Sondage: Régime politique, mode de scrutin… Les Tunisiens attendent des réformes profondes

10-12-2021

Depuis le 25 juillet, la Tunisie est entrée dans une nouvelle ère politique suite aux mesures exceptionnelles prises par Kaïs Saïed. Si depuis, le gouvernement a été formé, la parlement lui reste toujours suspendu.

A une semaine de la fête de la République qui sera célébrée le 17 décembre prochain, les Tunisiens sont dans l’attente des nouvelles annonces du président concernant le tournant politique que prendra la Tunisie: changement de régime et de système électoral seront probablement au coeur de ces annonces.

Afin d’échanger sur la nécessité de conserver un cap démocratique, une débat a été organisé à Tunis, ce jeudi 9 décembre. A l’occasion de la 56ème édition des Rencontres de Tunis, une étude par sondage a été présentée sur la perception du Tunisien du régime politique actuel et du système électoral.

L’étude par sondage a été réalisée par l’institut de sondage Sigma Conseil entre le 3 et le 6 décembre dernier, un échantillon de 1000 personnes venants de tous les gouvernorats.

Scrutin uninominal plutôt que scrutin de liste

Dans un premier temps, elle montre que l’engouement des Tunisiens pour le vote a largement décliné depuis 2011, notamment en ce qui concerne le scrutin législatif. Si en 2011 le taux de participation était situé à 58%, en 2019 il a chuté à 31%.

Mais pour la présidentielle, cette étude montre que c’est le contraire. En effet, en 2014, le taux de participation était de 36% au deuxième tour et qui est passé à 42% lors du scrutin de 2019.

D’après Hassen Zargouni, le directeur général du cabinet Sigma Conseil, ce phénomène montre que les Tunisiens sont plus sensibles à une élection à scrutin uninominal, c’est à dire avec un seul candidat, plutôt qu’à un scrutin de liste.

Une théorie qui se justifie notamment par les chiffres concernant le tourisme parlementaire. De nombreux députés élus sous une étiquette n’ont pas hésité à changer de casquette, voire de bloc parlementaire en cours de mandat. Une pratique qui a mené certains partis à disparaître complètement. « Pour les Tunisiens il s’agit d’une trahison qui est très mal vécue », affirme Zargouni.

Effritement des partis

Le scrutin des législatives est proportionnel. Les 217 sièges sont ainsi pourvus pour cinq ans au scrutin proportionnel plurinominal à listes bloquées. Une fois le décompte des suffrages effectué, la répartition des sièges se fait dans un premier temps sur la base du quotient électoral, puis sur la base du plus fort reste.

D’après Salsabil Klibi, constitutionnalise ce mode de scrutin n’a fait qu’effriter les pouvoirs au sein de l’Assemblée des représentants de peuple et a rendu difficile l’émergence d’une majorité claire.

« Il y a une tension entre le besoin de stabilité politique et la garantie d’une représentation des partis politiques ». Elle indique à cet égard que le principal problème en Tunisie est la fragmentation des institutions élues doublée d’une instabilité de leurs acteurs. Selon elle il faudrait rationaliser le système électoral afin de trouver un point d’équilibre pour gouverner avec de la représentation. « Le choix d’un système électoral a un effet mécanique et psychologique à la fois sur les compétiteurs, à soir les candidats et les électeurs », ajoute-t-elle.

Le Parlement, responsable de tous les maux

Selon l’étude de sondage, 88% des Tunisiens estiment que le pays vit une crise politique majeure, tandis que 66% pensent que la situation politique est médiocre.

Pour autant, la nouvelle donne politique qu’a entraîné le 25 juillet a changé certaines tendances. Si en mars 2021, 93% des sondés ont considéré que la situation politique était mauvaise, en décembre 2021, ce chiffre est passé à 61%.

Quant à la désignation des responsables de cette crise, 36% des personnes sondées ont imputé la responsabilité au Parlement, alors que 27% pensent que c’est la présidence de la République et 23% accusent les partis politiques.

A la question de savoir qui pourrait améliorer la situation en Tunisie, 51% des personnes interrogées font confiance à Kaïs Saïed, vient ensuite l’Armée, la société civile et enfin la présidence du gouvernement.

Changement de régime politique

L’étude de sondage montre que 90% des sondés font confiance au chef de l’Etat contre 4% qui font confiance aux partis et 3.8% au Parlement. Des chiffres qui montrent à quel point le rôle du Parlement a été relégué au dernier plan par les Tunisiens. Se pose ainsi la question du régime politique. La Tunisie se situe dans un régime semi-présidentiel.

Pour les tunisiens interrogés pour le sondage, le régime politique actuel est à l’origine de la situation économique du pays.

« Il y a un réel désir chez les citoyen de réformer le pays », indique Hassen Zargouni. Ainsi 84% sont favorables à la mise en place d’un système présidentiel.

Wissal Ayadi