Tunisie : Les partis sociaux-démocrates contestent le processus du référendum et ses résultats

27-07-2022

Réunis en coalition, les partis Attayar, Ettakatol, Al-Jamouhouri, le Parti des Travailleurs et le Pôle démocratique moderniste (PDM), ont organisé une conférence de presse ce mercredi 27 juillet, au cours de laquelle, ils ont dénoncé l’organisation et les résultats du Référendum sur la nouvelle Constitution.

Retour à un régime autoritaire

« Le processus qui a été mené par Kaïs Saïed pour l’organisation de ce référendum est la plus grande opération d’escroquerie de toute l’histoire de la Tunisie », a lancé au début de la conférence Ghazi Chaouachi, dirigeant du parti Attayar. Cela a débuté avec la consultation nationale qui n’était, selon lui, qu’un écran de fumée, a-t-il dit. 

« Nous avons ensuite eu l’épisode de la commission, chargée de la rédaction de la constitution menée par Sadok Belaïd pour que finalement ce dernier révèle que la version qu’il a avait proposé n’était pas celle soumise au vote », at-t-il déclaré.

Chaouachi a, par ailleurs, déploré un climat non démocratique avec le retour d’un Etat policier, le comparant celui de l’ère Ben Ali. « En tant que parti d’opposition, nous n’avons pas eu le droit de nous exprimer sur la chaîne nationale Watanya. Il s’agit d’un régime autoritaire qui fonctionne sous la pression et la peur », ajoute le chef de file d’Attayar.

Ce dernier affirme également détenir des preuves d’un financement étranger illégal, ayant permis une propagande en faveur du « oui » au référendum, notamment à travers des campagnes d’affichages diffusées sur les réseaux sociaux. « Nous avons porté plusieurs plaintes auprès du ministère public,  aucune n’a abouti. Nous savons que cela est du à une intervention émanant du ministre de l’Intérieur Taoufik Charfeddine », conclut-il.

Kaïs Saïed est isolé

De son côté, le leader du parti Al-Joumhouri, Issam Chebbi, a fait valoir que le déroulement et l’organisation de ce référendum étaient loin des standards nationaux et internationaux.

Dans ce sens, il dénonce les nombreuses violations concernant le silence électoral qui, selon lui, a été violé en premier lieu par l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE).

« Le jour même du vote, un membre du bureau de l’ISIE, Sami Ben Slama s’est vu refuser l’entrée du centre d’information de l’ISIE du Palais des Congrès », a-t-il précisé.

« Le conseil de l’ISIE a pris la décision de l’empêcher d’accéder au centre», avait alors déclaré à l’agence TAP, Mohamed Tlili Mansri, membre de l’instance, rappelant que le conseil dispose de cette prérogative conformément à l’article 15 de la loi électorale.

Selon Mansri, de graves violations, justificatifs à l’appui, ont été commises par Sami Ben Slama, précisant que cette décision a été prise dans l’attente de celle des parties compétentes de le démettre de ses fonctions. Une décision que conteste la coalition des partis sociaux-démocrates, soulignant qu’il s’agit encore là d’une preuve de la mainmise des autorités sur le déroulement du scrutin.

Par ailleurs, Issam Chebbi a qualifié de « honte », le comportement du président Saïed le soir du référendum. « Il s’est permis d’aller fêter la victoire sur l’Avenue Habib Bourguiba alors que les résultats, même préliminaires, n’avaient pas encore été annoncés.

Revenant sur l’abstention, qui s’élève selon l’ISIE à 65,5 %,  Chebbi a décalé qu’il s’agit là de la preuve irréfutable du refus du peuple de la politique de Kaïs Saïed, appelant ce dernier à la démission. « Au lendemain du référendum, il est clair que Kaïs Saïed s’est réveillé isolé après ce qu’on peut qualifier d’échec cuisant », a considéré le dirigeant d’Al-Joumhouri.

Un président « khalife » aux pouvoirs sans limites

Hamma Hammami, secrétaire général du Parti des Travailleurs se dit ne pas être surpris par les fraudes survenues pendant le vote. « Après le coup d’Etat qu’il a fait, je ne suis pas surpris qu’il falsifie les élections, comme il l’a fait juste avant avec la consultation nationale », a-t-il déclaré.

Si nous étions dans dans un processus démocratique, les résultats de ce référendum auraient du être annulés, a-t-il souligné. « On ne peut pas faire passer une nouvelle constitution avec 3/4 des Tunisiens qui n’ont pas été voté ! ».

« Ce référendum n’a fait qu’ancrer un président « Khalife » aux pouvoirs sans limites », a-t-il conclu.

Wissal Ayadi