Tunisie : La rue favorable aux décisions de Kaïs Saïed, mais le spectre de la division plane !

27-07-2021

Ce mardi matin sur l’Avenue Habib Bourguiba, la vie a repris son cours après le chamboulement politique de ces derniers jours. Les décisions prises par Kaïs Saïed dimanche soir ont pourtant secoué le pays. Une situation sans précédent qui alimente toute les conversations.

Aux terrasses des cafés qui ornent l’Avenue, le sujet principal était bien sur la suspension des travaux de l’assemblée et le limogeage du chef du gouvernement, ainsi que la position du parti Ennahdha, principal acteur de cette affaire qui qualifie ces décision de coup d’Etat.

La plupart des personnes que nous avons interrogées soutiennent les décisions prises par le chef de l’Etat. La première raison est celle du ras-le-bol. En effet, déjà que la situation économique et sociale avant la crise sanitaire n’était pas des plus réjouissantes, elle s’est accentuée avec l’aggravation de la pandémie dans le pays.

Notre premier interlocuteur, âgé d’une cinquantaine d’années nous explique que la position prise par Kaïs Saïed est bonne, mais qu’il aurait dû la prendre plus tôt. « Cela fait bien longtemps que le peuple en a marre d’Ennahdha. S’il veut rester un parti comme tous les autres sans problème. Mais il ne faut plus qu’il ait le pouvoir à lui seul », nous dit-il.

Un autre homme nous interpelle, souhaitant s’exprimer. Pour lui, la responsabilité de l’échec de la Tunisie revient au parlement qui selon lui a fait couler le pays. « Ce qu’a fait Kaïs Saïed n’est pas contre la Constitution, bien au contraire. Si l’ARP n’arrive pas à remplir sa mission, alors le président à le droit de suspendre son activité et il en va de même dans le sens inverse. Si le Président de la république ne remplit pas sa tâche aux yeux des parlementaires, ils ont également le droit de le destituer», explique-t-il.

Très vite, une foule de personnes s’est rassemblée autour de notre caméra. La tension est montée donnant lieu à des débats politiques en pleine rue et ce après qu’un autre interlocuteur ait affirmé que l’invocation de l’article 80 de la constitution a été faite de manière inconstitutionnelle. Ce dernier travaille au ministère des Affaires religieuses. « Je ne suis pas pour ou contre Ennahdha. Ils ont fait des erreurs, mais Kaïs Saïed qui est pourtant un homme de loi, a pris des décisions qui vont à l’encontre de la constitution et il n’y  pas que moi qui le dit », crie-t-il à ses détracteurs, ajoutant que tout le monde doit essayer de cohabiter ensemble. « Ce qui s’est passé au Bardo hier est très dangereux. Les gens s’insultent entre eux et se bagarrent…j’ai peur que cela se transforme en guerre civile ».

Un quadragénaire, tenant un drapeau de la Tunisie à la main a bien voulu donner son avis. Selon lui, Kaïs Saïed a répondu aux désirs du peuple. « Je suis très content car le président a écouté le peuple et nous sommes à ses côtés. Sans le peuple, il n’arrivera à rien », souligne-t-il. Il explique par ailleurs, qu’il a le sentiment que depuis dix ans, les tunisiens ont été divisés en clans anti et pour Ennahdha. « J’ai l’espoir que nous redevenions un peuple unis comme nous l’étions avant au nom de la patrie », conclut-t-il.

Le prochaine étape pour Kaïs Saïed sera de nommer un nouveau chef du gouvernement. L’instabilité politique que vit le pays depuis dix ans, ne permet pas d’attendre encore. Ainsi, une des personnes que nous avons interrogé insiste sur le fait que le Chef de l’Etat doit très vite procéder à cette nomination afin de ne pas tomber dans un nouveau cercle instable.

Malgré la joie ambiante, les Tunisiens restent tout de même méfiants. Ils sont nombreux à dire que si Kaïs Saïed faisait marche arrière ou s’il aggravait la situation, ils n’hésiteraient pas à redescendre dans la rue afin de crier leur indignation.

Retrouvez dans la vidéo ci-dessus notre micro-trottoir dédié à la crise politique en Tunisie.

Wissal Ayadi

Crédit photo: Ahmed Zarrouki