La Tunisie n’a jamais connu une période aussi difficile depuis 1962 (Abassi)

05-11-2020

Le gouverneur de la banque centrale de Tunisie, Marouane Abassi, a tenu à démentir, ce jeudi 5 novembre, « les préjugés » sur le financement de l’économie par les banques. « Les chiffres prouvent que le secteur bancaire est en train de soutenir l’économie », a-t-il indiqué, signalant que « des reports de remboursement demandés par les entreprises pendant la crise du coronavirus, ont été accomplis, dans une proportion de 80 % ».

Le problème majeur pour l’économie et l’entreprise économique est le manque de visibilité et de stabilité économique, a-t-il dit, estimant « anormal qu’on est un nouveau gouvernement et un nouveau ministre des Finances tous les trois mois ». Le gouverneur de la BCT a imputé l’amélioration des réserves en devise, à, entre autres, la baisse de l’importation des biens d’équipements, des demi-produit et des produits consommation. Il a appelé à rationaliser l’importation au cours de la prochaine période, à éviter l’importation des produits inutiles, et à consommer Tunisien, à chaque fois que c’est possible.

Croissance de – 20 % au 2ème trimestre 2020 en Tunisie

Revenant sur les répercussions économiques «importantes » de la première période du coronavirus, Marouane Abassi a évoqué un taux de croissance négatif au premier trimestre de 2020 de -3%, et au deuxième trimestre, période de la pandémie et du confinement, de -20 %. La dernière période sera marquée par une croissance négative de -7 a -8 %.

Présent ce matin à l’Assemblée, à l’occasion d’un débat sur la situation économique et financière, le gouverneur a indiqué que la Tunisie n’avait jamais connu une période aussi difficile depuis 1962.

Il a relayé les prévisions du ministère des finances, selon lesquelles, la croissance du PIB serait de -7,2 % à la fin de l’année, « ce serait un chiffre excellent, s’il venait à se réaliser », a-t-il dit.

Il a fait état d’une baisse de l’inflation de 5,4 %, prédisant 5,7 %, en termes d’inflation sur toute l’année. (Voir notre article : Tunisie/ Mechichi à Abassi : « ça ne sert rien de maîtriser l’inflation, si le peuple a faim ! » )

Abaissi a déploré une baisse importante des secteurs du tourisme et du transport aérien à cause de la pandémie. Le tourisme a régressé de 60 %, ce qui équivaut à un manque à gagner de 3 milliards de dinars.

« Le fait que des touristes algériens et libyens, d’habitude au nombre de 3 millions, n’aient pu venir cette année en Tunisie, a impacté les catégories moyennes et les familles démunies » a-t-il indiqué.

Un bémol néanmoins, les transferts des travailleurs à l’étranger en euro et en dollar, sont maintenus au même niveau de l’année dernière.

Accumulation de la dette négative

Le gouverneur de la banque centrale a prévu une hausse du taux de chômage, du fait de la crise sanitaire. Il a prévenu contre « la situation difficile de certaines entreprises qui risquent de perdre leurs employés, si les solutions appropriées ne sont pas trouvées ».

Abassi a appelé à préserver le tissu économique, « celui qu’on a mis des années pour construire, il n’est pas normal qu’il soit dilapidé à cause de la pandémie ».

Il a, par ailleurs, exhorté à accorder un intérêt aux secteurs producteurs et exportateurs, à l’instar de l’huile d’olive, qui aura ramené au pays, d’ici la fin de l’année, des recettes estimées à 2,5 milliards de dinars.

S’agissant du déficit énergétique, le chef de l’Institut d’émission a indiqué que le pays a perdu au cours des dix dernières années, d’importants investissements étrangers en termes de prospection et d’extraction de pétrole. « Le champ Nawara qui devait couvrir une partie de ce déficit, n’est pas en train de fonctionner comme prévu », a-t-il déploré, regrettant « la dégradation du secteur du phosphate qui, naguère, ramenait au pays des recettes estimées à un milliard de dinars/ an ».

Il a, par ailleurs, déploré « la baisse de l’investissement, l’un des leviers de croissance, à 13 % en 2020 alors qu’il était aux alentours de 26 % auparavant, ainsi que la régression de l’épargne à 6 % ». « Un pays qui n’épargne pas ne peut investir et créer des richesses, » a-t-il fait constater.

Il a appelé à restructurer l’économie pour relancer l’investissement. Il a, par ailleurs, mis en garde contre l’accumulation de « la dette négative qui est contractée pour payer la consommation et les salaires, et n’est pas dirigée vers l’investissement. »

Maouane Abassi s’est, de surcroît, arrêté à la baisse de la note souveraine qui a répercussions importantes sur la dette. « Les agences de rating sont en train de nous observer, et la note souveraine de la Tunisie est essentielle pour la prochaine période », a-t-il souligné.

Gnetnews