Tunisie/ Solidarité : « Les resto d’amour », « Rotaract » « Interact »…pour rendre le sourire aux laissés-pour-compte

10-02-2021

Les actions d’entraide et de solidarité sociale se sont multipliées dans ce contexte pandémique, notamment en mars 2020, lors de la première vague du Covid-19 en Tunisie. Après une importante mobilisation de la société civile et des citoyens, pour venir en aide aux personnes affectées par les ravages économiques de la crise sanitaire, les Tunisiens semblent être moins motivés, subissant ainsi une fatigue pandémique sans précédent…

Manque d’initiatives et d’élan solidaire, inconscience généralisée dû à la fatigue et à une baisse de morale et physique ? Ou sont passés les bénévoles de la société civile, autrefois engagés et préoccupés par le sort des plus démunis, les familles nécessiteuses, les sans domicile fixe (SDF), les femmes dans le besoin et les habitants des zones les plus reculées du pays…

Pour répondre à ces questions, nous nous sommes dirigés vers le président de l’association « Les resto d’amour de l’association universelle », Nizar Khadhhari,  qui continue à travailler avec du cœur, pour venir à l’aide des « sans domicile fixe » (SDF), et cela malgré l’inconscience généralisée.

Il a confirmé que les actions citoyennes étaient, autrefois, plus nombreuses durant la première vague du Covid-19, en mars dernier, car les gens étaient  secoués par le choc qu’a provoqué une telle pandémie. «Ils étaient conscients de la gravité de la situation. S’y ajoute le fait qu’ils, étaient confinés, donc ils avaient du temps libre pour aller au secours de leurs concitoyens en matière d’approvisionnement alimentaire, produits de nettoyage et de prévention », analyse le président de l’association.

Mais ce phénomène s’est estompé petit à petit,  avec la persistance de la pandémie, et le manque de visibilité. Les gens sont lassés et ne prennent plus au sérieux la situation. Ils sont désormais moins mobilisés vu la prorogation du couvre-feu, les restrictions liées aux déplacements…Désormais, les bénévoles qui sont généralement des étudiants ou des personnes actives, n’ont plus le temps pour faire autre chose. En revanche, tout cela n’empêche pas qu’il existe encore des associations qui résistent à cette ambiance morose et qui font de leur mieux pour aider le plus de gens possible à s’en sortir », conclut-il avec une note positive.

Des actions de solidarité malgré les difficultés économiques

Nizar Khadhari a évoqué l’exemple de son association « Les resto d’amour », qui prend en charge les SDF. Selon lui, 95% des dons qui leur sont dédiés proviennent de la générosité des citoyens.

« Tous les jours, nous distribuons jusqu’à 50 plats aux personnes sans abri dans plusieurs régions de la Tunisie, Tunis, Bizerte, Nabeul, Kairouan, Manouba, Ariana…Des volontaires viennent quotidiennement dans nos locaux, pour déposer des plats cuisinés chez eux. Ils ramènent des couvertures également, vêtements, masques de protection, et gels hydroalcooliques…Il existe aussi des restaurants et des Fast Food qui viennent à l’aide des SDF…Ils donnent les restes des plats ou leur préparent spécialement des plats… ».

Malgré les difficultés économiques qu’ils traversent, les Tunisiens semblent avoir toujours le cœur grand, a commenté le président de l’association. « Grâce à eux, nous avons tous les jours, sans exception, de quoi nourrir les SDF ».

En parlant de la logistique que nécessite son travail, Nizar Khadhari nous a expliqué que toutes les nuits les bénévoles font des maraudes auprès des SDF.

« Ils sont des adultes sans emploi retrouvés dans la rue, des femmes expulsées de chez elles pour querelles familiales, des séniors rejetés par leurs proches, des enfants ayant abandonné l’école et ceux qui ont fugué, ou provenant des orphelinats et désormais livrés à eux mêmes après l’âge de 18 ans…D’autres sont des malades mentaux, ou bien des alcooliques, des drogués ou encore des immigrés clandestins rentrés d’Europe et  recherchés par la police. Le point commun entre ces profils, c’est qu’ils sont seuls, sans abri, ni papiers ».

En l’interrogeant sur la possibilité de les réinsérer dans la société, le président de l’association nous a précisé qu’il traite du cas par cas en collaboration avec le SAMU Social et le ministère des affaires locales, afin de les encourager à quitter la rue.

Selon lui, ces collaborations sont appuyées par les dons des Tunisiens. « Nous avons pu louer des studios pour 7 SDF. Ces derniers ont trouvé également du travail. Mais sinon,  nous mettons en priorité la prise en charge des femmes, et cela dans des centres d’encadrement et d’orientation sociale », indique Nizar Khadhari.

Les jeunes bénévoles, les moteurs de l’engagement

 

D’autres associations comme « Rotaract » et « Interact club Tunis Méditerranéen », qui regroupent essentiellement des jeunes, continuent à être au service des collectivités malgré les risques liés à la pandémie. Ces jeunes communiquent souvent avec les dirigeants locaux, pour mener des campagnes de nettoyage, stérilisation et d’aides aux plus démunis dans les régions.

Leurs actions sont désormais orientées. C’est le cas de Rotaract qui, après le succès son action « main dans la main personne n’aura faim », menée en mars dernier durant le confinement, elle a choisi d’adapter ses objectifs avec l’évolution sanitaire. A cet effet, Rotaract collabore avec le ministère de l’Education pour effectuer une campagne de nettoyage nationale.

L’objectif est d’équiper les écoles par des moyens de prévention, tapis stérilisants, gels, masques… Et, les actions sont menées aux gouvernorats de Kasserine, Mehdia, Gabes, Sousse, Monastir, Sfax, et plusieurs quartiers populaires de la capitale, Tunis.

Avec leurs petits moyens,  ces jeunes bénévoles ont pu instaurer une atmosphère favorable à la reprise scolaire, après une suspension des cours qui a duré 10 jours, dans le but de freiner la propagation du virus dans le milieu scolaire.

Quant à l’association Interact, avec ses campagnes « COV’erture-19 » et « un hiver bien au chaud », ils ont pu aider 30 familles de la zone de la Soukra, en leur fournissant de la nourriture, et des couvertures, vêtements… L’idée est simple, avec un simple coup de fil, les jeunes bénévoles se rendent chez-vous pour récupérer tout ce dont vous n’utilisez plus, et qui pourrait être utile pour les autres…

Pour conclure, les actions de solidarité bien qu’elles soient toujours en marche, elles visent une infime partie de la société.

Faut-il peut-être convaincre les citoyens et renforcer leur engagement, afin de mieux gérer la crise sanitaire, notamment avec les dernières indignations des jeunes manifestants, sortis pour dénoncer l’injustice sociale…

Emna Bhira