Africa Solar et ses partenaires font le point sur la réduction de l’empreinte carbone en Tunisie

25-04-2024

Africa Solar (Groupe 3S) et ses partenaires Huawei, Jinko Solar et Green Power Technologies, ont organisé ce jeudi 25 avril 2024, un séminaire présentant les principaux outils administratifs et juridiques pour la réduction de l’empreinte carbone en Tunisie.

Cette rencontre s’est articulée autour du thème : « Réduire l’empreinte carbone pour un avenir durable grâce au photovoltaïque Â». Elle a abordé les dernières solutions innovantes et incitations réglementaires dans le domaine de l’énergie solaire pour réduire l’empreinte carbone, stimuler la croissance économique et assurer un avenir énergétique durable pour les industries et les entreprises tunisiennes.

Quelques chiffres dans le monde et en Tunisie

Les investissements mondiaux dans la transition énergétique à faible émission de carbone ont totalisé 1.8 trillions de dollars en 2023. Ceux alloués aux énergies renouvelables qui comprennent l’éolien, le solaire et les biocarburants ont atteint un nouveau record de 575 millions de dollars la même année.

Pourtant force est de constater que de nombreux efforts restent à faire. En effet, les émissions de CO2 dans le monde ont augmenté de 410 millions de tonnes en 2023.

En ce qui concerne le photovoltaïque, les prévisions des installations mondiales connaîtront une croissance de plus de 40% en 2024 comparé à 2023. Les estimations d’investissements devraient presque tripler entre 2024 et 20230, atteignant en moyenne les 4.8 trillions de dollars pour espérer arriver aux objectifs des zéro émission nette.

En outre, il est important de relever que les 100 premières entreprises dans le monde représentent à elles seules 71% des émissions de CO2. En tête du classement l’on retrouve la Chine avec la société China Coal, en deuxième position la société pétrolière saoudienne Aramco et enfin la Russie avec Gazprom. 

En Tunisie, le bilan d’énergie primaire fait apparaître à la fin septembre 2023 un déficit de 4.4Mtep contre un déficit enregistré à la même période en 2022 de 4.1Mtep. Le taux d’indépendance énergétique, s’est situé à 48% à la fin septembre 2023, en perte de 2% en comparaison avec l’année précédente.

Quant au mix énergétique, il reste bien loin des objectifs puisque la production est dominée par le gaz naturel avec 97% contre seulement 3% pour les énergies renouvelables, et ce malgré un potentiel important notamment dans le domaine du solaire.

Cependant des efforts ont été entrepris dans le photovoltaïque. En 2023, 217MW de toitures photovoltaïques ont été installées dans le secteur industriel. Par ailleurs, 313 autorisations ont été octroyées pour une puissance totale de 92MW dans les secteurs de l’industrie, du tertiaire et de l’agriculture.

Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontière : Gare à la surprise !

Présent lors de la conférence, Abdelhamid Khalfallah, représentant du ministère de l’Industrie, des Mines et de l’Energie indique que beaucoup d’industriels ont adhéré aux énergies renouvelables rappelant que plus de 300 autorisations ont été octroyées. « Le rôle de la STEG et du ministère est de soutenir l’économie nationale. On a tout intérêt à ce que les industries aient leur propre centrale pour améliorer leur compétitivité et faire face à la question de l’emprunte carbone. Nous essayons de lever les barrières pour que tous les industriels soient à la page en 2026 lors de la mise en place du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières », a-t-il souligné.

En effet, depuis 2022, l’Union Européenne a mis un place le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières ou plus communément appelé taxe carbone. A compter de 2026, ce mécanisme obligera les entreprises européennes qui importent des produits polluants, fabriqués hors du continent, à payer une compensation pour les émissions issues de la production de ces produits. Ainsi, les entreprises tunisiennes qui exportent vers l’Europe devront payer une taxe sur les émissions excessives de CO2.

« Il y a urgence à ce que les industriels s’engagent dans le solaire ! » a martelé l’expert en décarbonatation Abderrazak Ben Jamaa. « Il y a une catastrophe qui arrive qui est celle de l’ajustement carbone aux frontières. Même si c’est l’importateur européen qui paiera la taxe en cas de dépassement ce seront en réalité les entreprises tunisiennes qui seront impactées. En effet, faute d’un bilan carbone adéquat, les importateurs n’hésiteront pas à se tourner vers la concurrence », a-t-il prévenu.

Il explique que les industriels ne doivent pas attendre que l’Etat réagisse et que c’est à elles que revient d’inciter l’Etat à trouver des solution extra nationale. « Certes il y a des subventions qui existent mais il y a un problème de communication. Et puis il ne suffit pas de faire un bilan carbone, il faut que celui-ci soit conforme aux normes de décarbonation », souligne l’expert.

« Nous avons simplifié les procédures d’autorisation. Pour les projets de moins de 1MW il n’y a plus besoin d’autorisation. Pour ceux de plus de 1MW les autorisations ne prennent pas plus d’un mois. La rapidité est très importante pour le développement de ce secteur. Il reste des choses à améliorer notamment le financement », ajoute de son côté Abdelhamid Khalfallah.

A cet égard, le gouvernement tunisien a mis en place des subventions et des incitations pour encourager l’installation de panneaux solaires. Ces mesures visent à faciliter l’accès à l’énergie solaire et à promouvoir les énergies renouvelables dans le pays. L’une des principales incitations est le tarif d’achat garanti pour l’électricité photovoltaïque produite. Les producteurs d’énergie solaire peuvent bénéficier d’un prix fixe pour l’électricité qu’ils injectent dans le réseau public, ce qui garantit un retour sur investissement stable et attractif.

De plus, des crédits d’impôt sont disponibles pour les particuliers et les entreprises qui investissent dans des installations photovoltaïques. Ces crédits permettent de réduire le coût initial de l’installation et encouragent ainsi davantage de consommateurs à passer à l’énergie solaire.

Les installateurs demandent l’abolition des droits de douane

Pour le Chambre syndicale des installateurs de photovoltaïque, Ali Kanzari, les réalisations sont en deçà des projections. « Nous avons 300MW réalisés et c’est très peu. Les effets d’annonces sont intéressants mais la réalisation peine à avancer », déplore-t-il.

Il explique que sur le plan réglementaire il y a un problème dans les procédures d’importation. « La Tunisie paye les taxes de douane sur le photovoltaïque les plus élevés dans la région. Si actuellement il est de 10%, le gouvernement a annoncé l’augmentation du droit de douane sur l’importation des capteurs solaires à 30% à partir du 1 er janvier 2025. Nous voulons une taxe à 0% pour être compétitif dans la région », poursuit Kanzari.

En conclusion, le séminaire souligne la nécessité d’une action concertée et immédiate pour promouvoir la transition énergétique en Tunisie. À travers des partenariats dynamiques, des politiques favorables et des incitations appropriées, le pays peut réaliser son potentiel solaire et contribuer efficacement à la lutte mondiale contre le changement climatique, tout en stimulant la croissance économique et en assurant un avenir durable pour les générations à venir.

Wissal Ayadi