitue un renforcement, un enrichissement et un développement des efforts de la Tunisie pour la construction et le développement de la Libye », a-t-il dit.

Il a, par ailleurs, fait savoir que la Tunisie a conclu des conventions analogues avec les agences de coopération allemande, sud-coréenne, japonaise…ayant donné de bons résultats.

Au sujet de la présence de l’AFD en Tunisie, il a indiqué qu’elle est là depuis 1992 et a travaillé sur 150 projets d’une valeur de 2,5 milliards d’euros.

Gnetnews