Tunisie/ Futur gouvernement : Hichem Mechichi tiraillé entre trois positions divergentes mais argumentées

10-08-2020

Le chef du gouvernement désigné, Hichem Mechichi, arrive ce lundi 10 août à mi-chemin des délais constitutionnels qui lui sont impartis pour former un gouvernement, sans qu’une quelconque avancée ne semble émerger de cet énième processus de concertations politiques. Chargé de cette mission le samedi 25 juillet par Kaïs Saïed, Mechichi se heurte à des positions divergentes, voire contradictoires, qui traduisent l’état de délitement et d’effritement politique dont le parlement tunisien est l’une des illustrations.

A l’instar de ceux qui l’ont précédé à cette délicate tâche, l’actuel ministre de l’Intérieur qui est parti pour être propulsé à la tête du gouvernement, n’a pas dérogé à la règle. Prenant ses quartiers, depuis sa désignation, à Dar Dhiaffa à Carthage, Mechichi a reçu le ban et l’arrière-ban du monde politique et civile, tout en se démarquant à travers l’organisation d’une réunion avec les ex-présidents de la république, et les ex-chefs du gouvernement de l’après 14 janvier 2011,  » venus partager avec lui leur expérience » au pouvoir, et lui souffler quelques idées à même de lui permettre de réussir dans la mission ô combien ardue qui l’attend.

Entre un Mohamed Ennaceur qui lui a proposé « d’organiser une conférence nationale de Salut, à même de déboucher sur un plan de sauvetage de la Tunisie » ; un Foued Mebazaâ qui l’a incité à former « un gouvernement d’action où la femme sera bien présente » ; un Youssef Chahed qui lui a recommandé de jouer un rôle, en tant que co-chef de l’exécutif « en vue de réduire les divergences et renforcer la stabilité politique », ou un Hamadi Jebali qui a prôné la formation « d’une instance consultative non forcément partisane à la disposition du gouvernement », les anciens dirigeants n’ont pas lésiné sur les idées pour inspirer et guider leur interlocuteur.

Concilier l’inconciliable

A part le conseil, Hichem Mechichi a reçu les partis politiques et les organisations nationales qui, eux, ont voix, au chapitre quant à la nature même de la prochaine formation gouvernementale.

Et là, il y autant de points de vue qui se sont exprimés, que d’entretiens menés. Les résultats pourraient, néanmoins, être résumés en trois principales positions exprimées par les uns et les autres :

*La première position appelle à un gouvernement de technocrates, ou de compétences nationales apolitiques, loin du principe des quotas partisans. L’argument des tenants de cette idée, est que les gouvernements politiques qui se sont succédé depuis la révolution n’ont pas réussi, du fait des tiraillements politiques idéologiques, des divergences entre leurs composantes, du manque de solidarité gouvernementale, etc.

*La deuxième position est un gouvernement politique sans Ennahdha, le tout sauf Ennahdha, en fait. Cette idée défendue particulièrement par le mouvement Echaâb et plus discrètement par le Courant démocrate, impute les difficultés du pays, et la dégradation de la situation au fait qu’Ennahdha a été pendant dix ans au pouvoir en Tunisie. Il est temps que le pays respire un peu, appellent les partisans de cette thèse.

*La troisième position défendue par Ennandha et Qalb Tounes, est celle d’un gouvernement politique d’unité nationale, doté d’une large ceinture politique, lui permettant de faire passer ses lois, de prendre des décisions de de mettre en œuvre des réformes.

Hichem Mechichi devra concilier entre ces trois positions inconciliables, et proposer un gouvernement qui satisfasse le grand nombre, et qui réussisse à avoir une majorité confortable à l’Assemblée afin qu’il ait les coudées franches à décider, à gouverner et à réformer ; ce n’est pas gagné d’avance.

Ce lundi, le successeur désigné d’Elyes Fakhfakh recevra de nouveau, séparément l’influente organisation syndicale, en la personne de son Secrétaire Général, Noureddine Taboubi, et la principale organisation patronale, l’Utica, en la personne de son président, Samir Majoul, pour leur donner la teneur de ces deux semaines de discussions, et recueillir leur feed-back.

En fin de journée, Mechichi tiendra une conférence de presse pour présenter à l’opinion un aperçu sur l’état d’avancement des concertations. Il devra, selon toute vraisemblance, annoncer quelle direction compte-t-il emprunter et s’il sera capable de présenter sa composition gouvernementale au terme d’un mois ; auquel cas, il aura à consacrer les deux semaines restant du deadline constitutionnel, à concevoir et fignoler l’architecture gouvernementale, et à choisir les noms des titulaires des différents portefeuilles ministériels.

De là à espérer que tout sera prêt à la rentrée de septembre qui s’annonce dure, ne serait-ce que sur les plans sanitaire et socioéconomique, il n’y a qu’un pas que les incrédules réfléchiront par deux fois avant de franchir.

H.J.

1 Auteurs du commentaire
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Gianni

Bien que les faits ont montré que les politiciens tunisiens toutes catégories confondues sont des nullards. il faut se poser la question à quoi servent des élections au pays de TARARANI ?